La France, poursuivant ses frappes aériennes contre les islamistes, a annoncé mardi le déploiement à terme de 2500 soldats au Mali, pays où elle vise le rétablissement de la sécurité et de la stabilité politique, selon le président François Hollande.
De leur côté, les chefs d'état-major ouest-africains se sont retrouvés mardi à Bamako pour préparer la "libération" du nord du Mali qu'occupent des groupes armés islamistes depuis neuf mois en formant une force internationale africaine.
"Arrêter l'agression terroriste"
En visite à Dubaï, le président Hollande a affirmé: "La France n'a pas vocation à rester au Mali mais nous avons un objectif, c'est de faire en sorte que lorsque nous partirons il y ait une sécurité au Mali, des autorités légitimes, un processus électoral et plus de terroristes".
L'intervention militaire française a trois objectifs: "arrêter l'agression terroriste", "sécuriser Bamako" et permettre au Mali de préserver son "intégrité territoriale", a-t-il déclaré à la presse.
Sollicité mardi soir par l'AFP, le ministère français de la Défense s'est quant à lui refusé à tout commentaire "sur les opérations en cours". Le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian a reconnu mardi que Konna (centre) n'avait pas encore été reprise par l'armée malienne, contrairement aux affirmations maliennes. La zone n'est pas accessible à des observateurs indépendants.
La chute de Konna avait déclenché l'intervention de la France, qui redoutait une percée vers Bamako des djihadistes.
Fiefs du Nord abandonnés
Les forces françaises ont bombardé dans la nuit de lundi à mardi les djihadistes à Diabali (ouest), à 400 km au nord de Bamako, où étaient entrés la veille les islamistes dirigés par un émir algérien d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), Abou Zeid. (Lire aussi: Une ville au nord de Bamako tombe en mains islamistes au Mali)
Lundi, les combattants islamistes étaient repassés à l'offensive dans l'ouest en s'emparant de cette ville. Cette attaque était dirigée par l'Algérien Abou Zeid, un des chefs d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), selon une source sécuritaire régionale. "Ils ont pris Diabali, une petite commune, après des combats importants" face à l'armée malienne, avait reconnu lundi le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian.
Mais dans le même temps, les djihadistes avaient abandonné leurs fiefs dans le nord, comme Gao, soumise dimanche à d'intenses bombardements qui ont tué plus d'une soixantaine de combattants, selon des habitants et une source sécuritaire.
afp/jgal/olhor
Soutien international à l'opération Serval
A New York, la France a obtenu dans la nuit de lundi à mardi la "compréhension et le soutien" des 14 membres du Conseil de sécurité, selon l'ambassadeur français Gérard Araud.
Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a également exprimé son soutien à l'opération française, tout en soulignant la nécessité d'une réconciliation politique dans le pays.
Le secrétaire général de l'Organisation de la coopération islamique (OCI) Ekmeleddin Ihsanoglu a appelé de son côté mardi à un "cessez-le-feu immédiat" au Mali, membre de l'organisation, et à un retour aux négociations entre Bamako et les islamistes sous le parrainage du Burkina Faso.
De son côté, la Cédéao doit former une force d'intervention de 3300 soldats contre les islamistes du Nord, conformément à une résolution de l'ONU. Baptisée Misma (Force internationale de soutien au Mali), dette unité sera dirigée par un général nigérian, Shehu Abdulkadir.
Le Nigeria doit fournir 900 hommes, et les premiers arriveront "dans les prochaines 24 heures", selon Abuja. Le Niger, le Burkina Faso, le Togo et le Sénégal ont également annoncé l'envoi d'environ 500 hommes, le Bénin 300, la Guinée et le Ghana une centaine chacun.
La France officiellement menacée
Des djihadistes basés dans le nord du Mali ont annoncé lundi qu'ils allaient "frapper le coeur de la France", selon un responsable du MUJAO.
"La France a attaqué l'Islam (...) Au nom d'Allah, nous allons frapper le coeur de la France", a déclaré Abou Dardar, l'un des responsables du Mouvement pour l'unicité et le djihad en Afrique de l'Ouest (MUJAO).
Interrogé sur l'endroit où ce "coeur" de la France serait frappé, Abou Dardar a affirmé: "Partout. A Bamako, en Afrique et en Europe".
Abou Dardar a aussi évoqué le sort des huit otages français détenus au Sahel. "Nous allons faire aujourd'hui un communiqué sur les otages", a-t-il déclaré.
Plus de 400'000 personnes réfugiées ou déplacées
Le nombre de réfugiés chassés par le conflit au Mali approche les 150'000 personnes dans les pays voisins, a indiqué mardi le Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR), et le nombre de personnes déplacées dans le pays est proche de 230'000, a précisé le bureau de coordination des Affaires humanitaires de l'ONU (Ocha).
Parmi les réfugiés en provenance du Mali, 54'100 se trouvent en Mauritanie, 50'000 au Niger, 38'800 au Burkina Faso et 1500 en Algérie, a indiqué un porte-parole à Genève. Il a enregistré l'arrivée au Niger de 450 personnes déclarant fuir les opérations militaires les 11 et 12 janvier. Au Burkina Faso, 309 réfugiés sont arrivés ces derniers jours, et en Mauritanie 471, en majorité des femmes et des enfants.
Pour l'Ocha, le nombre estimé de déplacés au 14 janvier était de 229'000 personnes, soit 30'000 personnes de plus depuis la reprise des combats.
A Konna, 5000 personnes (la moitié de la population) ont fui la ville en traversant le fleuve Niger, selon la Commission sur les mouvements de population au Mali, qui admet avoir des difficultés à avoir des sources absolument fiables.
L'aide humanitaire manque de moyens
Le Programme alimentaire mondial (PAM), qui distribue de la nourriture au Mali via neuf ONG, a souligné qu'il lui manque un financement de 129 millions de dollars (119,6 millions de francs suisses) pour répondre aux besoins, soit 94% des financements requis pour 2013, a indiqué une porte-parole de l'organisation.
En 2012, le PAM a fourni une aide à 1'200'000 personnes affectées par le conflit malien, dans le pays et les pays voisins.
Dans ses previsions de budget pour 2013, l'ONU a dit en décembre avoir besoin de 370 millions de dollars, soit 73% de plus qu'en 2012, pour aider 4,29 millions de personnes.