Membre d'un parti de l'opposition, Mohammed raconte avoir fui la Guinée-Conakry après l'élection de 2015 remportée par le président sortant Alpha Condé. Après être passé par le Niger, il arrive en Libye où il est "intercepté par des hommes armés" qui demandent à ses proches une rançon de 700 euros en échange de sa libération.
"Alors que j'étais au téléphone avec mes parents, (les Libyens) me frappaient pour que mes parents entendent mes cris et tentent de négocier" avec les ravisseurs, confie Mohammed au 19h30 de la RTS.
Mais comme sa famille ne peut pas payer la somme exigée, le Guinéen se retrouve "loué" à des Libyens à la recherche de travailleurs pour leurs champs, affirme-t-il. "Nous n'étions pas payés", témoigne Mohammed. "Une somme d'argent était négociée entre ces hommes et le gardien (de prison), c'est le gardien qui recevait de l'argent!"
"Ce sont des esclaves!"
Alors que Mohammed rentre en prison après chaque journée de travail, il connaît d'autres migrants qui ont été "achetés" par des Libyens de manière permanente, raconte-t-il. "Ce sont comme des esclaves", estime le jeune homme. "Les Libyens nous appellent des esclaves, nous les Noirs!"
Le témoignage du Guinéen corrobore un reportage de CNN diffusée la semaine dernière. La chaîne américaine a filmé ce qui serait la vente aux enchères de migrants d'origine subsaharienne à des "maîtres" au nord de la Libye. Ces hommes seraient vendus pour quelques centaines de dollars et réduits à l'esclavage.
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Parmi ses tâches d'esclave moderne, Mohammed dit avoir dû enterrer des migrants victimes de naufrages. Et avoir vu des femmes être prostituées par leurs ravisseurs libyens. Une réalité sordide à laquelle il a échappé en prenant la fuite. Arrivé en Europe depuis un an, Mohammed a été accueilli dans un centre pour réfugiés en France voisine.
>> Les précisions de Marc Julmy:
Propos recueillis par Marc Julmy/tmun
Macron qualifie de "crimes contre l'Humanité" les faits d'esclavage en Libye
Le président français Emmanuel Macron a qualifié mercredi de "crimes contre l'Humanité" les ventes de migrants africains comme esclaves en Libye, révélées par la chaîne américaine CNN.
"La dénonciation par la France est sans appel" et il faut que "nous puissions aller beaucoup plus loin pour démanteler les réseaux" de trafiquants, a déclaré le chef d'Etat après une rencontre avec le président de la Guinée et de l'Union africaine, Alpha Condé.
La France a en outre décidé de saisir le Conseil de sécurité de l'ONU sur les exactions. Le chef de la diplomatie Jean-Yves Le Drian a affirmé que Paris souhaite que l'Organisation internationale des migrations et le Haut-Commissariat aux réfugiés rendent public "l'état réel" de la situation en Libye, notamment en ce qui concerne la traite présumée de migrants.
(afp)