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"Angela Merkel est en rupture avec une population qui a peur des réfugiés"

Frank A. Meyer. [Keystone - Christian Beutler]
Frank A. Meyer, journaliste / L'invité de la rédaction / 22 min. / le 25 avril 2016
Editorialiste et membre de la direction du groupe de presse Ringier établi à Berlin, Frank A. Meyer fustige la politique migratoire "autoritaire" de la chancelière allemande Angela Merkel.

Dimanche, Barack Obama déclarait que la relation qu’il avait tissée avec Angela Merkel était la principale de son mandat. Le président américain la décrit comme la gardienne de l’Europe. Pour Frank A. Meyer, cet éloge se révèle important car la chancelière allemande a totalement perdu l'appui du "simple" peuple: "L'unique soutien qu'elle conserve, c’est celui d’une élite qui gouverne. Une élite politique, journalistique et ecclésiastique. Pour le reste, elle est en rupture avec la population qui a peur des réfugiés."

Si les agressions de Nouvel An à Cologne, principalement commises par des migrants, ont servi de détonateur, le problème est antérieur, pour l'éditorialiste. En invitant les réfugiés syriens à venir en Allemagne l'été dernier, contournant par la même occasion les accords de Dublin, "Angela Merkel s'est montrée comme l'héroïne de la politique humanitaire".

Le monde islamique a un retard de deux cents ans sur notre monde moderne.Frank A. Meyer

"Où l'Europe aurait-elle perdu son honneur? Est-ce qu'elle doit accepter tous les gens qui viennent d'Afrique du Nord et du Proche-Orient? Le monde islamique a un retard de deux cents ans sur notre monde moderne. Il est dans un conflit énorme avec celui-ci à l'heure de la globalisation", s'indigne Frank A. Meyer, qui affirme cependant comprendre les réfugiés en quête d'un autre sort.

Ce qui gène le journaliste d'origine biennoise, c'est la posture "autoritaire" de la chancelière allemande: "L'Europe avait réagi. Et Angela Merkel a ouvert la porte sans même en parler au Parlement. Elle a laissé entrer un million de personnes dont on ignore qui elles sont. Il y a un grand problème." Pour autant, il serait trop fort de parler d'une erreur historique. "Je n'ai pas peur d'une islamisation. On doit cependant avoir le contrôle sur les entrées. Or aujourd'hui, en Allemagne, on ne sait rien alors que ça va coûter des milliards".

La religion et l'idéologie politique

Le modèle d'intégration allemand est souvent vanté, notamment en regard de la communauté turque. Ne peut-il pas fonctionner avec les nouveaux arrivants? Frank A. Meyer se montre méfiant: "Les citoyens turcs vivent dans le pays sans que la religion ne soit sur le devant de la scène. Pour 70% d'entre eux, ils se sont émancipés de cette religion totalitaire."

Totalitaire, vraiment? "Oui, la religion islamique, c’est une idéologie politique. Il n'y a pas eu cette modernisation où l'on dit 'la religion, c'est la religion et la vie démocratique, la vie dans une société libre'. Et là où la religion devient politique, on a un problème", conclut l'éditorialiste.

kg

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