Pourquoi des élections législatives anticipées?
La Première ministre britannique Theresa May a annoncé le 18 avril dernier qu'elle convoquait des législatives anticipées le 8 juin. Le Parlement avait ensuite donné son aval à la dissolution du Parlement et à la tenue du vote, qui aurait normalement dû avoir lieu en 2020.
Elle a expliqué sa décision par une volonté de stabilité durant les deux ans que vont durer les négociations sur le Brexit.
Ayant pris la tête de l'exécutif britannique, sans être élue, quelques jours après le réréfendum du 23 juin 2016 qui a causé la démission de son prédécesseur David Cameron, Theresa May veut conforter son mandat à travers ce scrutin.
Elle espère aussi renforcer la majorité détenue par son Parti conservateur au Parlement de Westminster.
Quelle instance doit être élue?
Les Britanniques doivent élire leurs députés à la Chambre des communes, soit la "Chambre basse" du Parlement. Chaque circonscription - 650 en tout - doit désigner son représentant. Ainsi, 326 sièges sont nécessaires pour obtenir la majorité absolue et être autorisé à former un gouvernement.
La deuxième chambre du Parlement, celle des Lords, n'est pas élue par le peuple.
Elle est composée actuellement de 847 membres, certains nommés à vie par la reine sur proposition du Premier ministre, mais aussi de 92 lords héréditaires élus parmi les membres des différentes pairies (corps législatif qui regroupe des nobles) du Royaume-Uni et de 26 lords clercs de l'Eglise d'Angleterre.
Comment sont réparties les forces politiques actuellement?
Au moment de la dissolution du Parlement le 19 avril 2017, les 650 sièges de la Chambre des Communes étaient répartis ainsi:
Lors des dernières élections générales convoquées en 2015, le Parti conservateur avait acquis une courte majorité qu'il espère désormais élargir.
Travaillistes et conservateurs s'alternent au pouvoir depuis plus de cent ans, alors que le parti Libéral-démocrate, qui les a historiquement talonnés, a perdu du terrain.
Les élections de 2015 ont en revanche vu l'explosion du Parti pour l'indépendance du Royaume-Uni (UKIP), qui a obtenu 12,65% des suffrages et ainsi gagné un siège. Or, son représentant à la Chambre des communes, Douglas Carswell, a quitté le parti pour devenir indépendant, ce qui laisse actuellement UKIP sans siège.
Que disent les sondages?
Il y a encore un mois, les conservateurs bénéficiaient d'une bonne vingtaine de points d'avance sur les travaillistes dans les sondages.
Les enquêtes d'opinion montrent désormais un resserrement de l'écart entre le parti de Theresa May, toujours en tête, et le Labour de Jeremy Corbyn.
Lors de la publication des programmes électoraux, l'une des mesures phares de Theresa May pour financer la prise en charge des personnes âgées a notamment été très mal reçue par la population, forçant la Première ministre à faire volte-face et écornant les intentions de vote en sa faveur.
Selon un sondage de l'institut YouGov paru mercredi dans le Times, il n'est pas impossible que le Parti conservateur perde sa majorité absolue au Parlement.
Cette enquête, qui se fonde sur un nouveau système de modélisation, montre que le parti conservateur pourrait perdre 20 sièges sur les 330 qu'il détient au Parlement et le Parti travailliste en gagner près de 30. Il manquerait ainsi 16 sièges aux conservateurs pour atteindre la majorité absolue.
Les sondages publiés dimanche et lundi montrent que l'écart s'est encore resserré entre les deux adversaires, mais dans une mesure plus ou moins importante selon les instituts.
La Première ministre serait alors obligée de démissionner, a souligné Pierre Haroche, chargé de cours au Département d'études européennes du King's College de Londres, invité mercredi dernier dans le Journal du matin sur RTS La Première.
Si le parti de Theresa May perd les législatives, cela serait un pari manqué.
Et si la Première ministre l'emporte, mais avec un score moins élevé qu'attendu, son pari d'un mandat populaire renforçant son mandat de négociation sera fragilisé, a encore estimé Pierre Haroche.
>> Lire : Le parti de Theresa May pourrait perdre sa majorité pour "un pari inutile"
Quel est l'impact du Brexit sur la campagne?
Le Brexit et les négociations avec l'Union européenne qui doivent être menées avec l'Union européenne jusqu'en 2019 constituent l'enjeu principal de cette élection.
Le leader travailliste Jeremy Corbyn a indiqué lundi qu'en cas de victoire de son parti, il ferait en sorte qu'un accord soit trouvé avec l'UE.
Theresa May, elle, a appelé les électeurs à soutenir son gouvernement contre "l'agressivité" des Européens. "Nous serons là pour négocier l'accord qui convient, mais (...) aucun accord vaut mieux qu'un mauvais accord", a-t-elle déclaré la semaine passée sur la chaîne Sky News.
Les résultats du référendum de juin 2016 pourraient également avoir une influence sur les législatives. Les conservateurs vont par exemple tenter de s'emparer des 58 circonscriptions où le siège a été attribué aux travaillistes en 2015 avec un écart des votes de moins de 9000 voix, mais où les électeurs ont voté en faveur du Brexit en 2016, analyse le Telegraph.
Et l'influence des récents attentats au Royaume-Uni?
Theresa May a maintenu le scrutin de jeudi et annoncé dimanche la reprise de la campagne après une journée de suspension à la suite de l'attentat qui a fait sept morts et des dizaines de blessées samedi à Londres.
La campagne avait également été suspendue quelques jours auparavant, au lendemain de l'attaque qui a fait 22 morts à la sortie d'un concert à Manchester.
Le leader travailliste Jeremy Corbyn a approuvé le choix du maintien du calendrier électoral. Pour lui, cela démontre que la démocratie ne peut être stoppée par la violence.
Mais celui-ci appelle tout de même à la démission de la Première ministre, critiquée depuis l'attentat-suicide de Manchester pour avoir réduit de 20'000 hommes les effectifs policiers du pays lorsqu'elle était ministre de l'Intérieur (2010-2016).
>> Lire : Le leader travailliste Jeremy Corbyn appelle Theresa May à démissionner
Jessica Vial
Theresa May sèche le débat électoral
Theresa May avait prévenu dès l'annonce du scrutin qu'elle ne participerait à aucun débat, et a seulement expliqué qu'elle préférait échanger avec des électeurs que "se chamailler avec d'autres leaders de parti".
La Première ministre a donc brillé par son absence mercredi passé au grand débat électoral et s'est fait représenter par sa ministre de l'Intérieur Amber Rudd.
Theresa May a été critiquée de toutes parts, notamment par le chef de l'opposition travailliste Jeremy Corbyn, qui a vu en son absence "un signe de faiblesse". La cheffe des Verts Caroline Lucas a même qualifié cette décision d'"acte de lâcheté extrême".
La Première ministre a toutefois débattu par deux fois avec Jeremy Corbyn à la télévision, mais elle a refusé un débat direct. Chaque intervenant a donc été interrogé séparément.