Dans une tribune publiée mardi dans le Financial Times, le tout nouveau patron de l’agence britannique de surveillance (GCHQ) Robert Hannigan affirme que Facebook, Twitter ou encore WhatsApp sont devenus "un véritable centre de contrôle et de commandement" pour les groupes terroristes comme l'EI et les criminels.
En poste depuis seulement six jours, le chef des "grandes oreilles" britanniques ne mâche pas ses mots. Il estime que les grandes entreprises du web sont dans le déni de ce qui se passe sur leurs plateformes et qu’elles auraient intérêt à mieux collaborer avec les agences de renseignements. "La vie privée", écrit-il, n’a jamais été "un droit absolu", et face à la présence grandissante des terroristes sur les réseaux sociaux, il est vital selon lui de recentrer le débat sur la sécurité.
Robert Hannigan considère en quelque sorte que ces entreprises privées, devenues dominantes sur le web, ont quasi un devoir de service public: celui de lutter contre le crime et le terrorisme et, par conséquent, de faciliter le travail des espions. Mais ce qu’il leur reproche entre les lignes, c’est de faire exactement le contraire, en rendant leurs appareils et services de plus en plus difficiles à décoder.
Protection des données renforcée
Ces derniers mois, plusieurs firmes technologiques ont mis en place de nouveaux systèmes de protection des données pour regagner la confiance de leurs clients après les révélations d’Edward Snowden. Ces nouvelles barrières de sécurité déplaisent aux services de renseignements, et ils le font savoir haut et fort.
Car, dans ce bras de fer qu’ils mènent désormais avec les géants du net, ils savent qu’il est crucial d’avoir l’opinion publique de leur côté.
Catherine Ilic/oang
Défenseurs des libertés individuelles critiques
Ces déclarations ont suscité des commentaires critiques de la part des organisations de défense des libertés individuelles sur internet.
"Avant de condamner les efforts des compagnies pour protéger la sécurité de leurs utilisateurs, peut-être que (M. Hannigan) devrait se demander pourquoi la GCHQ a fait l'objet de tant de critiques", dit un responsable de Privacy International dans un courrier électronique à l'AFP.
Une responsable du groupe de défense des libertés sur internet Electronic Frontier Foundation (EFF) juge de son côté "hypocrite" la demande de coopération adressée par Robert Hannigan aux entreprises de la Silicon Valley.
Un double problème pour les géants du web
Interrogée mardi dans l'émission Forum de la RTS, Solange Ghernaouti, professeur à l'Université de Lausanne, rappelle que tous les services d'internet sont utilisés également à des fins criminelles. "Ca pose un vrai problème de savoir comment accéder aux informations de manière préventive de façon à lutter contre la cybercriminalité ou des actes d'ordre terroriste".
Cette experte internationale en cybersécurité constate cependant que ces grandes entreprises du web doivent faire face à un double problème: "On leur demande d'agir comme étant un service public ou au service du public au niveau international et ce sont avant tout des entreprises commerciales qui doivent satisfaire les exigences de leurs utilisateurs et clients".
Le problème, souligne Solange Ghernaouti, c'est que ces entreprises vont collaborer au coup par coup, en fonction de leurs intérêts et des Etats qui demandent des informations.