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"L'équipe de Donald Trump mène une campagne de boîtes aux lettres"

L'historien Pap Ndiaye. [AFP - Mehdi Fedouach]
Pap Ndiaye, historien des Etats-Unis / L'invité de la rédaction / 20 min. / le 22 juillet 2016
Donald Trump a reçu jeudi l'investiture d'un Parti républicain divisé. Mais son organisation "extrêmement légère" lui laisse peu de chances de l'emporter, selon l'historien des Etats-Unis Pap Ndiaye.

"Il serait extraordinaire que Donald Trump l'emporte le 8 novembre avec autant d'amateurisme", a estimé vendredi dans le Journal du matin de la RTS l'historien des Etats-Unis à Sciences Po Paris Pap Ndiaye.

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Il énumère notamment l'équipe "réduite" du magnat de l'immobilier, qui mène depuis un an une "campagne de boîtes à lettres", mais aussi le fait que le New Yorkais dispose de peu de militants dans les différents Etats. Pour Pap Ndiaye, cette organisation "extrêmement légère" se traduit aussi par des affaires comme celle du plagiat dans le discours de Melania Trump mardi à Cleveland.

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Les républicains divisés

Il serait extraordinaire que Donald Trump l'emporte le 8 novembre avec autant d'amateurisme

Pap Ndiaye, historien des Etats-Unis à Sciences Po Paris

Pourtant, Donald Trump, novice en politique, a glané les voix de 14 millions d'électeurs républicains, un record. "Cela ne signifie pourtant pas qu'il sera soutenu par la majorité de la population américaine", estime l'historien. Pour lui, la campagne de Trump révèle aussi le fossé qui s'est créé entre l'élite et la base républicaine: le magnat de l'immobilier a autant fustigé son adversaire démocrate Hillary Clinton que l'establishment républicain (sénateurs, représentants, etc.).

"Minimum syndical"

"Le parti républicain s'aligne derrière Donald Trump en maugréant, mais ils préfèrent cela qu'une division", estime Pap Ndiaye. La convention républicaine de Cleveland en était un exemple frappant, où des figures de proue comme Paul Ryan ou Ted Cruz ont assuré un "minimum syndical" en appelant du bout des lèvres à soutenir le candidat.

L'absence remarquée de grands noms du parti comme la famille Bush, de Mitt Romney ou encore de John McCain a encore souligné le problème.

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Les yeux rivés sur 2020

"Cleveland a permis de préparer l'élection de 2020. En appelant à voter Trump, on soutient l'unité du parti. Mais on se projette déjà dans l'avenir", analyse Pap Ndiaye, selon qui "il faudrait un renversement très spectaculaire pour qu'il soit élu". Les républicains espèreraient-ils une défaite de leur candidat? Pour l'historien, il est clair que le parti a déjà les yeux rivés sur sa réorganisation "une fois qu'il sera débarrassés du trublion".

Certains placent toutefois leurs espoirs en Trump car son élection créerait de nombreux postes à repourvoir pour des républicains dans l'administration, sans pour autant soutenir son programme. "D'ailleurs, a-t-il un programme?", a ironisé l'historien.

Et même en cas de troisième mandat consécutif pour les démocrates, le Parti républicain table également sur les élections législatives, qui auront lieu en même temps que la présidentielle, afin de garder une partie des rênes du pouvoir, estime Pap Ndiaye.

Clinton contre Trump, un duel d'impopulaires

Pourtant, l'historien souligne toutefois qu'Hillary Clinton est "la candidate démocrate la plus impopulaire de l'histoire". Et que le seul qui la dépasse en impopularité est... Donald Trump.

"Jamais les politiques américains n'ont été aussi décriés qu'aujourd'hui", ajoute Pap Ndiaye, qui parle d'un "binôme singulier dans l'histoire politique américaine", soulignant une forme de déconnexion avec les préoccupations des citoyens.

jvia

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