En décidant de libérer l'opposante emprisonnée Ioulia Timochenko à Kharkiv (est) et de fixer une élection présidentielle anticipée le 25 mai, destituant de facto Viktor Ianoukovitch qui refuse de démissionner et dénonce un "coup d'Etat", le Parlement ukrainien a fait basculer samedi le pouvoir en une journée.
"La dictature est tombée non pas grâce aux hommes politiques et aux diplomates, mais grâce aux gens qui sont sortis dans la rue, qui ont réussi à protéger leurs familles et leur pays", a-t-elle souligné à son arrivée dans la soirée sur la place Maïdan de Kiev devant plus de 50'000 personnes.
Elle a ainsi rendu hommage aux centaines de milliers de personnes qui ont manifesté pendant trois mois leur opposition au régime et leur a demander en conclusion de continuer le combat.
Le Parlement ukrainien avait voté plus tôt dans la journée la "libération immédiate" de l'ex-Première ministre, égérie de la Révolution orange en 2004 emprisonnée depuis 2011 pour abus de pouvoir.
Le Parlement au pouvoir
Les députés ont ensuite constaté ce qu'ils ont considéré comme une vacance du pouvoir et destitué de facto le chef d'Etat. L'élection présidentielle anticipée a été fixée au 25 mai.
Mais, de Kharkiv, Viktor Ianoukovitch, dont le mandat court jusqu'en mars 2015, a assuré dans une allocution télévisée qu'il n'avait pas l'intention de démissionner. "Le pays assiste à un coup d'Etat. (...) Je suis un président élu de manière légitime", a-t-il souligné.
Il a aussitôt reçu le soutien de la Russie, qui estime que "l'opposition n'a pas rempli une seule de ses obligations" figurant dans l'accord signé vendredi avec le président. Elle dénonce "les extrémistes armés et les pillards dont les actes constituent une menace directe (pesant) sur la souveraineté de l'Ukraine".
Bâtiments officiels abandonnés
Le nouveau président du Parlement, Olexandre Tourtchinov, a affirmé que le chef d'Etat se cachait dans la région de Donetsk (est), dont il est originaire. "Il a essayé de prendre un avion à destination de la Russie, mais il en a été empêché par des gardes-frontières", a-t-il assuré.
Alors que l'accord qu'il a conclu vendredi prévoit qu'il entérine rapidement des mesures adoptées par le Parlement en vue de la constitution d'un gouvernement d'union nationale, Viktor Ianoukovitch a souligné qu'il n'allait "rien signer avec les bandits qui terrorisent le pays".
"Il n'y a pas de coup d'Etat à Kiev. Les bâtiments officiels ont été abandonnés. Le président du Parlement a été légitimement élu", a aussitôt répondu le ministre polonais des Affaires étrangères Radoslaw Sikorski, qui a participé aux négociations entre opposition et pouvoir.
La police a évacué le quartier gouvernemental dans la capitale, le laissant sous le contrôle du service d'ordre des opposants. L'armée a de son côté fait savoir qu'elle n'allait "pas s'impliquer dans le conflit politique".
Voir aussi le reportage à la résidence présidentielle abandonnée:
agences/olhor
L'Europe et les Etats-Unis saluent la libération de Timochenko
Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, s'est félicité de ce dénouement.
La Maison Blanche a elle salué la libération de Mme Timochenko et rappelé qu'il revenait aux Ukrainiens d'établir "leur propre avenir" après la destitution du président.
Le président aurait tenté de quitter l'Ukraine
Le président ukrainien Viktor Ianoukovitch a tenté samedi de corrompre des gardes-frontières à Donetsk (est) pour qu'ils laissent son avion décoller, a déclaré à l'AFP un porte-parole des gardes-frontières.
"Quand les responsables sont arrivés pour vérifier les documents, ils ont été accueillis par des hommes armés qui leur ont proposé de l'argent pour pouvoir décoller sans autorisation (...) Peu après, deux véhicules blindés se sont arrêtés près de l'avion et le président en est sorti et a quitté l'aéroport", a-t-il ajouté sans pouvoir préciser la destination de l'avion.