C'était le 13 novembre 2015. Pour la première fois, la France était frappée par des attentats simultanés: neuf hommes répartis en trois commandos avaient provoqué la mort de 130 personnes, dont 90 au Bataclan. Au Stade de France, trois kamikazes avaient fait exploser leur ceinture.
En hommage aux victimes, une minute de silence a été observée vendredi soir à ce même stade, avant le coup d'envoi du match France - Suède de qualifications pour le Mondial - 2018, sous haute sécurité.
D'autres événements sont attendus ce week-end, comme la réouverture de la salle du Bataclan avec un concert de Sting. Mais la sobriété sera de mise.
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Nous avons changé d'époque et, à bien des égards, nous avons aussi changé de monde
"Ce qui s'est produit nous a changés, transformés même", avait déclaré le président français François Hollande lors de ses voeux du 31 décembre 2015. Une certaine insouciance a disparu chez les Français et les mesures sécuritaires se sont multipliées. L'attentat de Nice du 14 juillet dernier a encore renforcé cette situation.
"Nous avons changé d'époque, et à bien des égards, nous avons aussi changé de monde", a expliqué lundi dernier le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve."Nous sommes désormais entrés dans une période nouvelle de notre histoire, marquée durablement par la menace djihadiste."
L'Etat d'urgence et les craintes de dérives
Prolongé de 6 mois jusqu'au 26 janvier 2017 suite à l'attentat de Nice, l'état d'urgence a permis d'effectuer plus de 4000 perquisitions administratives et de multiplier les gardes à vue, selon le dernier bilan du ministère de l'Intérieur.
Une vingtaine de mosquées ont été également fermées pour leurs prêches radicaux et 430 interdictions de sortie du territoire (IST) ont été signées à l'encontre de Français soupçonnés de vouloir rejoindre les djihadistes au Moyen-Orient. Parallèlement, des centaines de personnes ont été assignées à résidence. Nonante-cinq le sont toujours.
Des responsables politiques, des syndicalistes et des défenseurs des droits de l'Homme se sont inquiétés de possibles dérives de ces mesures d'exception, sans lien avec la lutte contre le terrorisme, et ont mis en doute leur efficacité.
Dans un rapport, la Ligue internationale des droits de l'homme (FIDH) estime que l'application de l'état d'urgence en France "a entraîné de nombreuses violations des droits humains".
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Police partout, innocence perdue
Dans ces conditions, difficile d'oublier la menace: avec l'état d'urgence, le renforcement du plan Vigipirate et l'opération Sentinelle, ce sont quelque 100'000 policiers, gendarmes, militaires et réservistes qui sont déployés en France.
L'ambiance générale a changé et des gestes qui auraient pu paraître incongrus il y a peu sont désormais devenus quotidiens: à l'entrée des magasins, cinémas, stades ou musées, passer au détecteur de métaux, ouvrir son manteau. "Quelques années en arrière, on m'aurait dit: 'Ouvre ton sac, je vais te fouiller', cela m'aurait choquée. Là, c'est moi qui l'ouvre naturellement", reconnaît une Parisienne.
Les touristes se font plus rares
Suite aux attentats, Paris a vu les touristes étrangers déserter et multiplie les efforts pour les faire revenir. En un an, Paris et sa région ont perdu près de deux millions de visiteurs. Le musée du Louvre, le plus fréquenté du monde, a vu sa fréquentation baisser de 20%.
Dans la seule région parisienne, "le manque à gagner est estimé à près d'un milliard d'euros" et pourrait atteindre 1,5 milliard d'ici la fin de l'année, déplore Frédéric Valletoux, président du Comité régional du tourisme. "L'impact est durable et complètement inédit par son importance", avertit-il.
Hôtels et restaurants tablaient sur l'Euro-2016 de football cet été pour repartir. Mais l'attentat de Nice a douché les espoirs.
Le tourisme est essentiel pour la France, destination la plus prisée au monde et représente 9% du produit intérieur brut. L'objectif gouvernemental est d'accueillir 100 millions de visiteurs internationaux en 2020, contre 85 millions en 2015.
Mais depuis le début de l'année, les arrivées internationales ont chuté de près de 8%. Les Japonais ont été les plus nombreux à se détourner (-39%), suivis par les Chinois (-23%), les Allemands (-11%) et les Américains (-4%).
mre avec agences