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"La victoire des partis nationalistes en Europe est déjà présente"

Des affiches électorales du candidat nationaliste Norbert Hofer. [AFP - Joe Klamar]
Jérôme Jamin, professeur de sciences politique et de philosophie politique / L'invité de la rédaction / 22 min. / le 23 mai 2016
A l'instar de l'Autriche, où Norbert Hofer pourrait remporter l'élection présidentielle, de nombreux pays en Europe voient des partis nationalistes se rapprocher du pouvoir. Pour le spécialiste Jérôme Jamin, ces formations ont déjà gagné.

"Même si Hofer (candidat du FPÖ autrichien) ne remporte pas les élections (ce lundi), c'est tout de même une victoire - très lente mais continue depuis de nombreuses années - en Autriche et dans de nombreux pays en Europe", a expliqué à la RTS le professeur de sciences politiques et de philosophie politique à l'Université de Liège.

Celui-ci souligne la montée en puissance, "dans la quasi totalité des pays de l'Union européenne", des formations situées à l'extrême droite sur l'échiquier politique: "Ce ne sont plus des partis minoritaires que l'on peut facilement exclure du jeu du pouvoir, mais des partis qui sont tous très proches du pouvoir, que ce soit au niveau local, régional ou national."

Et d'expliquer: "C'est un processus qui a commencé au milieu des années 1990, où de nombreux partis tels que le FPÖ (Autriche), le Front national en France, le Parti de la liberté aux Pays-Bas ou la Ligue du Nord en Italie, se rapprochent du pouvoir. Même si ces partis ne remportent pas encore les élections, ce n'est que partie remise, la victoire est déjà là."

"Les partis nationalistes ont adapté leur discours"

Jérôme Jamin observe un changement de discours de la part de ces formations ces 20 dernières années: "Le concept d'extrême droite est très péjoratif (...) En France, par exemple, l'étiquette extrême droite attachée au Front national implique que ce parti est systématiquement exclu de toute forme de négociation".

Les nouvelles générations se sont ainsi distancées de la rhétorique des anciens leaders: "Elles ont été très marquées par le fait qu'elles étaient systématiquement exclues à cause des origines sulfureuses de leur mouvement. D'un discours sur les races, on est passé à un discours sur les cultures, un peu moins agressif".

L'abandon du discours antisémite

Les discours antisémites ont également été abandonnés progressivement: "Le racisme et l'antisémitisme sont électoralement suicidaires. Le Jobbik en Hongrie et le British national party au Royaume-Uni ont d'ailleurs décidé, à l'interne, de laisser tomber la question juive".

Certaines voix nationalistes tiendraient même Israël en modèle face à l'islam: "On trouve à l'extrême droite des gens qui considèrent qu'Israël est le seul pays qui parvient à être dur avec les Arabes. Israël apparaît parfois comme un modèle de ce que devrait être l'Occident aujourd'hui: dur avec les Arabes et dur avec l'islam."

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hend

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