Après dépouillement de la quasi totalité des bulletins tôt vendredi, les trois formations ouvertement indépendantistes (Junts per Catalunya, la gauche républicaine ERC et l'extrême-gauche CUP) disposent, avec 70 sièges sur 135 au Parlement régional, de la majorité absolue.
Le dirigeant séparatiste Carles Puigdemont, exilé en Belgique, a salué jeudi soir depuis Bruxelles la victoire du camp indépendantiste, soulignant que c'est "un résultat que personne ne peut discuter". Son parti, Junts per Catalunya, a recueilli le plus de voix parmi les indépendantistes, et 34 sièges au Parlement.
Par le jeu des pondérations de voix profitant aux régions rurales où ils sont bien implantés, les indépendantistes ont la majorité au Parlement sans avoir la majorité des voix: 47,6 % des Catalans ont voté pour ces formations, mais 52% ont donné leur voix aux unionistes et à Podemeos - qui n'est pas séparatiste mais favorable au référendum d'autodétermination. Dans l'ensemble, un score semblable à celui de 2015.
Participation record
Les électeurs catalans, qui ont battu avec près de 82% de votants le record historique de participation dans la région, ont toutefois désigné comme première force politique de la province le parti libéral anti-indépendance Ciudadanos, qui obtient plus de 25% des voix et 37 sièges. "La majorité sociale désire l'union avec l'Espagne et l'Europe" a clamé la leader de la formation dans la région Inès Arrimadas.
Le scrutin s'est déroulé sans incident malgré des semaines de tension.
A moins qu'ils ne parviennent pas à s'entendre pour former une coalition, les indépendantistes reprendront ainsi les commandes de la région que le gouvernement de Madrid leur avait retirées en invoquant pour la première fois l'article 155 de la Constitution, plaçant la Catalogne sous tutelle de Madrid, suite au référendum d'autodétermination du 1er octobre.
Le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy avait d'ores et déjà prévu d'annuler la mise sous administration directe quel que soit le résultat du scrutin, mais a indiqué qu'il pourrait l'instaurer à nouveau si le nouveau gouvernement catalan recherche l'indépendance de façon illégale. Muet jeudi soir, le leader du Parti populaire (PP, droite) doit s'exprimer sur les résultats catalans vendredi.
L'Union européenne, qui soutient fermement le gouvernement de Madrid, a fait savoir pour sa part que sa position sur la Catalogne "ne changerait pas".
>> Lire le déroulé de la journée : Les indépendantistes retrouvent la majorité absolue en Catalogne
afp/ptur
"On va vers une crise politico-judiciaire"
"C'est un revers pour le président Rajoy, qui avait mis sur pieds une stratégie pour arrêter la crise catalane", a estimé Joan Botella, doyen de la Faculté des sciences politiques de l’Université autonome de Barcelone et président de l’Association des fédéralistes de gauche de Catalogne, vendredi dans La Matinale de la RTS.
"Il y a une grande polarisation, les deux gagnants sont ceux qui ont des positions politiques extrêmes. Ceux qui sont plus modérés (…) se sont vus punis par les électeurs", ajoute-t-il. Il précise toutefois que "les relations entre les deux principaux partis séparatistes sont "très mauvaises" et que "chacun pensait qu’il allait dépasser l’autre".
"On va vers une crise politico-judiciaire assez importante. Si Carles Puidgemont rentre en Espagne, il sera arrêté immédiatement et les nationalistes vont pousser fort contre l’arrêt des mesures judiciaires", ajoute-t-il.
S’agit-il d’un retour à la case départ, mais avec des fronts encore durcis? "Je déteste sembler pessimiste, mais c’est exact", répond Joan Botella.
Ecouter l'entretien intégral dans La Matinale: