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Une mère immigrée à ses enfants: "Je me battrai et vous retrouverai'"

Yeni Gonzalez (en bas) a reçu de nombreux soutiens pour récupérer ses enfants. [AP Photo/Keystone - Craig Ruttle]
Yeni Gonzalez (avec le t-shirt rouge) a reçu de nombreux soutiens pour récupérer ses enfants. - [AP Photo/Keystone - Craig Ruttle]
Séparée de ses trois enfants, la Guatémaltèque Yeni Gonzalez raconte son combat face à la politique de séparation des familles d'immigrants illégaux aux Etats-Unis, une mesure aujourd'hui révoquée.

Quarante-sept jours que Yeni Gonzalez, 29 ans, n'avait pas vu ses enfants. Devant le centre de détention de Harlem, à New York, où les trois enfants de 6, 9 et 11 ans sont retenus, la jeune mère était submergée par l'émotion au moment où elle a pu enfin les serrer dans ses bras.

"Je suis vraiment très heureuse, car je viens de voir mes deux garçons et ma fille...", explique-t-elle à la RTS.

Les trois enfants étaient arrivés illégalement aux Etats-Unis début mai pour fuir la violence des gangs au Guatemala. Ils ont été arrêtés à la frontière avec le Mexique puis placés en détention avec leur mère. Mais un matin, vers 05H00, des agents de l’immigration sont venus les chercher.

Une armée de volontaires

Yeni a juste eu le temps de leur faire une promesse: "Le jour où ils me les ont enlevés, je leur ai promis de me battre pour eux et que je les retrouverai. Et quand je les ai retrouvés, je me suis jetée à genoux, je les ai serrés très fort et je leur ait dit: 'Je vous l’avais promis et me voilà!'"

Pour en arriver là, Yeni a dû traverser les Etats-Unis en voiture, faute de papiers d’identité. Soit trois mille cinq cents kilomètres en quatre jours grâce à une armée de volontaires qui s’est relayée pour la conduire de Phoenix en Arizona à New York. A son arrivée, elle a trouvé essentiellement des femmes et des familles venues lui offrir un visage plus bienveillant de l’Amérique.

"Ce qui se passe est immoral"

"Je voulais lui montrer qu’il y a des gens aux Etats-Unis qui lui souhaite la bienvenue ainsi qu'à ses enfants, et qui veulent la savoir en sécurité et l’aider. Ce qui se passe actuellement à la frontière est complètement immoral et je me sens très mal", explique Christina, une volontaire qui a aidé Yeni dans son périple.

Dans son comité de soutien se trouve aussi Jose-Xavier Orochena, avocat hispanophone à l'origine de la mobilisation médiatique sur le sujet. Car si l’administration Trump a assoupli sa politique et ne sépare plus les familles, pour les 2000 enfants déjà arrachés à leurs parents, les retrouvailles tardent à se mettre en place.

"Comment se fait-il qu’on soit capable d’envoyer des fusées dans l’espace, et pas capable de réunir des familles?", s'insurge-t-il.

Cautions rédhibitoires

Pour l’avocat, le gouvernement ralentit volontairement ces retrouvailles en demandant des cautions de plus en plus élevées: sept mille cinq cents dollars pour Yeni, payés grâce à une campagne de financement participatif, et plus de 15'000 dollars aujourd’hui pour certaines mères.

"Le président Trump a dit qu’il essayerait de réunir ces mères et leurs bébés. Mais demander une caution d’une telle somme n’aide pas du tout. Ca pourrait tout aussi bien être une caution de 15'000 ou de 15 millions de dollars, parce qu’elles ne peuvent de toute façon payer aucun de ces deux montants", souligne-t-il.

Effet boule de neige souhaité

Pour Yeni, la bataille ne fait d'ailleurs que commencer. Ses enfants resteront placés tant qu’elle ne sera pas en mesure d’apporter une preuve de résidence ou de salaire. En attendant, elle a déposé une demande d’asile et elle a un message pour les autres mères toujours emprisonnées: "Nous avons partagé énormément de tristesse. Si ce message leur parvient, je demande à Dieu qu'elles sortent bientôt",

Quatre cents femmes sont toujours détenues dans le centre dont Yeni a été relâchée. La très grande majorité n’a pas les moyens de payer les cautions et les frais d’avocats. Yeni espère que son histoire fera boule de neige et que l’élan de solidarité dont elle a bénéficié permettra de les libérer.

>> Lire aussi : Les récits de la détresse d'enfants de migrants créent l'émoi aux Etats-Unis

Marie Bourreau/kkub

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