"Le silence autour de ces abus est toujours inexplicable: les choses sont sues et sont pourtant tues", constate Dominique Wolton, sociologue de la communication et directeur de recherche au CNRS, évoquant la loi du silence enfin brisée après des décennies d'omerta autour des abus présumés du producteur Weinstein.
L'abondance d'informations, précise le chercheur, n'est pas - bien au contraire - une garantie de transparence. "Plus il y a d'informations, plus il y a de rumeurs, surtout dans les affaires de moeurs."
Prise de conscience culturelle et politique
Dans le "triangle infernal pouvoir-sexe-argent", la culture de la complicité encourage encore le sentiment de celui qui, au sommet du pouvoir, se considère également au-dessus des lois.
"Le silence des victimes fait partie de ce triangle infernal", explique Dominique Wolton. "On ne connaît pas la puissance psychique du traumatisme de la victime, et l'intelligence du bourreau lui permet de rester longtemps dans cette situation d'impunité."
Or, pour "crever l'abcès", l'éducation politique est une condition sine qua non. "La prise de parole des femmes, et de toutes les victimes d'abus sexuel, passe par l'émancipation de la victime par rapport à son bourreau. Il faut une prise de conscience culturelle et politique, qui aide à briser le cercle de la victimisation, et qui fait que la victime ose parler."
"C'est un long mouvement d'émancipation. Et il ne passe pas par l'abondance d'informations", conclut le sociologue.
kkub