Il s'agit du baptême du feu pour le très discret chef de la diplomatie américaine, qui accueille 67 autres pays de la "coalition mondiale" contre le groupe Etat islamique (EI). Certains de ses membres s'interrogent sur la stratégie de Donald Trump, qui ne cesse de marteler qu'il va "démolir" les djihadistes.
Le président américain a été élu sur un programme de politique étrangère isolationniste et veut doper le budget de la défense de 10%, contre une baisse de 28% des ressources de la diplomatie. Dans ce contexte, il avait demandé au Pentagone de lui fournir un plan complet visant à "éradiquer de la planète cet ennemi abominable", le groupe EI.
Battant le rappel, son ministre des Affaires étrangères Rex Tillerson a réaffirmé que "notre grand point commun (...) est l'engagement à faire tomber cette force mondiale du mal". Et il a promis que le chef de l'EI Abou Bakr al-Baghdadi serait bientôt tué, comme l'avait été en mai 2011 le fondateur d'Al-Qaïda Oussama Ben Laden.
Zones de sécurité
Le secrétaire d'Etat américain a par ailleurs annoncé que les Etats-Unis allaient instaurer des "zones temporaires de sécurité" destinées à permettre aux réfugiés de regagner leur domicile. Il n'a pas précisé où ces zones de sécurité seraient délimitées.
Rex Tillerson a déclaré aux délégués présents que le flux de combattants étrangers se rendant en Irak ou en Syrie avait diminué de 90% au cours de l'année écoulée. "C'est de plus en plus difficile pour les terroristes de s'y rendre et plus difficile pour eux de venir nous menacer chez nous", a-t-il affirmé.
Cette dixième réunion de la coalition est assombrie par la mort d'au moins 33 civils près de Raqqa, capitale de facto de l'EI, dans un raid présumé de cette coalition sur une école servant de centre de déplacés.
>> Lire : Un raid de la coalition sur un centre de déplacés fait 33 morts en Syrie
Désaccord sur l'assaut final
La coalition est réunie au grand complet, mais des désaccords se font jour entre certains pays sur la stratégie à suivre, tant à Raqqa qu'à Mossoul, le bastion de l'EI en Irak que les forces locales tentent de reprendre.
En Syrie, Raqqa est désormais quasiment isolée du monde, les principales voies de communications ayant été coupées par les forces kurdo-arabes alliées de la coalition. Les militaires américains envisagent que les djihadistes ne contrôlent bientôt plus qu'un ultime bastion dans la vallée de l'Euphrate, Deir Ezzor (est).
Mais les Etats-Unis et la Turquie s'opposent sur la force qui doit conduire l'assaut final sur cette ville.
La Turquie ne veut pas que les milices kurdes YPG, qu'elle considère comme un groupe "terroriste", y participent. Or, ces milices sont le fer de lance de la coalition arabo-kurde des Forces démocratiques syriennes (FDS), que le Pentagone juge être les plus à même de reprendre Raqa rapidement.
Quel statut des territoires libérés?
En outre, la coalition doit répondre à la question du futur statut des territoires libérés en Syrie: autonomie ou retour dans le giron du régime.
Côté français, une source diplomatique a dit "attendre des réponses" de Washington sur "comment et avec qui" Raqqa sera reconquise.
Selon Washington, les opérations de la coalition - notamment plus de 19'000 frappes - ont permis de "libérer" 62% des territoires en Irak et 30% en Syrie que l'EI détenait à son apogée en 2014.
Finances et reconstruction
Le secrétaire d'Etat américain Rex Tillerson a prié les membres de la coalition de tenir leurs engagements financiers pour aider à sécuriser et reconstruire les zones d'où les combattants de l'EI ont été chassés. Les Etats-Unis apporteront leur écot, mais les conditions requièrent que leurs alliés rehaussent leur contribution militaire et financière pour vaincre l'EI, a-t-il dit.
Les pays de la coalition ont dit espérer collecter environ deux milliards de dollars pour l'aide humanitaire, la stabilisation de la situation et les opérations de déminage en Irak et en Syrie cette année.
Le sénateur Lindsay Graham a déclaré, à la suite d'un entretien avec le Premier ministre irakien Haider al Abadi, que celui-ci lui avait confié que la reconstruction de la province d'Anbar et de la ville de Mossoul, coûterait environ 50 milliards de dollars.