Le Royaume-Uni a rarement aussi mal porté son nom. Le oui au Brexit a profondément fracturé le pays avec, d'un côté, la ville de Londres, l'Ecosse et l'Irlande du Nord ayant plébiscité un maintien dans l'Union européenne (UE), et, de l'autre, le reste de l'Angleterre et le Pays de Galles qui ont choisi de la quitter.
L'échiquier politique n'a pas résisté à l'onde de choc. Les partis travailliste et conservateur traversent chacun une grave crise de confiance avec des annonces de démissions à la chaîne, à commencer par le Premier ministre David Cameron: "Il y a un stress post-Brexit, une sorte de traumatisme. Ceci s'apparente à une crise à la fois économique, mais aussi politique, voire institutionnelle", explique à la RTS Agnès Alexandre-Collier, spécialiste de la politique britannique.
Bataille pour la succession de David Cameron
A droite, on assiste à une véritable guerre fratricide depuis l'annonce de démission, d'ici octobre, de David Cameron. Des cinq candidats, il n'en reste plus que deux, la ministre de l'Intérieur Theresa May et la ministre de l’Energie Andrea Leadsom.
Avec le soutien de 199 députés conservateurs, la première, qui a pourtant milité au côté de Cameron pour le maintien dans l'UE, fait figure de favorite. Quant à la ministre pro-Brexit Andrea Leadsom, elle n'a obtenu que 84 voix.
Mais rien n'est encore joué: "La campagne pour l'élection de leader comporte plusieurs tours. Le dernier est réservé aux adhérents du parti conservateur dont on sait qu'ils sont plus favorables au Brexit et il n'est pas exclu qu'ils se prononcent pour la candidate pro-Brexit", explique Agnès Alexandre-Collier.
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La double trahison de Michael Gove
En lice jusqu'à jeudi dernier, le ministre de la Justice Michael Gove s'était démarqué en lâchant son ami David Cameron dans son combat contre le Brexit pour se ranger du côté de Boris Johnson et de sa campagne "Vote.Leave".
Fin stratège, Michael Gove n'avait pas hésité ensuite à trahir l'ancien maire de Londres Boris Johnson, également un proche, en le devançant pour annoncer sa propre candidature au poste de Premier ministre.
Le parti europhobe UKIP ébranlé
Dans le camp pro-Brexit, le parti europhobe UKIP a également été ébranlé par une démission de taille, puisque son fondateur Nigel Farage a annoncé son départ: "Mon objectif de sortir de l'UE est atteint (...) j'ai accompli ma mission", a-t-il déclaré il y a quelques jours. "Je n'ai jamais été, et n'ai voulu être un politicien de carrière, je pense donc qu'il est juste que je m'écarte de la direction d'UKIP".
Le chef du Labour fragilisé à l'extrême
Les dissensions à droite ne semblent pas profiter à la gauche, elle-même en pleine crise depuis que son leader Jeremy Corbyn a perdu un vote de confiance de son parti le 28 juin. Sur les 172 députés ayant voté, seuls 40 ont apporté leur soutien au dirigeant.
Le autres députés l'accusent de ne pas avoir assez fait campagne pour un maintien dans l'UE. Certains membres du Labour estiment qu'avec lui le parti d'opposition n'a aucune chance de reconquérir un jour le pouvoir. Jeremy Corbyn a lui indiqué qu'il ne comptait pas démissionner.
>> Lire : Le chef des travaillistes britanniques perd la confiance de son parti
Vers une sortie de l'Ecosse du Royaume-Uni?
Toujours dans le camp du "Remain", qui voulait rester dans l'UE, la Première ministre écossaise Nicola Sturgeon, europhile et favorable à la sortie de son pays du Royaume-Uni, a d'ores et déjà annoncé que son gouvernement allait présenter une loi autorisant la tenue d'un second référendum sur l'indépendance de l'Ecosse.
Elle a précisé qu'elle souhaitait débuter immédiatement des discussions sur la place de son pays au sein de l'Union européenne. Pour rappel, l'Ecosse, qui compte cinq millions d'habitants, s'est prononcée à 62% pour le maintien dans l'UE.
La reine appelle au calme
Au milieu de tout ce marasme, la reine Elisabeth II, qui doit faire preuve d'une stricte impartialité en politique, a prôné la réflexion et le calme lors d'un discours devant le Parlement écossais début juillet.
"Nous vivons et travaillons dans un monde de plus en plus complexe et contraignant où les événements peuvent se produire à une vitesse remarquable - et c'est d'ailleurs le cas - et conserver la capacité de rester calme et réfléchi peut être difficile", a-t-elle dit sans mentionner le Brexit directement.
Mathieu Henderson