Un rituel "pas dénué de sens"
Pour la Frankfurter Allgemeine Zeitung, il serait erroné de considérer les élections russes comme un rituel dénué de sens. Le vote, très important pour Vladimir Poutine, est une sorte de stress-test pour son système politique, pour sa capacité à sécuriser son pouvoir et à s’assurer du soutien de tous les rouages de l’appareil d’Etat, des gouverneurs de provinces jusqu’aux directeurs d’école. Et, ajoute le quotidien, Vladimir Poutine a besoin d’un plébiscite pour maintenir son contrôle sur les cliques rivales au Kremlin.
"Semi-dictature"
"Un nouveau mandat dans une semi-dictature", résume de son côté Die Welt. La rhétorique guerrière a réussi à mobiliser les Russes, pour des élections en forme de farce, mais qui valent toujours mieux que pas d’élection du tout, estime le quotidien allemand. Et d'affirmer: la Russie de Poutine "n’est pas l'Union soviétique de Staline".
"Le patriotisme ne suffit pas"
Mais, constate la Süddeutsche Zeitung, le patriotisme ne suffit pas. Le niveau de vie des Russes s’est dégradé par rapport aux pays industrialisés. Des centaines de milliers de Russes, bien formés, ont quitté le pays. Pour améliorer la situation économique, Vladimir Poutine dépend aussi de ses relations avec l’Union européenne.
"Consensus large et authentique"
D'autres journaux commentent également le pourcentage des votes en faveur du président sortant, 76%. C’est le signe d’un consensus large et authentique, selon le Corriere della Sera. Le récit d’une Russie encerclée d’ennemis extérieurs a encore été renforcé par l’affaire de l'empoisonnement de l’ancien espion russe. Vladimir Poutine s’est pour la première fois exprimé dimanche sur le sujet: c’est une "bouffonnerie" que d’accuser la Russie, dit-il. Et d’assurer que Moscou est prêt à coopérer avec Londres dans l’enquête.
"Poutine 4.0"
"Poutine 4.0", selon la formule du journal The Guardian. Le maître du Kremlin ressort de son troisième mandat plus fort que jamais. Mais où ira-t-il pendant son 4ème mandat, se demande le quotidien britannique. Préparer la transition pour s’assurer une retraite tranquille? Renforcer le bras de fer avec l’Occident. Les questions restent ouvertes dans un système politique qui reste très opaque.
Un leader fort "pour survivre"
Vladimir Poutine a eu la réélection qu’il souhaitait, constate le The Washington Post. La campagne présidentielle a été marquée par cette formule, 'la Russie est sous attaque', le pays s'est donc choisi un leader fort pour survivre. Pour le quotidien américain, il faut s’attendre à une montée des tensions avec l'Occident.
Colosse aux pieds d'argile
El Païs, enfin, livre cette réflexion plus générale: Vladimir Poutine, comme les présidents chinois Xi Jinping ou turc Recep Tayyip Erdogan, peut se dire, à l’instar de Louis XIV: "l’Etat, c’est moi". La marche des trois titans de l’autocratie internationale pourrait difficilement être, à première vue, plus triomphante. L'audace et la sagacité tactique de Vladimir Poutine sont déjà légendaires. Il a stabilisé le pays, renforcé ses forces armées, affaibli de nombreux ennemis. Il règne sur un pays immense, avec d'énormes ressources énergétiques. Mais tout cela repose sur une économie anémique, de la taille de celle de l’Espagne. Et le président russe n’a pas été capable de renverser cette tendance qui limite inexorablement la Russie.
Patrick Chaboudez/kkub
"Le temps s'est figé en Russie"
Pour Eric Hoesli, journaliste spécialiste de la Russie, les élections russes démontrent un certain immobilisme. "La Russie que l'on voit apparaître à travers ce scrutin est un pays immobile, crispé sur lui-même. On a le sentiment d'un déjà-vu: beaucoup de personnalités qui étaient présentes dans cette élection sont des vétérans. On a l'impression que le temps s'est figé et que le développement de la Russie n'est pas visible", a-t-il indiqué lundi sur les ondes de la RTS.
Malgré les nombreuses voix dénonçant des bourrages d'urnes et autres fraudes, Eric Hoesli a estimé que les résultats démontraient un net plébiscite pour le président russe: "Quels que soient les chiffres, ils nous donnent une indication tout à fait claire du soutien dont dispose Vladimir Poutine".
>> L'interview complète d'Eric Hoesli: