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Theresa May, cette timide europhile qui devra concrétiser le Brexit

Theresa May aura fort à faire pour négocier au mieux le Brexit. [Dylan Martinez]
Theresa May aura fort à faire pour négocier au mieux le Brexit. - [Dylan Martinez]
Mercredi, la conservatrice Theresa May est devenue Première ministre du Royaume-Uni. Décrite comme une nouvelle Margaret Thatcher, celle qui a fait campagne pour le "Remain" aura la tâche de négocier avec l'Union européenne.

C'est donc elle. Après le retrait surprise de son ultime adversaire Andrea Leadsom dans la bataille pour la tête de Parti conservateur, Theresa May est devenue Première ministre mercredi.

Secrétaire d'Etat à l'Intérieur depuis 2010, la voici propulsée à la tête des Tories et du pays. Les Tories, ce sont les 150'000 membres du Parti conservateur qui auraient dû départager les deux candidates le 9 septembre prochain. Il n'en sera rien: la course à la succession de David Cameron s'arrête de manière aussi précipitée qu'inattendue.

"Je suis extrêmement honorée". C'est par ces mots que cette diplômée en géographie de l'université d'Oxford a réagi à l'annonce de la défection de sa rivale. Quatre mots, tout en retenue, comme pour marquer son humilité face à la mission qui l'attend.

Europhile par intérêt

C'est qu'en s'installant au 10 Downing Street, cette fille de pasteur anglican laissera à coup sûr une marque indélébile dans la longue histoire du Royaume-Uni. Pas tant parce qu'elle n'est que la seconde femme à accéder au poste de Première ministre après Margaret Thatcher. Mais bien parce qu'elle sera au front - tempétueux - pour négocier la dangereuse sortie britannique de l'Union européenne, tout en évitant la désintégration d'un pays de plus en plus fragmenté.

Et pas question de revenir sur la volonté du peuple. "Le Brexit signifie le Brexit", a-t-elle martelé lundi, comme pour faire oublier son implication plus que timide dans la campagne du "Remain", au nom de sa loyauté à l'égard de David Cameron.

Son soutien aux europhiles ne l'a pas empêchée de continuer à prôner une sévère limitation de l'immigration. Une position, sur le thème favori des pro-Brexit, qui l'a rendue crédible dans les deux camps. Femme de poigne, Theresa May a d'ailleurs souvent fait preuve de dureté à ce sujet. Fin 2015, elle prononçait notamment un discours remarqué, dans lequel elle dénonçait "l'immigration massive qui menace" la Grande-Bretagne, rapporte The Guardian.

Les conservateurs, "parti des méchants"

Engagée en politique dès 1986 lorsqu'elle élue conseillère du cossu district londonien de Merton, la quasi-sexagénaire - elle a 59 ans - doit attendre 1997 pour être élue à la Chambre des Communes après deux échecs.

Son premier coup d'éclat politique, elle le fait en 2002, lors d'un discours où elle qualifie les Tories, alors marqués très à droite, de "parti des méchants" ("nasty party"). Cette critique lui vaudra d'être rejetée par une importante frange de l'électorat conservateur.

Malgré une solide expérience, la carrière de Theresa May ne décolle vraiment qu'en 2010. Précieux soutien de David Cameron dans sa conquête du parti en 2005, elle est enfin récompensée lorsque celui-ci devient chef du gouvernement. Elle est alors nommée au Bureau de l'Intérieur, poste qu'elle conserve jusqu'à aujourd'hui.

Plus centriste que Margaret Thatcher

"La nouvelle Margaret Thatcher": il n'aura pas fallu attendre que Theresa May soit en position de gouverner la Grande-Bretagne pour que les observateurs osent la comparaison. Une comparaison que cette dernière n'a jamais esquivée.

Pourtant, beaucoup plus centriste que ne l'ait jamais été la Dame de fer, elle promet "un pays qui fonctionne pour tout le monde" avec moins d'inégalités. Lundi, celle qui succédera de David Cameron a encore martelé qu'elle s'attacherait à sévir contre la fraude fiscale.

Opiniâtre et exigeante, elle s'est forgée, à l'image de son modèle, une réputation de "femme drôlement difficile" au Bureau du Travail, comme l'expliquait récemment sur la BBC l'ancien ministre conservateur Kenneth Clarke.

Si la Dame de fer fut à la tête d'un gouvernement de rupture, Theresa May promet de consommer, avec le moins de heurts possible, le divorce avec l'Union européenne. Y parviendra-t-elle? "Les deux tiers du groupe parlementaire conservateur sont derrière elle. Elle est idéalement placée pour mettre en oeuvre le Brexit, dans les meilleures conditions possibles pour les Britanniques", affirmait lundi Andrea Leadsom.

Kevin Gertsch

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