Ratko Mladic a été condamné mercredi à la prison à perpétuité pour dix chefs d'accusation dont crimes contre l'humanité et génocide par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie.
Or, le traitement médiatique de ce procès a mis en lumière les divergences de perception de l'accusé et du verdict, même au sein des chaînes de service public de la Radio Télévision de Bosnie-Herzégovine.
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Deux chaînes, deux visions
Sur Federalna TV, le média audiovisuel public de la Fédération de Bosnie-Herzégovine (la région du pays à dominante croate et bosniaque), le verdict a été présenté comme un juste châtiment. Mercredi soir, le journal télévisé s’est ouvert sur une archive de la guerre, où l’on entend ce message glaçant du général Mladic: "rôtissez-les, tirez sans arrêt, il n'y a pas un seul Serbe ici...". La présentatrice a ensuite annoncé la condamnation de Ratko Mladic pour génocide.
Au même moment, le téléjournal de la Radio Télévision de la république serbe de Bosnie (RTRS), la région du pays à dominante serbe, ouvrait en parlant d'"un verdict qui ferme la porte à la justice". Le présentateur a souligné que Ratko Mladic était "lavé de toutes les accusations sauf celle de génocide". Dans ses titres, il a également souligné que Ratko Mladic restait un "héros" et un "patriote" aux yeux du président de la République serbe de Bosnie, Molorad Dodik.
Proximité avec le pouvoir
Cette différence de traitement, entre deux chaînes qui dépendent pourtant de la même entité, met en lumière l’absence de coordination entre les chaînes publiques de Bosnie-Herzégovine. Le service public audiovisuel avait pourtant été pensé comme un outil de réconciliation et de cohésion nationale au lendemain de la guerre. Aujourd’hui, il est tout aussi divisé que le pays lui-même, et contribue même par certains côtés à nourrir les tensions entre les communautés.
La proximité entre les médias publics et le pouvoir politique est souvent montrée du doigt. En République serbe de Bosnie, en particulier, la RTRS est réputée très proche du président ultranationaliste Molorad Dodik. Cela explique en grande partie pourquoi, sur cette chaîne, on présentera plus volontiers Srebrenica comme une "libération" que comme un "génocide".
Renaud Malik/jvia