Donald Trump menace l'Iran de "conséquences très graves"
- Donald Trump a annoncé mardi le retrait des Etats-Unis de l'accord sur le nucléaire iranien avec un retour de toutes les sanctions.
- La décision est dénoncée par tous les autres signataires et fait craindre une nouvelle montée des tensions au Moyen-Orient. Les autres pays ont la volonté partagée de préserver l'accord malgré le retrait américain.
- Le président iranien Hassan Rohani, qui s'était beaucoup investi dans cet accord, a immédiatement accusé son homologue américain de pratiquer "une guerre psychologique" et menacé de reprendre des activité d'enrichissement d'uranium, tout en offrant aux autres parties une fenêtre de négociations. Le guide suprême Ali Khamenei a pour sa part estimé que Donald Trump "a commis une erreur".
- Mercredi, le président américain a "conseillé" à l'Iran de ne pas relancer son programme nucléaire, sous peine de "conséquences très graves".
vkiss/fme avec agences
Nouvelles menaces américaines
Trump menace l'Iran de "conséquences très graves"
Le président américain Donald Trump a menacé mercredi l'Iran de "conséquences très graves" s'il décidait de relancer son programme nucléaire, au lendemain de l'annonce du retrait des Etats-Unis de l'accord visant à empêcher Téhéran d'obtenir l'arme nucléaire.
"Je conseille à l'Iran de ne pas relancer son programme nucléaire. Je leur conseille très vivement" de ne pas le faire, a déclaré M. Trump à la presse à la Maison Blanche avant une réunion du cabinet.
"S'ils le font, il y aura des conséquences très graves, OK?", a-t-il ajouté en réponse à une question sur ce sujet.
Deux axes se dessinent
L'analyse géopolitique de Marcel Boisard
Deux axes se dessinent. D'un côté, l'Américain Trump, l'Israélien Netanyahou et le Prince Ben Salmane d'Arabie saoudite sunnite.
De l'autre, l'Iran chiite de Hassan Rohani et son lien privilégié avec la Russie de Vladimir Poutine.
Vers une course nucléaire au Moyen-Orient?
L'Arabie saoudite cherchera à se doter de l'arme nucléaire si l'Iran le fait
L'Arabie saoudite a prévenu mercredi qu'elle développerait son propre arsenal nucléaire si l'Iran s'y employait de son côté. Des menaces qui exacerbent les fortes tensions dans la région.
Si l'Iran se dote d'une capacité nucléaire, nous ferons tout notre possible pour faire de même
L'Arabie saoudite et l'Iran sont à couteaux tirés depuis des années, les deux pays soutenant notamment des camps opposés en Syrie, au Liban et au Yémen. Le ministère saoudien des Affaires étrangères a accusé mercredi Téhéran de "tirer profit des revenus générés par la levée des sanctions pour déstabiliser la région".
Au lendemain de l'annonce américaine du retrait de l'accord, l'Arabie saoudite a d'ailleurs été la cible d'une nouvelle salve de missiles tirés par les rebelles Houthis du Yémen, soutenus par l'Iran.
Conversation franco-iranienne
Macron et Rohani conviennent de poursuivre leur travail commun
Emmanuel Macron et le président iranien Hassan Rohani sont convenus mercredi, lors d'un entretien téléphonique, de poursuivre leur travail en commun en vue de la mise en oeuvre continue de l'accord sur le nucléaire de 2015, rapporte l'Elysée. Ils veulent préserver la stabilité régionale.
Le président iranien Hassan Rohani a de son côté répondu qu'il "fera tout pour rester dans l'accord", mais réclamé aux Européens des garanties très rapides prouvant que leurs entreprises continueront à travailler avec l'Iran.
Le président français "a par ailleurs rappelé le projet d'engager une discussion large avec l'ensemble des parties concernées, prenant pour base l'accord nucléaire de 2015, pour parvenir à un cadre mutuellement bénéfique sur les sujets liés au développement du programme nucléaire de l'Iran après 2025, les activités balistiques et les principales crises au Moyen-Orient", précise la présidence française.
Le débat
Kenneth Weinstein s'oppose à Thierry Coville
Le directeur du think tank Hudson Institute Kenneth Weinstein défend, dans l'émission Forum, la décision du président Donald Trump de retirer les Etats-Unis de l'accord avec l'Iran.
Il s'oppose à Thierry Coville, chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques à Paris, qui dénonce ce retrait.
Quid des entreprises suisses?
Le SECO déplore une "incertitude juridique"
Le Secrétariat d'Etat à l'économie, interrogé par la RTS, estime que le retrait américain de l'accord sur le nucléaire iranien "accroît l'insécurité juridique pour les entreprises suisses, en particulier pour les intermédiaires financiers" qui ont des relations avec l'Iran.
Reste que les craintes en Europe et en Suisse sont nombreuses autour de l'impact de cette décision sur les sociétés qui ont déjà investi en Iran. Néanmoins, ces entreprises suisses ne se sont pour l'heure pas massivement engagées dans ce pays.
>>Ecouter les explications d'Olivier Schorderet dans Le 12h30:
Réaction en Iran
Ali Khamenei: "Vous avez commis une erreur, Monsieur Trump"
Le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a exigé mercredi des Européens qu'ils donnent des "garanties réelles" à l'Iran pour lui permettre de rester dans l'accord de Vienne sur le nucléaire iranien après le retrait des États-Unis.
"Maintenant, on dit qu'on veut continuer l'accord nucléaire avec les trois pays européens, (mais) je ne fais pas confiance à ces trois pays (...) Vous voulez conclure un accord, obtenez des garanties réelles, car demain ils feront la même chose que ce que les États-Unis ont fait", a déclaré Ali Khamenei.
"Une dizaine de mensonges"
"Vous avez entendu hier soir le président américain tenir des propos stupides et superficiels", dit le guide suprême de la Révolution iranienne Ali Khamenei sur son site internet.
"Il y avait peut-être une bonne dizaine de mensonges dans son discours. Il a menacé le régime et le peuple, en disant : 'Je vais faire ceci ou cela'. Monsieur Trump, je vous le dis au nom du peuple iranien: Vous avez commis une erreur", ajoute-t-il.
Réaction officielle de la Suisse
Des regrets, mais une carte diplomatique à jouer
Le Département des affaires étrangères a dit son inquiétude mercredi, tout en déplorant une augmentation de l'insécurité politique dans la région. Néanmoins, à Berne on estime que la Suisse pourrait avoir une carte à jouer dans les futures relations diplomatiques.
En soi, abandonner un accord de dénucléarisation est une erreur, a déclaré Ignazio Cassis sur les ondes de la RTS.
Selon le chef du Département fédéral des affaires étrangères, la Suisse pourrait continuer à offrir ses services diplomatiques: "Nous soignons les intérêts diplomatiques américains en Iran, c’est donc une situation délicate et nous devons garder un dialogue ouvert et crédible avec l’Iran et les Etats-Unis."
Et d'ajouter: "Le fait que l’on doive s’engager pour reconstruire ce que quelqu’un est en train de détruire n’est pas un bénéfice, mais c'est notre vocation."
En vidéo
La réaction de sénateurs américains
Iran: qui gagne, qui perd?
La chronique d'Alter eco
Sauvegarde de l'accord
Les autres signataires s'unissent contre les Etats-Unis
Au lendemain de l'annonce américaine, les autres pays signataires de l'accord (Allemagne, Chine, France, Royaume-Uni et Russie) ont assuré de leur volonté de préserver l'accord.
L'Union européenne a ainsi affirmé que les sanctions ne seront pas rétablies tant que l'Iran respectera l'accord sur son programme nucléaire. Une réunion officielle devrait avoir lieu lundi.
L'Allemagne veut continuer à appliquer l'accord sur le programme nucléaire avec l'Iran, que Donald Trump a dénoncé sans proposer d'alternative pour empêcher la République islamique de se doter de l'arme nucléaire, a déclaré mercredi le ministre des Affaires étrangères.
Les Européens vont "tout faire pour protéger les intérêts" de leurs entreprises en Iran "en intervenant auprès de l'Administration américaine" au niveau de l'Union européenne, a affirmé mercredi la présidence française.
"L'accord nucléaire avec l'Iran "reste vital" pour la sécurité du Royaume-Uni", a déclaré le secrétaire d'Etat britannique des Affaires étrangères Boris Johnson.
La Russie reste elle aussi déterminée à respecter l'accord international sur le programme nucléaire iranien a annoncé le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. Vladimir Poutine s'est lui dit "profondément préoccupé".
La Chine, signataire de l'accord de 2015, "appelle toutes les parties à agir de façon responsable" pour "revenir dès que possible" au respect d'un texte qui "contribue à préserver la paix au Moyen-Orient", a martelé Geng Shuang, porte-parole de la diplomatie chinoise.
Dénonciation des autres parties
Inquiétudes internationales
"La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni regrettent la décision américaine", a déclaré sur Twitter Emmanuel Macron. Dans un communiqué commun, les trois Etats, se sont dits "déterminés à assurer la mise en oeuvre" de ce texte en "maintenant les bénéfices économiques" au profit de la population iranienne.
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Les ministres français, allemand et britannique des Affaires étrangères rencontreront lundi des représentants iraniens, et Emmanuel Macron contactera par téléphone Hassan Rohani mercredi.
La Russie a aussi fait part de sa "profonde déception" et de son "extrême inquiétude". Dans la région, la Turquie a dit craindre "de nouveaux conflits" tandis que la Syrie a "condamné avec force" l'annonce du retrait des Etats-Unis de l'accord, affirmant sa "totale solidarité" avec Téhéran.
Le Japon estime que ce retrait est "très regrettable" et compte suivre de très près l'impact de la décision américaine. La Chine met en avant le dialogue, qui doit être privilégié pour résoudre les désaccords.
La Suisse a elle aussi exprimé son inquiétude mardi soir. Mais cela ne change rien à sa position. Berne va continuer de respecter pleinement l'accord et les sanctions telles que décidés par une résolution de l'ONU, écrit mardi soir le Département fédéral des affaires étrangères.
Rares soutiens
Israël et l'Arabie saoudite du côté américain
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, plus ferme soutien de Donald Trump sur ce dossier, a soutenu "totalement" cette décision "courageuse", tout comme le royaume sunnite d'Arabie saoudite, grand rival régional de l'Iran chiite.
L'Arabie saoudite, premier exportateur mondial de pétrole, a par ailleurs indiqué qu'elle prendra toutes les mesures nécessaires pour empêcher des pénuries d'approvisionnement en pétrole.
Les Emirats arabes unis (EAU) et Bahreïn se sont également alignés à l'Arabie saoudite en saluant le retrait américain de l'accord et le rétablissement de sanctions contre Téhéran.
Colère de députés iraniens
Un drapeau brûlé au Parlement
Des députés iraniens ont brûlé mercredi matin un drapeau américain en papier et une copie de l'accord sur le nucléaire à la tribune du Parlement à Téhéran.
Plusieurs dizaines de députés les ont rejoints pour crier "mort à l'Amérique", selon les images diffusées par le site de la télévision d'Etat iranienne. "Faites attention à ne pas brûler le Parlement", a lancé avec ironie son président, Ali Larijani, du haut du perchoir.
Le décryptage
"L'Iran a intérêt à montrer qu'il joue le jeu de la responsabilité internationale"
La décision du président américain Donald Trump de se retirer de l'accord sur le nucléaire iranien "n'a pas de conséquence immédiate" sur la sécurité mondiale, selon Marc Finaud, conseiller au Centre de politique de sécurité à Genève.
Les cours du pétrole ont bondi mercredi à leur plus haut niveau depuis novembre 2014, galvanisés par l'annonce américaine, ainsi que par une nette baisse des réserves de produits pétroliers aux Etats-Unis.
A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juillet a terminé à 77,21 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE), en hausse de 2,36 dollars par rapport à la clôture de mardi.
Sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), le baril de "light sweet crude" (WTI) pour le contrat de juin a pris 2,08 dollars pour finir à 71,14 dollars.
Première analyse
L'explication de notre correspondant
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La réaction iranienne
"Une guerre psychologique"
Une telle décision, portant en particulier sur la Banque centrale iranienne et des revenus pétroliers de Téhéran, a déjà provoqué une vive réaction des autorités iraniennes, qui ont déclaré vouloir discuter rapidement avec les Européens, les Chinois et les Russes pour voir si ces derniers peuvent garantir les intérêts de l'Iran.
Accusant le président américain de pratiquer "une guerre psychologique", le président iranien Hassan Rohani a déclaré dans une allocution à la télévision d'État iranienne: "Les États-Unis ont toujours montré qu'ils ne respectaient jamais leurs engagements."
Le président iranien a par ailleurs offert aux autres parties (Allemagne, Chine, France, Royaume-Uni et Russie) une courte fenêtre de négociations pour sauver ce pacte, tout en menaçant d'une reprise des activités d'enrichissement d'uranium.
La presse divisée
La presse iranienne était unanime mercredi pour dénoncer la décision du président américain de quitter l'accord nucléaire. Elle est toutefois divisée entre les journaux réformateurs et les médias conservateurs.
"L'accord nucléaire sans le gêneur", titre sur sa Une le grand quotidien réformateur Etemad. Le quotidien réformateur Aftab salue, lui, la "décision logique de Téhéran" de compter sur les Européens, la Russie et la Chine pour contrer la décision.
Le quotidien conservateur Farheekhtegan affirme que "l'Europe n'a pas la capacité de maintenir l'accord nucléaire". Pour le quotidien ultraconservateur Kayhan, "il est temps de le brûler".
Retrait américain
Une promesse de campagne
"J'annonce aujourd'hui que les Etats-Unis vont se retirer de l'accord nucléaire iranien", a déclaré Donald Trump à la Maison Blanche. Il tient ainsi, quinze mois après son arrivée au pouvoir, une promesse de campagne: "démanteler" cet accord emblématique fruit de 21 mois de négociations internationales acharnées pour empêcher l'Iran de se doter de la bombe atomique.
Le président américain, qui n'a eu de cesse de dénoncer l'"horrible" texte conclu par Barack Obama, a aussi annoncé le rétablissement des sanctions qui avaient été levées en contrepartie de l'engagement pris par l'Iran de ne pas se doter de l'arme nucléaire. Il a précisé remettre en place "le niveau le plus élevé des sanctions possibles".
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