Le déraillement meurtrier d'un train près de Paris, probablement dû à une pièce défectueuse sur un aiguillage, est intervenu alors que certains dénoncent de longue date un réseau qui s'est très fortement dégradé depuis 30 ans en raison de la priorité donnée aux trains à grande vitesse (TGV). (Lire: Une pièce défectueuse en cause dans le déraillement de Brétigny)
L'état inquiétant du réseau ferré ne date pas d'hier. En 2005 déjà, l'Ecole Polytechnique de Lausanne tirait la sonnette d'alarme face à la dégradation des voies. Faute d'entretien, 60% des lignes devaient être inutilisables en 2025.
Prise de conscience
Ce rapport marquait une véritable "prise de conscience" quant à l'état du réseau français, souligne Christophe Piednoël, directeur de la communication de Réseau ferré de France (RFF).
Entre 2008 et 2015, RFF a consacré 13 milliards d'euros à l'entretien et à la modernisation du réseau, soit deux milliards par an, contre un milliard en 2007. "On n'a jamais autant investi pour le réseau depuis la guerre", insiste Christophe Piednoël.
Dans un nouveau rapport de septembre 2012, les polytechniciens de Lausanne constatent que le lifting, à coups de milliards, a permis de ralentir le vieillissement du réseau, sans parvenir à le stopper.
Trois jours après la fin du tout TGV
Tragique coïncidence, le drame de Brétigny-sur-Orge est survenu trois jours à peine après l'annonce par le gouvernement de ses projets d'investissements dans le domaine ferroviaire avec une volonté de redonner la priorité au réseau existant et d'abandonner la politique du tout TGV.
Quels que soient les résultats de l'enquête dans la catastrophe de Brétigny, la modernisation du réseau existant restera une priorité nationale. Au total, le gouvernement a décidé d'investir plus de cinq milliards d'euros par an dans les transports d'ici à 2030. Deux milliards seront expressément consacrés à la modernisation du rail chaque année.
afp/gchi
Principales catastrophes ferroviaires en France
- 2 juin 2008: un train assurant la liaison entre Evian et Genève percute un car scolaire à Allinges, dans les Alpes, tuant sept collégiens et faisant 25 blessés.
- 11 octobre 2006: une collision de trains à Zoufftgen (est) fait six morts et 23 blessés. Quatre hommes avaient autorisé le passage d'un train de voyageurs venant du Luxembourg alors qu'un convoi de fret venant de France roulait déjà sur la voie unique.
- 6 novembre 2002: 12 voyageurs d'un train de nuit reliant Paris à Vienne meurent brûlés ou asphyxiés dans l'incendie de leur wagon-lit près de la gare de Nancy (est).
- 8 septembre 1997: 13 morts et 43 blessés à Port-Sainte-Foy (sud-ouest), dans la collision d'un camion de fioul, forçant un passage à niveau, et d'un autorail.
- 17 octobre 1991: 16 morts et 55 blessés dans une collision entre le train auto-couchettes Nice-Paris et un train de marchandises en gare de Melun près de Paris.
- 27 juin 1988: la collision de deux trains de banlieue Gare de Lyon à Paris fait 56 morts et autant de blessés.
- 31 août 1985: le déraillement d'un train, heurté ensuite par un train arrivant en sens inverse, à Argenton-sur-Creuse (centre) provoque la mort de 43 personnes.
- 3 août 1985 : collision frontale - due en partie à une erreur humaine - entre deux trains sur un tronçon à voie unique près de Figeac (sud). On recense 32 morts et plus de 160 blessés.
Pas de lien entre vétusté et sécurité
Si tous les acteurs du système ferroviaire s'accordent sur la dégradation du réseau, ils assurent de manière unanime qu'il n'y a pas de lien direct entre la vétusté des voies et d'éventuels problèmes de sécurité.
"Le fait d'avoir un réseau vétuste nous force à prendre des mesures de sécurité supplémentaires", explique-t-on à RFF.
"Ce qui est paradoxal et difficile à comprendre après ce que l'on vient de vivre, c'est que la France est un bon élève en matière de sécurité ferroviaire", martèle Christophe Piednoël.