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Grands électeurs ou swing states, ce qu'il faut savoir pour comprendre la présidentielle américaine

Présidentielle américaine: le fonctionnement du scrutin
Présidentielle américaine: le fonctionnement du scrutin / 19h30 / 1 min. / le 8 novembre 2016
Qui sont les grands électeurs, combien en faut-il pour être élu, pourquoi les swing states sont-ils déterminants, quand le président est-il officiellement nommé? Aide-mémoire pour mieux comprendre la présidentielle américaine du 8 novembre.

Le mode de scrutin

Le 8 novembre, les citoyens américains élisent leur président au suffrage universel indirect, ce qui signifie qu'ils choisissent des grands électeurs qui eux éliront le chef de l'Etat le 12 décembre. Concrètement, ils vont cocher le nom de leur candidat sur leur bulletin de vote, mais ils éliront dans les faits des grands électeurs représentant leur parti favori.

Selon le mécanisme électoral, le scrutin se joue non pas au niveau national, mais au niveau des 50 Etats américains et de l'Etat fédéral de Washington, qui élisent chacun des grands électeurs, 538 au total.

La Constitution américaine fixe quatre critères pour être éligible à la présidence: avoir au moins 35 ans, être né aux Etats-Unis, être citoyen américain, résider aux Etats-Unis depuis au moins 14 ans. Un président peut être élu pour deux mandats au maximum.

Le jour de l'élection a traditionnellement lieu le premier mardi de novembre. Le mardi a été choisi en 1848, quand il fallait plus de temps pour rejoindre les villes depuis la campagne. Comme ils ne pouvaient pas partir un dimanche, jour de culte et de messe, les électeurs quittaient leurs village le lundi. Et ils devaient être de retour le mercredi, jour de marché. Le mardi a donc semblé judicieux.

Les candidats en lice

On imagine souvent que les Américains doivent choisir entre deux candidats, un républicain et un démocrate, selon un système de strict bipartisme. Mais d'autres prétendants sont également en lice.

Concluant une campagne durant plus d'une année, avec primaires, caucus et conventions, les démocrates ont choisi leur candidate, Hillary Clinton, et les républicains le leur, Donald Trump. Tous deux ont désigné des co-listiers qui deviendront vice-présidents en cas de victoire, Tim Kaine pour la première et Mike Pence pour le second.

>> Le portrait croisé des deux candidats : Hillary Clinton et Donald Trump, parcours et programmes en face à face

Mais des partis minoritaires ont aussi lancé leurs poulains dans la course même s'ils n'ont aucune chance d'être élus. Principal parti minoritaire, le Parti libertarien a choisi l'ancien gouverneur du Nouveau-Mexique Gary Johnson, alors que le Parti écologiste a opté pour Jill Stein, déjà candidate en 2012.

A noter aussi la candidature de l'indépendant Evan McCullin qui a une petite chance de remporter l'Etat de l'Utah, privant ainsi Donald Trump de six grands électeurs dans cet Etat.

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L'élection des grands électeurs

Le collège électoral américain est composé de 538 grands électeurs, ce qui correspond au nombre d'élus au Congrès (435 à la Chambre des représentants et 100 du Sénat), auxquels s'ajoutent trois grands électeurs pour le district fédéral de Washington. Pour remporter la présidentielle, un candidat doit ainsi arriver à une majorité de 270 grands électeurs.

Chaque Etat se voit attribuer un nombre de grands électeurs qui dépend de sa population. Le candidat qui arrive en tête du scrutin dans un Etat y rafle tous les grands électeurs, à deux exceptions près: le Maine et le Nebraska, où le système est proportionnel.

Les Etats très peuplés sont donc plus convoités car ils rapportent davantage de grands électeurs. La Californie et ses 39 millions d'habitants offrent ainsi 55 grands électeurs au gagnant. Suivent le Texas (38), la Floride (29) et l'Etat de New York (29). A l'autre extrémité, remporter le Montana (1 million d'habitants), le Delaware ou le Wyoming ne rapporte que 3 grands électeurs.

Mais qui sont ces grands électeurs? La Constitution américaine ne précise pas le mode de désignation des grands électeurs et chaque Etat a son propre système. Ce sont généralement des personnalités très variées qui sont sélectionnées en remerciement de leurs services pour le parti ou un candidat.

Et, au final, si les sondages principaux d'avant scrutin font état d'une avance globale pour l'un ou l'autre des candidats, le vote national n'est pas vraiment important. Car un candidat peut obtenir plus de voix dans l'absolu au niveau fédéral et ne pas arriver en tête du nombre de grands électeurs (c'est arrivé à Al Gore en 2000 quand il a perdu contre George W.Bush). Et le nombre total d'Etats remportés n'est également pas déterminant.

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Les swing states

Lors du vote, certains Etats prennent invariablement plus d'importance que d'autres.

En effet, certains Etats votent toujours ou presque pour un camp ou un autre et on peut déjà plus ou moins prédire où iront ses grands électeurs. Ainsi, le Dakota du Sud a toujours voté républicain depuis 1968 et treize Etats ont systématiquement voté républicain depuis 1992. A l'inverse, le Minnesota et Washington D.C. sont invariablement démocrates. Et, depuis 1992, 18 Etats ont systématiquement voté démocrate.

Ainsi, si cette logique certes incertaine est respectée, Hillary Clinton totaliserait déjà 242 grands électeurs contre seulement 102 à Donald Trump.

Plus que ces Etats presque déjà joués, une dizaine d'Etats jouissent d'une attention toute particulière, car le résultat y est très incertain et pourrait faire basculer le scrutin. Ce sont les swing states (ou Etats-pivots, Etats-clés). Les candidats y font campagne plus souvent qu'ailleurs.

Plus le nombre de grands électeurs y est important, plus ces Etats sont déterminants, mais les candidats ne négligent pas les plus petits car le vote pourrait basculer pour quelques grands électeurs.

Parmi le swings states de première importance figure en premier lieu la Floride et ses 29 grands électeurs. Suivent l'Ohio (18), la Georgie (16), la Caroline du Nord (15), la Virginie (13), l'Arizona (11). Le Colorado (9), l'Iowa (6), le Nevada (6) et le New Hampshire (4) font aussi partie des Etats qualifiés de pivots. A noter que les observateurs portent un regard attentif sur l'Ohio, qui a toujours voté pour le candidat élu depuis 1960, et sur le Nevada qui ne s'est trompé qu'une fois depuis 1912.

Le vote des grands électeurs

Si le nom du président est connu dès le vote du 8 novembre, dans les faits ce n'est que le 12 décembre qu'il est élu. C'est à cette date que les grands électeurs se réunissent dans la capitale de leur Etat respectif et élisent le président et le vice-président. Ils forment ce qui est appelé un collège électoral, mais les grands électeurs ne se rassemblent pas physiquement à l'échelle nationale.

Ce vote n'est toutefois qu'une formalité. Vingt-quatre Etats ont des textes qui obligent les grands électeurs à suivre le vote populaire et à choisir le candidat sorti des urnes. Concernant les autres Etats, les grands électeurs étant désigné par les partis, ils font généralement preuve de loyauté envers leur candidat.

Mais rien ne les oblige et des cas de "trahison" ont été constatés, certes très rarement. En 2000, une grande électrice avait choisi de ne pas voter plutôt que de voter pour le démocrate Al Gore. En 2004, un grand électeur avait voté par erreur pour John Edwards, candidat à la vice-présidence, au lieu de John Kerry, candidat à la présidence.

L'investiture

Le dépouillement du vote des grands électeurs a lieu dans le courant du mois de décembre et l'investiture du 45e président des Etats-Unis a lieu le 20 janvier. Durant cette période de transition, le successeur de Barack Obama va nommer son cabinet, préparer son gouvernement et gérer le personnel de la Maison Blanche.

Le 20 janvier, lors de l'Inauguration Day, le nouvel élu prononce son discours d'investiture devant le Capitole à Washington et prête serment. Sa déclaration solennelle est prévue dans la Constitution: "Je jure (ou affirme) solennellement que j'exécuterai loyalement la charge de président des États-Unis et que du mieux de mes capacités, je préserverai, protégerai et défendrai la Constitution des États-Unis."

Frédéric Boillat

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