"Même en période de crise, on ne peut pas s’empêcher de raconter", explique Miguel Gomes. Son film relate la vie bien réelle des gens, mais aussi l’imaginaire collectif de la crise au Portugal.
Un peu plus d'un an après avoir renvoyé chez eux ses créanciers, le Portugal a renoué avec la croissance économique, mais à quel prix?
L'Europe a voulu faire du Portugal le contre-poids du cas grec. Le bon élève. Celui qui a accepté en silence et qui a désormais réussi à surmonter la crise. "Ce n’est pas vrai, affirme le réalisateur. La dette publique n’est pas descendue depuis l’intervention de la troïka. C’est une fiction. Et pour moi, la mauvaise fiction fait semblant de passer par la réalité."
Moins de 420 euro par mois
Un Portugais sur cinq vit aujourd'hui avec moins de 420 euro par mois. Plus d’un million de personnes se trouvent aux limites de la pauvreté extrême. "Ils s'en sortent grâce aux institutions, qui commencent à occuper la place de l’Etat pour faire la charité", explique Miguel Gomes.
Profondément ancrée, la crise aurait aussi eu des effets sur le niveau d’éducation, en forte baisse, ainsi que sur de nouvelles vagues d'émigration, notamment dans les anciennes colonies (Mozambique, Angola).
Accepter son destin
Pourtant, les chiffres de la croissance économique affichent de bons résultats. "Nous avons touché le fond. Il y a donc forcément un moment où l'on commence à remonter, estime Miguel Gomes. Mais aujourd'hui, les gens ont moins d’argent qu'avant la crise. L’Etat social est toujours bloqué, même sans la troïka."
Pourquoi n'y a-t-il pas eu de scénario à la grecque? "Il y a dans la population cette idée qu'il faut accepter son destin. Qu'il n'y a pas d'autre option, répond Miguel Gomes. J'avais l'espoir que Syriza change le rapport de force en Europe. Mais rien a changé".
fme
Les Portugais aux urnes dans trois semaines
Dans trois semaines, les Portugais se rendront aux urnes pour désigner les 230 députés de leur Assemblée de la République, pouvoir législatif du pays. Les sondages n'annoncent aucune majorité.