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"L'enjeu central de la guerre contre le terrorisme islamiste est idéologique"

Mohamed Sifaoui. [AFP - Thomas Samson]
L'invité de la rédaction - Mohamed Sifaoui / Le Journal du matin / 15 min. / le 20 novembre 2015
"Il faut avant tout s'attaquer au substrat idéologique car nous sommes face à une guerre idéologique", a indiqué à la RTS le journaliste Mohamed Sifaoui en appelant à "une déghettoïsation des musulmans".

Le laxisme des dirigeants européens face à la menace islamique explique en grande partie la situation actuelle, a indiqué l'invité de la Première ce vendredi. "On peut reprocher beaucoup de choses aux islamistes mais ils nous préviennent de tout ce qu'ils font et ce qu'ils comptent faire", a-t-il fait remarquer, avant de déplorer: "Cela fait 27 ans que je travaille sur la menace islamiste et on m'a souvent perçu comme un alarmiste".

Le pire, selon lui, est qu'en raison du déni des Occidentaux ces dernières décennies, les djihadistes risquent d'obtenir ce qu'ils souhaitent, à savoir cliver les populations et faire monter les extrémismes. "Ces sociétés sont tellement groggy de voir qu'elles se sont trompées pendant si longtemps qu'elles se réveillent dans une logique xénophobe. Elles deviennent presque aussi totalitaires que le mal qu'elles disent combattre", a-t-il relevé.

"Mettre les musulmans à l'abri"

Face à la montée de l'extrémisme islamiste, "c'est dans les principes démocratiques qu'il faut puiser sa riposte", a précisé le journaliste d'origine algérienne. L'approche doit être idéologique, politique, diplomatique et culturelle.

"Il faut mettre à l'abri toutes les populations vulnérables susceptibles de représenter un vivier pour les recruteurs", a-t-il confié. Ceci passe par l'éducation, une transmission des valeurs démocratiques, l'amélioration des conditions socio-économiques, une justice de punition et de réinsertion, ainsi que par la lutte contre le racisme.

Des révolutionnaires qui vont repasser à l'action

Contrairement à ce qu'indique l'ex-sénateur Dick Marty dans la presse ce matin, les terroristes islamistes ne sont pas des criminels, mais plutôt des révolutionnaires, selon Mohamed Sifaoui. "Comme d'autres, il ne prend pas en compte la dimension idéologique", a-t-il déploré."Le terrorisme est au service d'une idéologie, c'est un moyen, pas une fin", a-t-il encore rappelé.

Le renforcement des mesures de sécurité sont nécessaires car "les terroristes cherchent à marquer les esprits et vont essayer de repasser à l'action assez vite". Mais pour que ce dispositif soit efficace, "il faut s'attaquer à long terme au substrat idéologique qui nourrit le terrorisme", a-t-il martelé.

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Les pays arabes sont aussi responsables

Les régimes arabes ont leur responsabilité dans la montée de l'islam politique, selon Mohamed Sifaoui. "Ils l'ont généré car c'est le seul élément qui légitime leur régime", a précisé ce journaliste qui a fui l'Algérie en 1999 et qui vit sous protection policière.

"Les millions de dollars que l'Arabie saoudite a dépensé dont la diffusion du salafisme -qui a donné naissance au djihadisme- doivent être remis sur la table pour endiguer l'islamisme", a estimé l'écrivain.

"La diplomatie doit jouer son rôle et être ferme. La France a les moyens de faire pression. Ces pays du Golfe ont besoin de l'Occident plus que l'inverse".