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Une ONG dénonce le glissement du code moral de l'armée israélienne

L'organisation Breaking the silence dénonce le glissement du code moral de l'armée israélienne. [AFP - Jack Guez]
Une ONG dénonce le glissement du code moral de l'armée israélienne / Le Journal du matin / 4 min. / le 5 mai 2015
Les règles d’engagement de l’armée israélienne n’ont jamais été aussi permissives que durant la guerre de l'été 2014, expliquant la mort de nombreux civils, affirme une ONG qui a recueilli des témoignages.

L’organisation non gouvernementale israélienne Breaking the silence (Brisons le silence) a rassemblé 60 témoignages de soldats de tous rangs qui ont combattu durant la guerre de l’été 2014 à Gaza contre le Hamas.

Selon elle, l’opération Bordure protectrice marque un glissement du code moral de Tsahal, qui a démarré lors de son premier conflit contre le Hamas en 2008-2009. L’été dernier, la guerre s’est soldée par 2200 morts côté palestinien, pour moitié des civils, et 72 côté israélien dont une majorité de militaires.

La politique du "zéro danger" pour Tsahal

"La politique d’ouvrir le feu particulièrement permissive qu’il y a eu à Gaza ne vient pas d’un officier qui est devenu fou. C’est un changement substantiel, fondamental de la doctrine d’engagement de Tsahal à Gaza", explique le fondateur de Breaking the silence. La doctrine qui se cache derrière ce comportement est ce qu’on appelle "zéro danger pour nos forces à n’importe quel prix", poursuit Yehuda Shaul.

Breaking the silence dénonce notamment le mode opératoire de l’armée qui - après avoir prévenu la population d’évacuer des quartiers jugés stratégiques - considère dès lors ces zones comme vides de population civile. Une fois l’armée sur place, toute personne qui s’y trouve est vue comme suspecte et devient une cible légitime.

Comment des soldats achèvent un civil

Parmi les témoignages recueillis, trois militaires racontent qu’ils se trouvaient dans une maison d’une zone évacuée quand ils ont vu s’approcher un homme âgé. Après lui avoir crié de s’arrêter sans succès et craignant qu’il ne porte sur lui des explosifs, l'un des soldats lui a tiré dessus. L’homme a été grièvement blessé. Mais après avoir constaté qu’il s’agissait d’un civil, et âgé, personne n’a voulu se risquer à le soigner. Un soldat explique: "Soit on le laissait mourir lentement, soit on mettait fin à ses souffrances." Ils l’ont donc achevé.

Yehuda Shaul et son équipe de Breaking the silence demandent désormais l'ouverture d'une enquête indépendante en Israël sur tous les cas soulevés par les témoignages.

A noter qu'une exposition de photos accompagnées de textes de soldats est organisée par l'ONG Breaking the silence au Kulturhaus Helferei de Zurich à partir du 4 juin.

Aude Marcovitch/oang

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Montée en puissance du Hamas en cause?

De leur côté, les détracteurs de l'ONG estiment que c’est la montée en puissance de la force militaire du Hamas qui explique la réponse de l’armée israélienne.

Professeur de philosophie, Asa Kasher a notamment rédigé le code d’éthique de Tsahal dans les années 90. Pour lui, c'est cette situation de guerre asymétrique contre un groupe armé opérant depuis les zones civiles et ayant développé ses capacités militaires qui explique l’augmentation de pertes civiles.

"Donc la force de frappe utilisée par l’armée est un sujet de professionnel militaire, et non pas stratégique ou politique", note-t-il.