"Après les attentats de Charlie, j'ai senti comme un flash totalitaire, sur les plateaux TV notamment. Il y a en France un problème de liberté d'expression", a affirmé dans le Journal du Matin l'historien-sociologue, dont l'ouvrage "Qui est Charlie? Sociologie d'une crise religieuse" paraît jeudi.
Dans la grande mobilisation du 11 janvier, après la tuerie dans le magazine satirique et dans un supermarché casher, les classes moyennes et supérieures étaient sur-représentées, explique l'auteur qui a tenu à préciser: "c'est le 11 janvier auquel je m'intéresse, les réactions de la société française, pas la tuerie abominable du 7. J'ai tout de suite vu que la carte des manifestations révélait que le 'Charlisme', ou la mobilisation, était tout à fait autre chose que ce qu'on disait, alors que les gens parlaient d'unanimité."
Minorités confrontées
Il y a une "escroquerie", estime ainsi Emmanuel Todd. "Tout le monde était là, pétri de bonne conscience républicaine, se gargarisant du mot de liberté. Et en fait, les régions qui étaient le plus mobilisées sont celles qui historiquement ont le plus résisté à la République dans l'histoire de France."
L'anthropologue pense ainsi qu'une partie de la France, qui venait de sortir de la religion catholique, s'est mobilisée pour réclamer le droit de blasphémer sur Mahomet, comme liberté fondamentale.
Dans cette "France de Charlie", l'islamophobie, tout comme l'antisémitisme, sont en progression, estime-t-il. "La mécanique est perverse: c'est la France des classes moyennes qui lance les minorités les unes contre les autres."
La France n'a jamais été homogène, expose encore Emmanuel Todd. "Maintenant, comme à d'autres époques de son histoire, elle doit faire le défi de l'accommodement."
"Patrick Pelloux n'est pas un gros cerveau"
Enfin face aux critiques visant son ouvrage, le sociologue a contre-attaqué, s'en prenant notamment à Patrick Pelloux (extrait à écouter ci-dessous), médecin urgentiste et chroniqueur à Charlie Hebdo qui avait accusé Emmanuel Todd de faire le jeu des intégristes.
kkub