Une enquête de Swissinfo.ch publiée samedi jette une lumière crue sur la traite d'êtres humains dans le désert du Sinaï en Egypte. Le site livre le témoignage de migrants érythréens capturés et torturés sur le chemin de l'exil.
Alors qu'ils tentaient de fuir le régime du leader Isaias Afewerki, ils ont été emmenés dans le Sinaï où ils sont restés en détention alors que les ravisseurs rançonnaient leurs familles.
Intermédiaires en Suisse et en Europe
Les ramifications de ce trafic s’étendent en Europe et en Suisse, où les familles érythréennes sont sommées de payer les rançons, jusqu'à 40'000 dollars en cash, des réseaux d'intermédiaires s’occupant de transférer l’argent.
Selon l'enquête de Swissinfo, au moins 30'000 personnes ont été enlevées dans le Sinaï entre 2009 et 2013, pour un butin de 622 millions de dollars (587 millions de francs). Les groupes criminels impliqués seraient au nombre d’une quarantaine.
Les victimes érythréennes sont souvent vendues comme esclaves en Libye, précise Méron Estefanos, co-auteure de deux études sur le sujet.
kkub
Mise en garde d'Europol
Préoccupée par la multiplication des demandes de rançon à l’intérieur des frontières européennes, Europol a invité les pays membres à unir leurs forces pour combattre le trafic d'êtres humains et le porter à la connaissance du public.
En Suisse, le service de recherche de la Croix-Rouge a reçu depuis 2010 au moins 40 demandes d’aide d’Erythréens victimes du Sinaï.
Des ONG ont également signalé quelques cas d’extorsion à la Police fédérale (FedPol).
Trafic dénoncé à plusieurs reprises
Le phénomène de la traite des êtres humains dans la péninsule du Sinaï a déjà été dénoncé à plusieurs reprises: d’abord par les organisations non gouvernementales, puis par les Nations unies et récemment encore par le Parlement européen, dans une résolution adoptée en mars 2014.
Les Erythréens, cible privilégiée
Au début, les ravisseurs visaient tous les migrants de la Corne de l’Afrique, mais avec le temps, ils se sont concentrés uniquement sur les Erythréens.
Ce choix s’explique par la présence d’une forte diaspora érythréenne en Europe et en Israël, particulièrement unie et susceptible de pouvoir payer les rançons.
Programme de l'OIM et du HCR
L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) ont lancé au Soudan un projet de soutien aux victimes de la traite d’êtres humains. La Confédération y participe.
Par contre, aucune aide spécifique n’est prévue en Suisse pour les migrants qui ont subi des épreuves similaires.