"Nous nous sommes totalement plantés", avait admis le 18 septembre 2015 le patron de la filiale américaine de Volkswagen Michael Horn. Il reconnaissait que le groupe avait trompé les autorités américaines sur les émissions d'oxyde d'azote (NOx) de millions de véhicules diesel.
Le président du groupe, Martin Winterkorn, démissionnait alors après 8 ans de règne sur les 230 milliards d'euros de chiffre d'affaires du groupe.
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Une fraude planétaire
La fraude? Un logiciel secrètement programmé pour que le moteur réponde aux normes d’émission d’oxyde d’azote sur le banc d’essai mais pas en conditions réelles. Jusqu'à 40 fois plus de NOx étaient en réalité émis. Quelque 11 millions de véhicules étaient concernés par la fraude.
Outre les plus de 30 milliards de francs d'amendes et de dédommagements aux Etats-Unis, Volkswagen a vu la condamnation d’un de ses ingénieurs Oliver Schmidt à sept ans de prison et 400'000 dollars d'amende.
Les parquets allemands enquêtent
En Allemagne, le patron d'Audi Rupert Stadler a été arrêté en juin dernier et demeure en détention provisoire, accusé de fraude et de complicité d'émission de faux certificats. Cette enquête pénale n'est qu'une des multiples procédures ouvertes depuis 2015.
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Le volet boursier de l'affaire, dont le procès vient de commencer, expose par exemple Volkswagen à une charge de près de 9 milliards d'euros d'indemnités. Les actionnaires reprochent à la direction du groupe d'avoir tardé à informer le public de ses problèmes avec les autorités américaines.
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Action collective en Allemagne
Les propriétaires allemands en quête de dédommagements disposeront dès le premier novembre d'un espoir supplémentaire. La possibilité inédite d'une action collective sera mise en œuvre à cette date.
Une association de défense des consommateurs ouvre une nouvelle plate-forme. Selon son secrétariat, les clients lésés suisses pourraient en principe eux aussi prendre part à cette plainte collective.
Suisse à la traîne
En Suisse, le Ministère public de la Confédération a lui aussi ouvert une procédure pénale contre AMAG/Volkswagen sur injonction du Tribunal pénal fédéral saisi par des propriétaires lésés. Le MPC procède au traitement d'un Térabyte de données saisies chez AMAG le 9 décembre 2016 pour en extraire les informations pertinentes à l'enquête.
Il a également sollicité l'entraide judiciaire à la justice allemande. AMAG affirme collaborer avec le MPC et s'estime hors de cause, n'ayant pas eu connaissance d'une "problématique diesel avant le 18 septembre 2015".
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165'000 véhicules concernés
Estimé à l'origine à 180'000, le nombre de véhicules concernés en Suisse s'élève à 165'000, a répondu AMAG à la RTS. Presque tous ont subi la mise à jour logicielle, précise l'importateur: "Chez Audi, Seat et Skoda, nous avons un taux de transformation de 100%, chez VW de 99,94 %, ce qui signifie qu’une poignée de voitures n’a pas encore été mise à jour".
En réponse aux demandes d'indemnisation, AMAG estime qu'il n’y a pas de préjudice pour les clients concernés et qu’il n’y a "donc pas lieu de les indemniser".
Action déboutée à Zurich
Ce n'est pas l'avis de la Fédération romandes des consommateurs qui a réuni 2000 plaignants et les a orientés vers l'action collective MyRight en Allemagne. "S'allier à une action d'envergure, dans le pays même de Volkswagen donne à cette action des chances de succès supplémentaires", estime Florence Bettschart.
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La protection alémanique des consommateurs, la SKS, a elle choisi de mener action devant le Tribunal de commerce de Zurich. Elle vient d'être déboutée en première instance et recourra au Tribunal fédéral.
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Procédure à Genève
A Genève, l'avocat Jacques Roulet représente 600 clients lésés. Il a saisi la justice civile via deux procédures pilotes. "Les procédures avancent, mais il est aberrant de constater que Volkswagen nous dit qu'il n'y a jamais eu de logiciels truqueurs sur les véhicules concernés! C'est un retour en arrière incroyable", évoque l'avocat se référant aux aveux de 2015.
De son côté, Volkswagen AG explique via son avocat à Genève ne pas vouloir commenter les procédures en cours.
Pascal Jeannerat / mh