Un sujet polémique
Le film "Innocence of Muslims" ("L'Innocence des musulmans") se veut une description de la vie du prophète Mahomet. Il dépeint ce dernier comme un voyou aux pratiques déviantes et a offensé de nombreux musulmans et déclenché une vague de protestations anti-américaines, qui a fait plusieurs morts. Des représentations diplomatiques américaines, des écoles et des commerces ont également été pris pour cible au cours de manifestations.
Les réalisateurs
Bien que le nom cité au générique soit le pseudonyme de "Sam Bacile", trois hommes sont pour l'instant pressentis pour avoir participé à la réalisation du film islamophobe. Ces trois personnes seraient des partisans du prêtre copte Zakaria Botros, connu pour ses positions fortement anti-islam.
Parmi ces trois hommes, un quinquagénaire égyptien (N.B.N.) immigré à Los Angeles a été entendu samedi par la police. Pisté par les journalistes, N.B.N. a démenti être le réalisateur Sam Bacile mais affirme que ce dernier existe bien. Toutefois, le numéro de téléphone portable associé à Sam Bacile est rattaché à l’adresse de cet américano-égyptien. Ce dernier avait aussi parlé ouvertement de son admiration pour Zakaria Botros en 2010, selon un journal américain.
La deuxième personne impliquée - mais à la production du film cette fois - est le copte J.N., qui est également président de l'association "Media for Christ" ("Les médias pour le Christ"), basée près de Los Angeles. La page internet de l'organisation comporte un lien renvoyant au site du père Botros.
Le militant anti-islam Steve Klein a reconnu avoir collaboré avec les auteurs du film. Vétéran de la guerre du Vietnam, il est l'auteur d'un livre intitulé "L'islam est-il compatible avec la Constitution?", publié en 2010 et dans lequel il dit être un "ami proche" de Zakaria Botros.
Enfin le film aurait été réalisé un américain de 65 ans (A.R.), connu jusqu'ici pour être auteur de films pornographiques et d'action à petit budget. Mais ce dernier n'était probablement pas au courant des manipulations en post production, afin de transformer le film en manifeste anti-islam.
Des acteurs trompés
Le film a été tourné sous le titre de "Guerriers du désert" en 2011 dans la ville de Duarte, près de Los Angeles. Les acteurs affirment avoir été trompés, croyant jouer dans un film de fiction épique. Initialement, les personnages principaux s'appelaient George, Condalisa et Hillary, mais la version finale du script les faisaient interpréter le prophète Mahommet et d'autres personnages du Coran. Un doublage a transformé leurs répliques. Tous les acteurs ont par ailleurs signé une déclaration commune dénonçant le film.
La diffusion
Le film a été promu par des coptes et par des chrétiens évangéliques antimusulmans de droite, tel que le pasteur de Floride Terry Jones, connu pour avoir brûlé des Coran. Une projection dans un cinéma du sud de la Californie n'a pas abouti, aucun billet n'ayant été vendu une demi-heure après le début de la projection, selon le consultant du film. La Maison Blanche a demandé à YouTube, qui en propose un extrait, de s'assurer que la vidéo ne viole pas les conditions d'utilisation du site.
Par ailleurs, la justice américaine a rejeté jeudi 20 septembre la demande d'une actrice ayant participé au film islamophobe, qui réclamait son retrait du site internet de vidéos YouTube aux Etats-Unis.
L'actrice Cindy Lee Garcia réclamait en référé le retrait de la bande-annonce du film, qui a provoqué depuis le 11 septembre des violences meurtrières dans le monde arabo-musulman. Elle affirme avoir été trompée sur les intentions réelles du film et de ses producteurs. Le juge a fait valoir que l'homme identifié par le FBI comme le réalisateur du film tourné et produit à titre privé aux Etats-Unis, n'a pas reçu copie du dossier de plainte. Il n'y a donc pas eu jugement sur la forme. L'actrice a aussi porté plainte contre le réalisateur.
La semaine dernière YouTube, propriété de Google, avait empêché l'accès aux 14 minutes du film en Egypte et en Libye. D'autres pays, comme le Pakistan et le Soudan, avaient bloqué eux-mêmes l'accès à la vidéo, qui dénigre la figure du prophète Mahomet. Mercredi, YouTube a annoncé avoir étendu l'interdiction à "des pays où la vidéo est considérée illégale par les autorités locales, comme l'Inde, l'Indonésie, la Malaisie et l'Arabie Saoudite".
Les poursuites
Malgré les violences que son film a provoquées, le producteur bénéficie d'un amendement sur la liberté d'expression qui interdit les poursuites pour des propos insultants. Il a déclaré vendredi à la radio américaine en arabe Radio Sawa ne pas regretter ce tournage, tout en se disant "attristé par la mort de l'ambassadeur". Il est sous surveillance policière depuis mercredi.
bri/jzim avec les agences