La justice grecque a acquitté jeudi soir le journaliste accusé de violation des données personnelles après la publication d'une liste d'individus présumés détenteurs de comptes en Suisse (lire Le journaliste grec qui a publié la "liste Lagarde" devant ses juges).
L'acquittement de l'homme de 46 ans, journaliste de télévision et d'investigation pour le magazine "Hot Doc", a été prononcé au terme d'une audience marathon de 12 heures, qui s'est muée en procès de l'évasion fiscale et en défense de la liberté d'expression.
L'homme avait été inculpé dimanche pour avoir publié samedi une liste comprenant plus de 2000 noms d'individus, tirée de données provenant de la banque HSBC en Suisse, selon lui.
"C'était mon devoir de publier cette liste"
Le procureur avait requis quelques heures plus tôt la condamnation de l'accusé. "Vous avez ridiculisé publiquement une série de personnes, vous avez livré ces gens à une société assoiffée de sang", avait-il notamment déclaré, ajoutant que "la solution aux problèmes que traverse le pays n'[était] pas le cannibalisme".
"C'était mon devoir de publier cette liste", s'était défendu le journaliste mis en cause. "Même si mon père avait figuré sur cette liste, je l'aurais publiée", avait-t-il ajouté, accusant l'ex-ministre des Finances et actuel président du Parti socialiste Pasok, Evangélos Vénizélos, d'avoir dissimulé cette liste et de s'en être servi pour sa campagne électorale.
"Au lieu de lutter contre les fraudeurs fiscaux, on coupe les salaires des juges et des retraités", avait lancé le journaliste.
afp/ptur
Les coupes dans les retraites jugées "anticonstitutionnelles"
Tandis que le journaliste inculpé dénonçait au tribunal les mesures d'austérité, la cour des comptes grecque a jugé jeudi "anticonstitutionnelles" les nouvelles coupes dans les retraites des fonctionnaires et la suppression de certaines de leurs primes prévues par le projet de budget pour 2013, a indiqué l'agence de presse Ana (semi-officielle).
Le ministère des Finances a tenté de minimiser la décision de la cour des comptes, indiquant simplement dans un communiqué que cette cour, compétente pour un avis consultatif aux projets de lois, réitère "la nécessité de partager d'une façon proportionnelle les charges publiques dans une période de crise".
Malgré la grogne sociale et la réaction de certains députés de la coalition gouvernementale, le ministre grec des Finances Yannis Stournaras s'est montré confiant et a dit croire que "ces mesures seront adoptées".
Nombreux soutiens
Le journaliste grec était soutenu par nombre d'ONG internationales des droits de l'homme telles que Reporters sans Frontières (RSF), Amnesty International ou le Comité de Protection des Journalistes (CPJ).
Le président de la Fédération internationale des journalistes, Jim Boumelha, qui a témoigné jeudi matin en sa faveur, a qualifié le procès de "farce absurde".
Le président du syndicat des journalistes d'Athènes, Dimitris Trimis, a également témoigné devant la cour : "J'aurais fait la même chose, si j'étais à [sa] place", a-t-il dit, ajoutant qu'"un compte bancaire n'est pas une donnée personnelle (...) dans une époque de transparence".
La députée du parti de la gauche radicale Syriza et fille d'un des avocats de la défense, Zoé Constantopoulou, a pour sa part estimé que ces poursuites étaient "un camouflet à la démocratie".