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La Suisse fait-elle encore rêver?

Géopolitis: Le bonheur suisse [AdobeStock]
Le bonheur suisse / Geopolitis / 25 min. / le 9 septembre 2018
Jalousée, parfois décriée, la Confédération helvétique est cet îlot démocratique et prospère au cœur de l’Europe. Indépendance et neutralité, le modèle suisse fait-il encore rêver à l'étranger? Les scandales financiers ont-ils terni son image?

La Suisse fait parler d'elle à l'étranger, quand en votation populaire elle refuse une sixième semaine de vacances payée. Lorsqu'elle entend limiter l'immigration sur son territoire. Ou lorsqu'elle interdit la construction de minarets.

Récemment, c'est la Ville de Lausanne qui a fait les gros titres des journaux, pour sa décision de ne pas accorder la nationalité à un couple du Maghreb qui avait refusé de serrer la main à ses interlocuteurs du sexe opposé. "L'égalité des sexes, plus forte que la liberté de religion. Cet aspect a beaucoup intéressé, beaucoup agité à l'étranger", note l'ambassadeur Nicolas Bideau, invité de Géopolitis. "Dans une Europe qui ne sait pas comment se positionner vis-à-vis de l'immigration, c'est plutôt positif, parce que la Suisse est claire. Certes un peu conservatrice, mais claire."

La Suisse est un pays aimé.

Nicolas Bideau

Bien des choses ont été dites sur la prospérité des Suisses: leur ponctualité, leur impeccable organisation, la précision de leurs machines ou la qualité de leurs écoles. Au sein du Nation Brands Index - classement qui évalue la réputation d'un pays à l'étranger - la Confédération caracole dans le top 10 depuis de nombreuses années, classée 8e en 2017.

"La Suisse est un pays aimé", assure Nicolas Bideau. Directeur de Présence Suisse, il concède volontiers avoir un "boulot facile" - vendre et profiler la Suisse à l'étranger: "On aime notre chocolat, nos montagnes, nos montres, notre stabilité politique et économique." Et notre Roger Federer aussi.

Au-delà des clichés

Derrière l'image d'Epinal, secret bancaire et scandales d'évasion fiscale ont terni l'image de la Suisse à l'étranger. L'ombre de ces affaires n'est pas encore passée, précise Nicolas Bideau. Surtout chez nos voisins: "Quand les Français ont l'impression que les impôts leur échappent parce qu'ils sont en Suisse, il suffit que la conjoncture soit mauvaise en Allemagne, en Italie, en France pour que ces affaires-là suscitent des sentiments négatifs vis-à-vis de la Suisse." L'affaire Cahuzac en est le parfait expemple.

En revanche, l'écho est plus positif en Asie, relève l'ambassadeur: "En Chine ou en Corée, le fait d'avoir une concentration d'avoirs, de l'épargne, c'est un signe de puissance."

Jusqu'à l'affaire des fonds juifs, la Suisse avait une communication très simple: le silence.

Nicolas Bideau

"Il faut communiquer davantage", dit-il. "Jusqu'à l'affaire des fonds juifs, la Suisse avait une communication très simple: le silence. La qualité de ses produits parlait pour elle-même. Puis on s'est rendu compte qu'il fallait se vendre à l'étranger."

Pas si simple. Discrète sur la scène internationale, la petite Suisse a peur d'en faire trop, poursuit Nicolas Bideau. "Les Suisses aiment leur neutralité silencieuse, c'est encore leur ADN."

Mélanie Ohayon, Marcel Mione

>> Voir aussi le rapport 2017 du DFAE sur l'image de la Suisse à l'étranger

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Une diplomatie à la hauteur?

L'indépendance, glorifiée au tout début de l'hymne national helvétique, est inscrite au plus profond des mentalités suisses. Tout comme le principe de neutralité, pilier de la diplomatie.

"Cette Suisse neutre et indépendante était une carte parfaite durant la Guerre froide", rappelle l'ambassadeur Nicolas Bideau. "Les deux puissances savaient qu'on pouvait se rencontrer à Genève. On nous demandait plus facilement des mandats de médiation. Aujourd'hui, dans un monde multipolaire, il y a moins de visibilité pour la politique étrangère suisse".