Yannick Jadot redoute "l'alliance des jeunes qui veulent faire de la vieille politique"
Yannick Jadot, qui avait soutenu le socialiste Benoît Hamon lors du premier tour de la présidentielle, voit dans l'élection d'Emmanuel Macron à la présidence de la République française "la perspective d'un renouvellement", indique-t-il mardi dans le Journal du matin sur RTS La Première.
"S'il arrive à faire exploser le Parti socialiste (gauche) et les Républicains (droite) en France, ça ne me gêne pas", souligne l'écologiste français. "Je ne suis pas pour garder les vieilles boutiques qui n'existent aujourd'hui que sur l'histoire et le partage du gâteau", poursuit-il.
"Le fantasme de la Ve République"
"Il faut être très content d'avoir un président de la République jeune, qui veut casser les codes. Mais il ne faudrait pas que ce soit l'alliance des jeunes qui veulent faire de la vieille politique", relativise toutefois Yannick Jadot.
"Depuis dimanche soir, on rétablit le fantasme de la Ve République, avec des images extrêmement solennelles", juge-t-il. "Les Français aiment ces images-là, mais cela ne supprime pas un seul chômeur, ça ne règle pas la question du dérèglement climatique ou du renouvellement des institutions."
"C'est plutôt de la démocratie participative dont on a besoin. C'est de la décentralisation, c'est plus d'Europe, c'est plus de dialogue social", assène Yannick Jadot.
"Pas un vote d'adhésion à Emmanuel Macron"
Selon l'eurodéputé français, l'élection d'Emmanuel Macron n'est pas un vote d'adhésion au projet de l'ancien ministre de l'Economie, dans lequel l'écologie n'était qu'"une sorte de supplément d'âme, un chapitre à côté de tous les autres".
Pour Yannick Jadot, plusieurs points du programme du nouveau président sont d'ailleurs en contradiction totale avec les positions des écologistes. Il cite notamment la défense du libre-échange, du nucléaire comme "énergie d'avenir" ou du "diesel propre".
Pour un ministère de l'Environnement "transversal"
Alors que la composition du premier gouvernement de l'ère Macron est attendue mercredi, Yannick Jadot plaide en faveur de la création d'un vaste ministère de l'Environnement qui aurait "une compétence transversale".
Le ministre en charge de ces questions devrait selon lui être "une sorte de vice-Premier ministre", avec une capacité d'intervenir dans tous les domaines: politiques industrielle, énergétique, agricole, culturelle, d'éducation, de jeunesse, d'aménagement du territoire.
"L'environnement concerne tous les sujets. Si c'est simplement un autre ministère à part, vous n'arrivez le plus souvent pas à intervenir sur l'ensemble des politiques, et donc vous êtes relativement inefficace", conclut Yannick Jadot.
Didier Kottelat
"Depuis dimanche soir, on rétablit par l'image le fantasme de la Ve République, des images extrêmement solennelles. La fonction de président est une fonction solennelle, donc il ne s'agit pas de la banaliser. (...) C'est plutôt de la démocratie participative dont on a besoin. C'est de la décentralisation, c'est plus d'Europe, c'est plus de dialogue social. Là, la France a besoin de se rassurer, avec des images fortes. Les images du jour de l'élection, devant la pyramide du Louvre, l'homme esseulé, c'est assez bonapartiste. Ne nous cachons pas la vérité: les Français aiment ces images-là, mais cela ne supprime pas un seul chômeur, ça ne règle pas la question du dérèglement climatique ou du renouvellement des institutions dont on a tellement besoin.
"Si la politique, c'est se ranger derrière celui que les sondages donnent vainqueur, il n'y a plus de conviction, c'est la grande confusion. Regardez l'alliance politique qu'EM arrive à construire: il y a à la fois la perspective d'un renouvellement - et je souhaite qu'il casse les codes. Finalement, qu'il arrive à faire exploser le Parti socialiste comme Les Républicains en France, ça ne me gêne pas. Je ne suis pas pour garder les vieilles boutiques qui n'existent aujourd'hui que sur l'histoire et le partage du gâteau. Donc qu'il casse des codes, qu'il renouvelle la politique, j'espère qu'il va mener ça a bien. Mais dans son programme, l'écologie était une sorte de supplément d'âme, c'était un chapitre à côté de tous les autres. Il défend le libre-échange. On sait à quel point le libre-échange est aujourd'hui est incompatible avec les objectifs en matière de climat. Quand il a dit que le nucléaire était une énergie d'avenir, quand il a dit que le diesel propre n'était pas un problème, tout ça n'est pas mon programme."
"Je crois que les Françaises et les Français sont de plus en plus sensibilisés aux questions écologiques. On le voit dans la presse française - et je sais que c'est la même chose en Suisse: tous les jours, on parle de questions de santé, tous les jours on parle des impacts des pollutions sur notre santé, que ce soit la pollution de l'air, que ce soit l'alimentation, que ce soit dans les conditions de travail. Tout ça fait aujourd'hui partie de nos préoccupations et des préoccupations des Français et des Françaises. Là où sûrement nous avons échoué - et nous devons nous remettre en cause -, c'est qu'on n'a pas su suffisamment expliquer que les solutions à ces défis environnementaux, c'est de l'emploi, c'est de l'aménagement du territoire, c'est du renouvellement des institutions, c'est la refondation de l'Europe, c'est plus de démocratie."