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La condamnation de Ratko Mladic, "un soulagement pour toutes les victimes"

Carla Del Ponte. [Keystone - Salvatore Di Nolfi]
Ratko Mladic, dernier responsable jugé au TPIY: interview de Carla Del Ponte / Forum / 6 min. / le 22 novembre 2017
L'ancienne procureure internationale Carla Del Ponte dit son soulagement, mercredi, après la condamnation à vie de l'ancien chef militaire des Serbes de Bosnie Ratko Mladic. "C'est très positif", répète-t-elle dans une interview à la RTS.

Plus de vingt ans après la guerre des Balkans, Ratko Mladic était le dernier instigateur du conflit en ex-Yougoslavie à être jugé en première instance par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY). Il a été condamné pour dix chefs d'accusation, dont crimes contre l'humanité et génocide.

>> Lire : Ratko Mladic, le "boucher des Balkans", condamné à la prison à vie

Ancienne procureure du TPIY (1999-2007), Carla Del Ponte rappelle dans l'émission Forum qu'après la mort de l'ancien président yougoslave Slobodan Milosevic, Ratko Mladic était le plus haut responsable des crimes commis durant le conflit. "Donc, naturellement, la peine ne pouvait être que la réclusion à vie si on pense seulement au génocide de Srebrenica", relève la Tessinoise. "C'est très positif, c'est un soulagement pour toutes les victimes. Finalement, elles ont réussi à obtenir justice avec cette condamnation."

Tous les hauts responsables politiques et militaires sont passés en justice.

Carla Del Ponte

C'était aussi le dernier procès d'envergure pour ce tribunal international et une preuve supplémentaire de son utilité, selon elle. "La démonstration, on l'a donnée déjà tout au long de l'existence de ce tribunal, on a exécuté complètement le mandat du Conseil de sécurité", précise Carla Del Ponte. "Tous les hauts responsables politiques et militaires sont passés en justice, on a fait ce qu'il fallait faire." Et pour l'ancienne procureure, le fait de conclure l'activité du TPIY avec une réclusion à vie, "c'est très positif."

L'acquittement d'Ante Gotovina, une grande erreur de la justice internationale.

Carla Del Ponte

Lors de sa création, le tribunal avait été décrit par certains comme le bras d'une justice "des vainqueurs": la communauté internationale qui a fait la guerre à la Serbie et qui a jugé ensuite les Serbes. L'ancienne magistrate réfute ces accusations. "C'est un vieil argument qui ne tient plus, parce qu'on a pu démontrer (…) que ce ne sont pas seulement les Serbes qui y sont passés, mais aussi les autres (…) Si on étudie les documents de tous ces procès, il faut vraiment laisser tomber cet argument."

Carla Del Ponte reconnaît cependant un grand couac du tribunal, l'acquittement en appel du général croate Ante Gotovina, condamné en première instance à 27 ans de réclusion. "C'est une grande erreur de la justice internationale d'après moi", dit-elle.

Globalement, le travail du TPIY a été pour la Suissesse un grand pas en avant. Il a démontré qu'on "peut obtenir justice même si les responsables n'ont pas participé à la commission des crimes mais les ont organisés, planifiés et laissé exécuter", se félicite-t-elle. "C'est le grand pas en avant de la justice internationale."            

Propos recueillis par Chrystel Domenjoz et Christian Favre

Texte web: oang

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"Une victoire capitale pour la justice"

Le Haut-Commissaire aux droits de l'homme de l'ONU a salué la condamnation de Ratko Mladic, qu'il a qualifiée de "victoire capitale pour la justice".

"Mladic est la quintessence du mal", a estimé Zeid Ra'ad Al Hussein, qui appartenait à la Force de protection de l'ONU dans l'ex-Yougoslavie entre 1994 et 1996. "Ce verdict est un avertissement aux auteurs de tels crimes qu'ils n'échapperont pas à la justice, aussi puissants soient-ils, et quel que soit le temps qu'il faudra. Ils devront rendre des comptes."

L'Otan et l'UE ont elles appelé à la "réconciliation" dans les Balkans après ce verdict. "Cela montre que l'Etat de droit fonctionne et que ceux qui sont responsables de crimes de guerre doivent rendre des comptes", s'est félicité le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg.

"Regarder vers l'avenir"

Le président serbe Aleksandar Vucic a appelé mercredi ses compatriotes à "regarder vers l'avenir", dans une allocution prononcée après la condamnation à perpétuité de Ratko Mladic.

"Commençons à regarder vers l'avenir, à penser à nos enfants, à la paix, à la stabilité dans la région", a-t-il dit. Il faut "revitaliser les usines, inaugurer des bâtiments au lieu de nous étouffer dans les larmes du passé", a-t-il recommandé.