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Ennahda, proches de Ben Ali ou abstention, quel gagnant en Tunisie?

Un Tunisien montre son doigt peint devant le drapeau de son pays, prouvant qu'il a voté, lors du scrutin anticipé à l'étranger, ici en Egypte. [AP Photo/Hassan Ammar)]
Un Tunisien montre son doigt peint devant le drapeau de son pays, prouvant qu'il a voté, lors du scrutin anticipé à l'étranger, ici en Egypte. - [AP Photo/Hassan Ammar)]
Avec 13'000 candidats pour 217 sièges et une menace djihadiste grandissante, les législatives en Tunisie s'annoncent très tendues. Le point sur les forces en présence et le contexte politique.

Le contexte

Après la chute du régime de Ben Ali en janvier 2011, les Tunisiens ont élu une Assemblée constituante en octobre de la même année. Trois ans après, ils sont à nouveau appelés aux urnes pour élire les membres du futur Parlement, le premier élu démocratiquement.

Les premières élections avaient vu la victoire des islamistes d'Ennahda. Mais, sous les protestations, ceux-ci ont laissé la place en janvier 2014 à un gouvernement non partisan chargé de continuer les réformes et organiser les élections.

Mais vu le nombre important de Tunisiens qui se disent déçus de la classe politique, l'abstention pourrait être le vainqueur du scrutin.

Les résultats seront connus au plus tard le 29 octobre.

Ces législatives précèdent un autre vote d'importance, l'élection présidentielle du 23 novembre prochain.

Les chiffres-clés

- 13'000 candidats répartis sur 33 circonscriptions.

- 1300 listes

- 217 sièges du Parlement à repourvoir.

- 5,3 millions d'électeurs inscrits sur les 11 millions d'habitants.

- 45,3% du corps électoral n'est pas inscrit et n'ira donc pas voter.

- 80'000 policiers et militaires doivent être déployés

Le mode de scrutin

L'adoption en mai 2014 d'une nouvelle loi électorale instaure des législatives au scrutin proportionnel à un tour par circonscription, sans seuil minimal à atteindre.

Ce mode de scrutin favorisant les petites formations, les principales forces politiques ont d'ores et déjà souligné qu'aucun parti ne sera à même de gouverner seul.

Le Parlement devrait être très fragmenté et des coalitions devront se former.

Le favori: Ennahda

Le leader d'Ennahda Rachid Ghannouchi.
Le leader d'Ennahda Rachid Ghannouchi.

Le parti islamiste Ennahdha (la Renaissance) avait remporté la majorité des sièges de l'Assemblée constituante en 2011. Il a dirigé le parti jusqu'au début de l'année.

Affaibli par de graves crises et l'assassinat de deux opposants aux islamistes en 2013, Ennahda a quitté le pouvoir pour laisser la place à un gouvernement apolitique chargé de préparer les législatives.                

Axant sa campagne sur le "consensus" et un discours plus adouci et consensuel, Ennahda, qui revendique 80'000 membres, n'a pas retenu les candidatures les plus controversées, notamment les ténors de la frange dure du parti appelant à l'application de la loi islamique.

Face à une opposition morcelée, ce parti qui était interdit et violemment réprimé jusqu'à la révolution reste le pivot de la scène politique et fait figure de favori.

Les adversaires: Nidaa Tounès et les Bénalistes

Beji Caid Essebsi, l'un des principaux contradicteurs d'Ennahda. [KEYSTONE - EPA/Mohamed Messara]
Beji Caid Essebsi, l'un des principaux contradicteurs d'Ennahda. [KEYSTONE - EPA/Mohamed Messara]

Une multitude de partis allant de l'extrême gauche au centre-droit font campagne en se positionnant en alternative à Ennahda.
                 
Malgré une brève tentative d'union en 2013, au pic de la crise politique qui a mené Ennahda à quitter le pouvoir, ces différents mouvements font finalement cavalier seul pour les législatives tout en se disant prêts à former des coalitions après les élections.
                 
Un parti sort néanmoins du lot, Nidaa Tounès, conduit par Béji Caïd Essebsi, 87 ans, qui ambitionne d'arracher la présidentielle en novembre. Il avait occupé le poste de Premier ministre après la révolution et organisé les élections remportées par Ennahda.
                 
Ancien ministre du père de l'indépendance Habib Bourguiba, ex-chef du Parlement sous Ben Ali, il cherche à unir les adversaires des islamistes.
                 
Le parti est cependant tiraillé en interne, de nombreux cadres craignant la trop grande influence laissée à des personnalités issues du régime Ben Ali.            

Nidaa Tounès est aussi concurrencé par des partis dits "destouriens", revendiquant eux aussi l'héritage de Bourguiba et ayant des liens étroits avec d'ex-responsables du régime déchu.

boi avec TV5Monde et afp

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Le Premier ministre optimiste

Le Premier ministre Mehdi Jomaa a estimé samedi que ces législatives sont "porteuses d'espoir" pour tout le monde arabe malgré les menaces jihadistes. Il s'est montré confiant à la veille de ce scrutin crucial pour la stabilité du pays.

"Nous savons que cette expérience est visée (par les extrémistes) parce qu'elle est unique dans la région", a déclaré Mehdi Jomaa.

La transition démocratique de la Tunisie depuis la révolution de 2011 "c'est le contre-projet de ces gens-là, de ces groupes là, donc ils savent que la réussite de cette expérience est une menace pour eux, non seulement en Tunisie mais dans la région", a-t-il ajouté.

La menace djihadiste

Si la Tunisie fait figure aux yeux de la communauté internationale de dernier espoir de transition démocratique réussie parmi les pays du Printemps arabe, les autorités n'en craignent pas moins des attaques djihadistes visant à faire dérailler les élections.

D'ailleurs, un assaut, après plus de 24 heures de siège, contre une maison en banlieue de Tunis abritant un groupe armé s'est soldé vendredi par la mort de six suspects, dont cinq femmes, selon la police.

La veille, un gendarme avait déjà été tué.