Composé de l'UGTT, syndicat historique en Tunisie, du patronat (Utica), de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (LTDH) et de l'Ordre des avocats, le quartette a organisé un long et difficile "dialogue national" entre les islamistes et leurs opposants, les obligeant à s'entendre pour sortir d'une paralysie institutionnelle, a justifié le comité Nobel.
Celui-ci a précisé que le prix avait été décerné à titre collectif à ces organisations.
Fondements d'une fraternité nationale
Le quartette a lancé "un processus politique alternatif, pacifique, à un moment où le pays était au bord de la guerre civile", a encore rappelé le comité. Et de qualifier la Tunisie de "berceau et seul espoir du printemps arabe mais dont la fragile démocratie reste menacée par la violence djihadiste".
"Plus que tout autre chose, le prix se veut un encouragement au peuple tunisien qui, malgré des défis majeurs, a posé les fondements d'une fraternité nationale", laquelle, espère le comité, "servira d'exemple à suivre par d'autres pays".
La Tunisie, berceau et seul espoir du printemps arabe
Islamistes et laïcs travaillent ensemble
Après le renversement de la dictature de Zine El Abidine Ben Ali en 2011 et la paralysie qui avait suivi, ce dialogue national a mené à l'adoption d'une nouvelle Constitution début 2014. Et le gouvernement mené par les islamistes d'Ennahda, vainqueurs des premières élections libres du pays, a cédé la place à des technocrates pour permettre au pays de sortir d'une grave crise politique.
L'exemple tunisien "montre que des mouvements politiques islamistes et laïques peuvent travailler ensemble pour parvenir à des résultats significatifs dans les meilleurs intérêts du pays", a conclu le comité Nobel.
Alors que le printemps arabe a viré au chaos en Libye, au Yémen et en Syrie ou à la répression en Egypte, la Tunisie est restée sur les rails. En décembre dernier, elle a organisé la première élection présidentielle de son histoire qui a vu la victoire de Béji Caïd Essebsi. "La page" de l'autoritarisme est tournée, avait alors promis le nouvel élu.
agences/vkiss
Les principale réactions
Selon le syndicat UGTT, l'un des membres du quartette, ce prix est "un hommage pour les martyrs de la Tunisie démocratique". "Cet effort fourni par notre jeunesse a permis au pays de tourner la page de la dictature", a ajouté un responsable.
Pour Ali Zeddini, vice-président de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme, interrogé dans Forum, cette distinction est une surprise. "On s'y attendait l'année dernière".
Le président tunisien Béji Caïd Essebsi estime que ce prix "consacre le chemin que nous avons choisi, celui de trouver des solutions consensuelles". "La Tunisie n'a pas d'autre solution que le dialogue malgré les désaccords idéologiques", a-t-il ajouté.
Pour le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, ce choix est "une inspiration pour la région et pour le monde" et ce prix "appartient à tous ceux qui ont donné naissance au Printemps arabe et s'efforcent de préserver les sacrifices de tant de gens".
Les lauréats du Nobel "montrent la voie" pour sortir des crises régionales, a commenté dans la foulée l'Union européenne.
Ce prix "consacre la réussite de la transition démocratique en Tunisie et c'est aussi un encouragement pour encore soutenir la Tunisie dans les épreuves qu'elle traverse", a de son côté salué François Hollande, "heureux pour les Tunisiens".
Dans un tweet, le Premier ministre britannique David Cameron a estimé que ce Nobel contribuait à faire de la Tunisie "un phare de l'espoir dans la région".
"La récompense d'aujourd'hui est aussi un hommage à la persévérance et au courage du peuple tunisien", a ajouté le président américain Barack Obama