Les premiers témoignages vendredi des rescapés de la prise d'otages en Algérie permettent d'ébaucher le récit encore confus de la prise d'otage survenue mercredi sur le complexe gazier d'In Aménas, situé à 1300 kilomètres d'Alger, dans le désert du Sahara.
Samedi, un ultime assaut des forces spéciales algériennes a permis de mettre fin à la prise d'otage, causant la mort de sept otages et onze ravisseurs.
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"On ne cherche que les expatriés"
"Tout à coup les explosions. Ils ont cassé les portes tout en criant: on ne cherche que les expatriés", témoigne sur France Info un ingénieur algérien, datant le début de la prise d'otages". "C'était l'heure du changement des équipes", sur le site gazier d'In Aménas. "Tout à coup, il y a eu les coups de feu, les explosions, on a rien compris, l'alarme s'est déclenchée", a poursuivi cet homme à la voix jeune, qui a gardé l'anonymat.
"Juste après, ils nous ont plongés dans le noir, ils ont réussi à couper l'électricité, ils ont pris possession de la base, ils sont entrés dans les chambres, ils ont cassé les portes tout en criant: on ne cherche que les expatriés, les Algériens vous pouvez partir!", selon ce témoin interrogé par téléphone depuis Paris. "Ils ont récupéré les expats, ils les ont encerclés, ils les ont attachés. Ils se sont regroupés du côté du restaurant", a poursuivi l'ingénieur.
Outre les centaines de travailleurs algériens, des Américains, des Britanniques, des Japonais, des Français, un Irlandais, des Norvégiens et des Philippins figuraient parmi les otages.
"Ils étaient super bien armés"
Les ravisseurs avaient "des accents qui paraissaient libyens, algériens", selon cet ingénieur algérien. "Je peux vous assurer que les gens qu'on a vus, qui nous ont laissés partir, n'étaient pas des noirs, mais de type maghrébin, normal. Ils étaient super bien armés, très à l'aise, 30-35 ans. On a entendu des tirs d'armements lourds", a-t-il poursuivi, évoquant des ravisseurs "munis de bombes".
Un autre témoin algérien affirme avoir vu "deux terroristes juste devant la porte, bien armés, barbus, en tenue afghane, l'un avec l'accent qui n'était pas algérien".
D'après cet autre salarié algérien sur la base, les "rafales de balles" ont "duré plus de deux heures et demie. C'était les terroristes qui ont envahi la base".
"Quand ils ont vu que l'armée algérienne a pris position, ils ont séparé les otages, les expats d'une part; les Algériens, ils les ont emmenés dans le foyer", selon ce témoignage également anonyme.
Lors de cette opération militaire, "ils (les ravisseurs) ont pris la fuite", selon lui. "Maintenant, on est sans nouvelle de nos collègues expats qui travaillent avec nous. C'est eux qu'ils ont pris pour bouclier".
"40 heures caché sous mon lit"
"Je suis resté caché pendant presque 40 heures dans ma chambre", a raconté à la radio Europe 1 un Français, Alexandre Berceaux, salarié de la société française CIS Catering.
"J'étais sous le lit, j'ai mis des planches un peu partout au cas où. J'avais un peu de nourriture, un peu à boire, je ne savais pas combien de temps cela allait durer", a ajouté le ressortissant français, qui pense avoir été sauvé par des militaires algériens.
"Il y a des terroristes qui sont morts, des expatriés, des locaux", a-t-il assuré. "Ca tirait beaucoup par séquences, cela dépendait", a-t-il témoigné sur l'assaut des forces algériennes.
"On a d'abord trouvé trois Anglais qui étaient cachés dans le faux plafond, plus cette personne blessée, partie directement à l'hôpital", a-t-il ajouté.
"Je pense qu'il y a encore des personnes cachées. Là ils sont en train de faire les comptes". "Personne ne s'y attendait. Le site était protégé. Il y a des forces militaires sur place", dit ce Français.
Des otages enveloppés d'explosifs
L'épouse d'un employé philippin blessé, Ruben Andrada, raconte que les otages avaient été enveloppés d'explosifs et installés dans des camions piégés.
"Ils lui ont mis une bombe sur lui, comme un collier", a affirmé Edelyn Andrada à une radio de Manille. "Heureusement, la bombe installée dans le camion n'a pas fonctionné. Les bombes dans les autres véhicules ont été déclenchées et des gens sont morts", a-t-elle ajouté.
Un autre rescapé, Jojo Balmaceda, employé par BP, a raconté avoir été, ainsi que trois autres Philippins, ligoté puis jeté dans un camion avec d'autres otages japonais et malaisiens, selon la chaîne philippine GMA.
agences/jgal
La "dette éternelle" d'un ex-otage
Un Ecossais, pris en otage sur le site gazier d'In Aménas en Algérie, a rendu hommage dimanche à ses collègues algériens qui l'ont aidé à s'échapper avec d'autres expatriés, soulignant qu'il avait envers eux une "dette éternelle".
Cet employé de BP, âgé de 37 ans, s'est caché pendant près de 30 heures dans un bureau avec quatre autres étrangers et des employés algériens sur le site, alors que les coups de feu faisaient rage à l'extérieur, et ceux-ci ne les ont jamais laissé tomber.
Ce sont ces Algériens qui ont monté l'évasion du petit groupe et qui lui ont donné un chapeau pour qu'il ait "moins l'air d'un expatrié". Ensuite, "ils ont découpé le grillage (autour du site) et ça y est, nous étions partis".
"Je ne pourrai jamais assez dire de bien de ces gars qui étaient avec nous dans ce bureau et qui avaient la possibilité de se rendre et d'être en sécurité mais qui ont décidé de rester avec nous et de nous aider à nous échapper", a souligné l'ex-otage. "Nous avons une dette éternelle à leur égard".