Directeur de l'Institut Jacques Delors sur les questions européennes, Sébastien Maillard analyse le bras de fer entre Rome et Bruxelles autour du budget italien dans La Matinale de la RTS mercredi.
Pour lui, c'est avant tout "une question de crédibilité pour la Commission européenne et un test pour l'improbable coalition au pouvoir en Italie. Personne ne veut perdre la face. Ce refus du budget est très fort, c'est une première, mais le dialogue va forcément se poursuivre car aucune partie n'a intérêt à être à l'origine de la crise."
Trois semaines
L'Italie a maintenant trois semaines pour revoir sa copie et représenter son budget. Ensuite de quoi, la Commission aura à son tour trois semaines pour l'examiner.
Sébastien Maillard observe que ce budget est électoraliste, mais que la coalition italienne risque bien d'être rattrapée par la réalité économique: "En fait, le vrai arbitre de ce bras de fer, c'est le 'spread', soit l'écart de taux d'intérêt à dix ans entre l'Allemagne et l'Italie. Et si cet écart grandit, les banques italiennes qui sont exposées à ce 'spread' - c'est-à-dire qui détiennent des dettes souveraines italiennes - vont avoir quelques ennuis, leur solvabilité va se détériorer et ce sera le gouvernement italien qui devra aller à la rescousse et alors là, ce projet de budget va peut-être se retourner contre Rome."
Risque d'isolement
De plus, note l'analyste, "l'Italie risque vraiment d'être isolée complètement des autres pays de la zone euro et par ailleurs même l'électorat de la Ligue, des petits entrepreneurs indépendants, n'a peut-être pas envie que ça aille aussi loin.
La vraie corde de rappel, ça peut être d'un côté les marchés mais aussi l'électorat de Salvini qui dit 'basta!' et là, ça risque de créer aussi quelques tensions dans la coalition elle-même".
Propos recueillis par Romaine Morard