Le politologue a relevé jeudi dans le Journal du matin la complexité de la situation dans la deuxième ville d'Irak, au sujet de laquelle il est difficile d'obtenir des informations. A commencer par le nombre de combattants djihadistes sur place. "Le fait qu'une ville qui avait deux millions d'habitants en juin 2014 soit tenue par 4000 à 7000 soldats du groupe Etat islamique ne résiste pas à l'analyse."
Selon Hasni Abidi, les djihadistes bénéficient à Mossoul de nombreux soutiens, en partie grâce à leur ancrage local. "Des membres de l'état-major de l'EI sont des anciens des services de renseignement de Saddam Hussein, des ex d'Al-Qaïda en Irak; contrairement à ce qui se passe en Syrie, le gros du bataillon de l'EI est local, c'est ce qui fait sa force."
Ce qui fait la force du groupe EI à Mossoul, c'est son ancrage local
Le politologue a rappelé aussi dans quelles circonstances la ville de Mossoul est tombée en mains islamistes: "La population a accepté la présence de l'EI par défaut. Car lui seul avait un semblant d'autorité après la débandade du système irakien. Quand un Etat est affaibli ou n'existe plus, il n'y a plus d'appartenance nationale, mais ce sont les liens régionaux, ethniques, tribaux ou confessionnels qui émergent."
Repli sur Raqqa?
Hasni Abidi souligne ainsi l'importance de Mossoul pour le groupe EI qui perd actuellement des territoires, cède du terrain. "La perte de sa capitale signifierait la chute du projet de l'EI, fondé sur la sanctuarisation d'un territoire, contrairement à ce que prônait Al-Qaïda avec son 'djihad global et sans frontières'."
Quant à savoir si l'EI a pensé à une capitale de repli, Raqqa par exemple, en cas de perte de Mossoul, le chercheur ne l'exclut pas. Quoi qu'il en soit, et sur ce point Hasni Abidi se dit d'accord avec la position française notamment, "il ne faut pas que la guerre de Mossoul nous détourne de la gravité de la situation à Raqqa, mais aussi d'une autre ville martyre, Alep."
"La Russie ne sait que frapper"
Evoquant la situation en Syrie, Hasni Abidi relève le rôle joué par la Russie: "Après l'échec de sa résolution à l'ONU, Moscou n'a aucune stratégie pour la Syrie. La Russie ne sait que frapper. Elle sait qu'elle ne peut compter ni sur le régime de Bachar al-Assad ni sur les forces sur le terrain pour libérer Alep. Elle a une stratégie, mais pour elle."
"Si François Hollande ou Barack Obama parlent de crimes de guerre commis en Syrie, c'est qu'il y a des criminels de guerre. Il faut les identifier", insiste Hasni Abidi qui vise notamment la Russie. Et de s'étonner: "Comment peut-on aller au bout de cette logique suicidaire? Vous avez identifié un acteur important comme responsable de crimes de guerre, et dans le même temps, vous continuez dans une logique de négociations menée depuis plusieurs années sans résultat positif, en particulier pour les populations civiles..."
gax