Le oui des Suisses à l'initiative anti-immigration de l'UDC a vivement fait réagir le continent européen lundi, à l'image de la commissaire à la Justice Viviane Reding, qui a déclaré que la Suisse ne pouvait pas s'attendre à bénéficier des avantages du libre-échange avec l'UE sans accepter la liberté de circulation: "Ce n'est pas possible. Vous prenez tout ou vous laissez tout".
Lire aussi Johann Schneider-Ammann refuse de parler de "catastrophe"
Le président du Parlement européen Martin Schulz s'est montré prudent sur l'avenir des relations entre la Suisse et l'Europe et a demandé aux autorités fédérales de se positionner rapidement face aux accords bilatéraux. Et de souligner que l'UDC avait fait appel "aux plus bas instincts" des Suisses durant la campagne
Voir la vidéo de Martin Schulz:
Par la voix de sa porte-parole, le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a fait savoir que "ce n'est pas un bon signal" avant le début des négociations pour un accord-cadre entre la Suisse et l'UE. Mais il est selon elle encore trop tôt pour dire quelles conséquences l'UE tirera de ce vote: "La balle est désormais dans le camp de la Suisse".
Fabius inquiet, Fillon séduit
Le chef de la diplomatie française Laurent Fabius a lui estimé que le vote suisse est une mauvaise nouvelle pour l'Europe: "C'est un vote préoccupant parce qu'il signifie que la Suisse veut se replier sur elle-même (...) et c'est paradoxal car la Suisse fait 60% de son commerce extérieur avec l'Union européenne", a souligné à la radio RTL le ministre des Affaires étrangères.
"Cela va les pénaliser", a-t-il encore estimé, ajoutant que "la Suisse toute seule ne représente pas une puissance économique considérable".
Ecouter Laurent Fabius:
A l'inverse, l'ancien Premier ministre François Fillon a jugé "parfaitement naturel" que la Suisse veuille réduire le nombre d'étrangers sur son territoire, qui doit être modulé en fonction de la capacité à les intégrer. A ses yeux, ce modèle devrait être repris par l'UE ou la France.
"Qu'elle veuille réduire globalement le nombre d'étrangers sur son territoire, c'est une revendication parfaitement naturelle", a expliqué François Fillon sur BFM.TV.
"La décision suisse va causer de nombreux problèmes"
Du côté allemand, le ministre des Finances Wolfgang Schäuble "regrette la décision suisse". Il estime que ce vote sera source de nombreux problèmes dans les relations avec l'UE et en premier lieu néfaste pour la Suisse.
Il ajoute néanmoins que cette décision témoigne d'un malaise avec le principe de libre circulation et que cela doit être pris avec sérieux.
Les propos de Wolfgang Schäuble:
ats/jgal/moha
Des relations remises en cause
le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders, affirme que les relations entre la Suisse et l'Union européenne sont remis en cause: "On ne peut pas travailler à la carte avec l'UE", dit-il.
De son côté, député européen social-démocrate allemand Hannes Swoboda propose une contribution financière de la Suisse pour un accord avec l'UE avec, par exemple, "le versement de compensations pour les éventuels effets de cette initiative sur le chômage des jeunes".
Le Royaume-Uni voit une "inquiétude"
Le vote suisse en faveur d'une limitation de l'immigration reflète "l'inquiétude grandissante" concernant la libre circulation en Europe, a jugé lundi le porte-parole du Premier ministre britannique David Cameron.
"C'est pourquoi le Premier ministre et d'autres ministres ont soulevé cette question et vont continuer de le faire avec leurs homologues dans l'UE", a-t-il ajouté.
La commissaire européenne à la Justice Viviane Reding a déclaré lundi sur BBC Radio 4 que la Suisse ne pouvait pas s'attendre à bénéficier des avantages du libre-échange avec l'Union européenne sans accepter la liberté de circulation.
Le vote suisse pose des "problèmes" à l'Allemagne
Le vote suisse en faveur d'une limitation de l'immigration pose des "problèmes considérables", a indiqué lundi le porte-parole de la chancelière allemande Angela Merkel.
"Les relations étroites qui lient la Suisse à l'Union européenne apportent des deux côtés aux populations de grands avantages et la liberté de circulation est au coeur de ces liens étroits", a ajouté Steffen Seibert.
"Notre intérêt doit être de préserver une relation entre l'UE et la Suisse aussi étroite que possible de manière à ce que les deux parties, les deux partenaires soient en position de conserver leur propre compétitivité, dans un contexte de compétition globale", a-t-il encore souligné.
L'Italie se fait du souci
L'inquiétude règne dans les zones frontalières du Tessin après le "oui" à l'initiative sur l'immigration de masse. "C'est un résultat qui nous nuit", a réagi lundi Antonio Locatelli, président des frontaliers de la région Verbania-Cusio-Ossola (IT).
Les premiers signaux inquiétants sont déjà visibles sur le marché du travail suisse, a-t-il ajouté. "On trouve des annonces d'emploi qui donnent la préférence aux candidats qui parlent la langue du pays ou qui sont résidents".
La ministre italienne des Affaires étrangères Emma Bonino a également qualifié le résultat de la votation comme préoccupant. Elle a annoncé que le Conseil de l'Union européenne se saisirait du dossier.