Il y a un an, le 24 avril 2013, l'effondrement de l'immeuble Rana Plaza a fait plus d'un millier de morts et quelque 2400 blessés près de Dacca, la capitale du Bangladesh. Le bâtiment d'une extrême vétusté abritait 5 ateliers de confection, sous-traitant essentiellement pour des marques de prêt-à-porter occidentales. Les conditions de travail des ouvriers, premières victimes du drame, ont suscité une vague d'émotion et des engagements internationaux.
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Premier axe: relever le niveau de sécurité
L'accident a convaincu quelque 150 multinationales qui sous-traitaient au Bangladesh de signer l'Accord sur le feu et la sécurité des bâtiments. Ce traité, juridiquement contraignant, vise à sécuriser les usines textiles bangladaises par le biais d'inspections réalisées par des ingénieurs locaux et internationaux, et financées par les signataires.
Le texte fixe des normes en matière d'électricité, de construction et de protection contre le feu. Il exige aussi davantage de transparence de la part des membres.
Qui a signé?
Parmi les signataires figurent C&A, Adidas, Esprit, Benetton, Mango, H&M ou encore Inditex (Zara, Bershka...). Du côté des entreprises suisses, Charles Vögele, Switcher et Vistaprint ont signé. Migros et Coop ont choisi de ne pas le faire, jugeant trop faible leur volume d'affaires avec le Bangladesh (respectivement 2% et 0,2%).
Tally Weijl avait annoncé sa signature mais n'a jamais concrétisé; la marque Chicorée, mise en cause par l'émission Mise au Point (voir ci-contre) n'a pas paraphé non plus. Les grands absents sont les géants américains du textile GAP et Walmart, acheteurs majeurs au Bangladesh, qui ont élaboré leur propre accord non-contraignant.
Quelles avancées?
Les premiers rapports d'inspection n'ont été publiés que le mois dernier, un "délai normal" selon Géraldine Viret de l'ONG Déclaration de Berne. Ils concernent 10 usines sur les quelque 1600 qui doivent être examinées d'ici septembre.
On y lit que chaque atelier de confection étudié présente des problèmes sérieux, "moins critiques" toutefois que ceux qui avaient causé l'effondrement du Rana Plaza: issues de secours inaccessibles, systèmes d'alarme inexistants ou hors service, absence d'extincteurs, installations électriques obsolètes... Et, d'une manière générale, des structures trop fragiles pour abriter ce genre d'activité. Les "mesures correctives sont en cours", précise la fondation.
Contactée par la RTS, cette dernière s'est refusée à dévoiler les noms des marques qui collaborent avec les usines contrôlées: "nos accords de confidentialité prévoient que l'on ne lie pas une entreprise particulière à une usine particulière", a fait savoir la fondation.
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Deuxième axe: dédommager les victimes
Un comité de coordination, baptisé "L'Arrangement du Rana Plaza", a été mis en place en septembre avec le gouvernement et les syndicats bangladais, dans le but de soutenir financièrement les familles de victimes et les blessés. Un fonds dédié, le Rana Plaza Donors Trust Fund, a été mis en place en janvier sous l'égide de l'Organisation internationale du travail (OIT).
Qui a donné?
Toutes les entreprises qui collaboraient avec des usines du Rana Plaza devraient en théorie contribuer. Selon la Déclaration de Berne, elles sont une trentaine (voir encadré). Mais beaucoup de ces sociétés nient avoir fait appel à des travailleurs du Rana Plaza; d'autres refusent d'assumer une quelconque responsabilité, rejetant la faute sur leurs sous-traitants.
A ce jour, une quinzaine de marques dont C&A, Inditex, Primark ou encore Mango ont fait des donations. H&M a aussi affirmé à la RTS avoir donné 100'000 dollars "à titre humanitaire" via sa fondation.
Où en est-on?
Les personnes éligibles à une compensation peuvent soumettre leurs réclamations depuis le 24 mars, mais la somme nécessaire pour dédommager toutes les victimes, estimée à 40 millions de dollars (35 millions de francs), est loin d'avoir été entièrement collectée. Actuellement, seuls 15 millions de dollars ont été versés.
Pauline Turuban
La liste des clients du Rana Plaza est difficile à établir avec certitude
La Déclaration de Berne affirme que les entreprises suivantes avaient des relations commerciales avec le Rana Plaza en particulier, au moment des faits ou avant. Une liste "difficile à reconstituer" et sans garantie d'exhaustivité, selon l'ONG.
Les signataires de l'Accord sur la sécurité ayant fait une donation
Bon Marche (Royaume-Uni), Camaïeu (France), LPP (Pologne), El Corte Inglès (Espagne), Loblaw (Canada), Kik (Allemagne), Mango (Espagne), Primark (Royaume-Uni, Irlande), C&A (Belgique), Inditex (Espagne). A noter que le groupe espagnol nie avoir travaillé avec le Rana Plaza et a assuré à la RTS avoir "donné au fonds d'indemnisation pour des raisons humanitaires" seulement.
Les signataires de l'Accord qui n'ont pas annoncé de donation
Matalan (Royaume-Uni), Gueldenpfennig (Allemagne), Auchan (France), Carrefour (France) et Benetton (Italie). Récemment pointée du doigt, la marque italienne met toutefois en avant son partenariat avec l'ONG BRAC pour fournir des prothèses aux survivants de l'effondrement.
Les marques qui n'ont pas signé l'Accord mais fait une donation
Premier Clothing (Royaume-Uni), Walmart (Etats-Unis), Mascot (Danemark)
Les marques qui n'ont ni signé l'Accord, ni fait de donation
Adler Modemärkte (Allemagne), Cato Fashions (Etats-Unis), The Children's Place (Etats-Unis), Kids for Fashion (Allemagne), Manifattura Corona (Italie), NKD (Allemagne), Grabalok (Royaume-Uni), PWT (Danemark), YesZee (Italie), Ascena Retail (Etats-Unis), JC Penney (Etats-Unis).