L'Union européenne a resserré ses rangs face à Moscou dans la nuit de jeudi à vendredi, dans l'affaire Skripal, du nom de l'agent double empoisonné au Royaume-Uni.
"On peut s'en féliciter, ce n'est pas facile d'exprimer des positions unies au niveau européen lorsqu'il s'agit de partenaires importants comme la Russie ou les Etats-Unis", estime Yves Bertoncini, consultant en affaires européennes et président du mouvement européen en France, invité vendredi de La Matinale de la RTS en marge sommet des chef d’Etat et de gouvernement européen se déroule jeudi et vendredi à Bruxelles.
Il se réjouit qu'il ait eu "une solidarité vis-à-vis du Royaume-Uni", quand bien même celui-ci a décidé de quitter l'Union. "L'UE a montré son unité et, un tout petit peu ses muscles, vis-à-vis du président russe Vladimir Poutine", souligne-t-il.
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Situation asymétrique
"Poutine joue à un jeu qui lui bénéficie à l'interne et il bénéficie d'un soutien populaire assez massif. Mais en même temps, jusqu'ici, il a su jusqu'où ne pas aller trop loin, surtout après l'annexion de la Crimée. Parce que là, il y a eu un front uni des Européens. Il y a eu des sanctions, bien sûr, mais il y a des discussions entre eux pour savoir s'il faut les maintenir".
Il souligne aussi le fait que si certains pays, comme la Grèce ou l'Italie, sont plus conciliants, d'autres comme les pays baltes ou la Pologne se montrent fermes. Pour lui, c'est "un équilibre qui sera maintenu si Vladimir Poutine ne montre pas de signe de détente". "L'Union européenne est un combat et il faut travailler à la cohésion de l'ensemble", insiste-t-il.
Yves Bertoncini souligne une "situation asymétrique en défaveur de l'UE, qui l'empêche d'aller plus loin". "Vladimir Poutine est une forme de despote éclairé, qui peut envoyer des troupes en Syrie assez facilement, alors que les Européens sont beaucoup plus prudents sur l'engagement militaire", donne-t-il en exemple.
"Une diversité qui s'exprime"
Le consultant en affaires européennes reconnaît toutefois que le modèle européen se transforme. "Le franco-allemand ne peut plus être l'alpha et l'omega", admet-il. Il estime par exemple que "le Premier ministre néerlandais Mark Rutte va reprendre le flambeau des britanniques, notamment sur les questions de zone euro". "Nous sommes 28, bientôt 27... nous sommes unis dans la diversité et cette diversité s'exprime", conclut-il.
Propos recueillis par Romain Clivaz
Adaptation web: Jessica Vial
Jean-Claude Juncker très critiqué
Yves Bertoncini a des mots sévères à l'encontre du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker. "Il a dit hier qu'il vaudrait mieux qu'il soit président des Etats-Unis à la place de Trump... c'est son humour traditionnel. On a envie de lui dire: soyez d'abord président d la Commission!", lâche-t-il.
Le Luxembourgeois est très critiqué au sein de l'Union, pour des questions administratives, ou pour le fait qu'il a félicité sans nuance Vladimir Poutine pour sa réelection. Jean-Claude Juncker estime lui-même qu'il s'agit de sa "Commission de la dernière chance".
Est-il à la hauteur de son rôle? "Non, il est légitime", tranche Yves Bertoncini. "Il ne règne pas vraiment, il délègue. Les technocrates prennent le pouvoir quand les politiques leur laissent la place", ajoute-t-il.
"Puisque de toutes façons vous ne solliciterez pas de nouveau mandat, profitez pleinement et assumez toutes vos responsabilités pour marquer l'histoire", enjoint le président du mouvement européen en France à l'adresse de Jean-Claude Juncker. "C'est une commission qui doit davantage jouer son rôle, être pluls politique, dans un contexte géopolitique qui le réclame".