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Le terroriste d'Istanbul, reflet de la riche filière djihadiste d'Asie centrale

De nombreux djihadistes ouzbeks ont combattu en Afghanistan avant de rejoindre la Syrie. [AFP - Jean-Claude Chapon]
Le terroriste d'Istanbul, reflet de la riche filière djihadiste d'Asie centrale / Tout un monde / 3 min. / le 6 février 2017
Identifié comme un djihadiste ouzbek, l'auteur présumé de l'attaque terroriste de Nouvel-An à Istanbul aurait combattu en Afghanistan puis en Syrie. Son parcours est celui de milliers d'autres mercenaires d'Asie centrale.

Selon les autorités turques qui l'ont interpellé après la fusillade dans une discothèque dans la nuit de Nouvel-An, l'homme a combattu en Afghanistan avant de rejoindre la Syrie. Il serait polyglotte et très bien entraîné. Le parcours de ce djihadiste, en apparence décousu, est en réalité assez banal. Il ressemble à celui de milliers de combattants ouzbeks, tadjiks ou kirghizes, qui gonflent les rangs du groupe Etat islamique (EI) et seraient parmi les mieux payés. Ces mercenaires sont essentiels à l'organisation terroriste en raison de leur profil bien particulier.

Des combattants modèles de par leur formation

Jusqu'au début des années 2000, les techniques militaires étaient toujours enseignées dans les écoles des anciennes républiques soviétiques où le service militaire est très astreignant. C'est ce qui a fait de ces combattants des djihadistes modèles.

"Ces gens (…) étaient techniquement très bien préparés pour participer aux combats ou préparer des bombes" explique Ahmed Rahmanov, chercheur associé au Centre des études de sécurité régionales de la capitale ouzbèke, Tachkent. "Ce sont d'anciens vétérans qui savent comment affronter les armes modernes de l'Occident. Tous ces facteurs font que les Ouzbeks et les ressortissants d'Asie centrale en général, sont très appréciés chez Daech et les filiales d'Al Qaïda en Syrie."

>> Lire : 400 membres présumés de l'EI arrêtés dans une série de raids en Turquie

Des guerriers providentiels selon la mythologie

La mythologie islamiste est également un facteur d'attrait pour ces combattants, puisque leur région d'origine - appelée le Khorasan - revêt une importance particulière dans les textes sacrés du groupe Etat islamique. Selon la légende, c'est de là que viendraient les guerriers providentiels sensés provoquer la victoire.

Mais il n'y a pas que des vétérans d'Afghanistan parmi les combattants d'Asie centrale. On y trouve aussi des hommes plus jeunes, des migrants économiques  recrutés à l'étranger - principalement en Russie ou en Turquie. Isolés, marginalisés, souvent victimes de discriminations, ils sont des proies faciles pour les recruteurs de l'Etat islamique.

"Le centre du djihad international a été déplacé au Moyen-Orient (…) Les nouveaux recrutés ne voulaient pas aller en Afghanistan, parce que la propagande ou les médias parlaient plus de la Syrie et c'était plus facile d'accès (…), poursuit Ahmed Rahmanov. "Tous ces facteurs font qu'ils se sont précipités vers la Syrie."

Au plus fort de la puissance de Daesh, les djihadistes d'Asie centrale étaient plusieurs milliers. Certains estiment même qu'ils représentaient plus de la moitié des effectifs.

Les conséquences du déclin des djihadistes en Syrie

Mais la tendance s'inverse, désormais: les défaites militaires en Syrie poussent les mercenaires d'Asie centrale à retourner dans des terrains plus sûrs. Ils retournent en Afghanistan ou continuent le djihad depuis l'Asie centrale. D'autres, comme c'est le cas du terroriste d'Istanbul, se replient vers la Turquie où ils jouissent d'une très grande liberté de mouvement.

Anouk Henry/oang

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