"En temps de crise, les enfants sont à la fois la cible et les acteurs, voire même des auteurs de violences", souligne Frédéric Esposito mardi dans le Journal du Matin de la RTS. Il rappelle que le phénomène des enfants-soldats a accompagné les heures les plus tragiques de l'histoire, de la guerre de Sécession aux jeunesses hitlériennes, en passant par les mafias, les conflits en Afrique, le groupe Etat islamique en Syrie ou Boko Haram au Nigeria.
Victimes ou bourreaux?
"Un enfant qui est entraîné, conditionné pour être un acteur de réseaux criminels ou terroristes, et à qui on met une arme entre les mains, devient un soldat, un guerrier, même s'il est mineur et qu'il ne revêt pas l'uniforme (...) ce sont des enfants victimes d'une aliénation, notamment religieuse", décrit Frédéric Esposito. "Il faut alors trouver un équilibre entre leur besoin de protection et des solutions, voire des condamnations" pour leurs actes.
Il faut trouver un équilibre entre le besoin de protection de ces enfants et des solutions, voire des condamnations.
Mais l'enrôlement n'est pas nécessairement religieux, et grandir dans le giron de la Ndrangheta (mafia calabraise, ndlr) peut être considéré comme un phénomène similaire. C'est "en apprendre les valeurs", depuis les berceuses chantées au berceau, être "conditionné à ne pas avoir d'émotions", raconte également mardi à la RTS la journaliste italienne Angela Iantosca, auteure du livre "Bambini a metà" ("Enfants à moitié") consacré aux enfants de la mafia.
Grandir avec la mafia, c'est en apprendre les valeurs, être conditionné à ne pas avoir d'émotion.
Préoccupation "marginale"
"La défense des droits de l'enfant est très complexe et le droit à l'éducation est un énorme enjeu", souligne Frédéric Esposito, qui évoque la Convention internationale des droits de l'enfant comme outil majeur. "Mais ces éléments ne permettent pas aujourd'hui d'agir de façon plus autoritaire auprès des Etats qui ne respectent pas leurs engagements", nuance-t-il.
L'implication d'enfants "combattants" est "une préoccupation qui reste malheureusement en périphérie, marginale dans le débat", regrette Frédéric Esposito. "Il y a un tiraillement entre le besoin de protéger ces enfants et la nécessité de résoudre le conflit géopolitique", ajoute-t-il.
Autorités démunies
Les autorités sont en effet souvent démunies face au phénomène des enfants-soldats. La justice calabraise a pourtant mis en place un programme offrant aux mineurs issus de la mafia la possibilité d'être placés en maison d'accueil, pour l'heure utilisé seulement par une trentaine de jeunes.
"Le nombre est ridiculement faible, c'est sûrement dû au faible intérêt de l'Etat. Il manque des services sociaux où les accueillir. Il est encore très difficile d'envisager des pistes pour sortir ces jeunes de ce système", déplore Angela Iantosca.
jvia
Un repenti de 11 ans
Ces témoignages font écho au cas du jeune Nicola, 11 ans, qui serait le plus jeune repenti de l'histoire de la mafia italienne. En effet, ce fils d'un cadre de la Ndrangheta a choisi la semaine dernière de se confier à la justice italienne.
L'enfant est aujourd'hui un témoin-clé pour la justice, mais une cible à abattre pour la mafia. Il vit désormais sous haute protection.