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"Perte d'autorité" ou "sortie la tête haute", le pari risqué d'Angela Merkel

L'avenir d'Angela Merkel semble toujours très incertain. [Keystone - EPA/Hayoung Jeon]
Marion Van Renterghem commente la décision d'Angela Merkel de quitter la politique en 2021 / La Matinale / 7 min. / le 30 octobre 2018
Au lendemain de l'annonce d'Angela Merkel de se retirer par étapes de la direction de l'Allemagne, les experts sont divisés, entre ceux qui y voient une stratégie habile, une sortie la tête haute ou une perte d'autorité et un début de paralysie pour l'Europe.

Après deux revers électoraux en Bavière et en Hesse, la chancelière allemande Angela Merkel a fait savoir lundi qu'elle renonçait à la présidence de son parti, la CDU, et qu'elle ne briguerait plus aucun mandat politique après l'actuel, à l'horizon 2021.

>> Lire aussi : Angela Merkel confirme qu'elle quittera la vie politique en 2021

Aux yeux des experts de l'Allemagne, cette annonce ne constitue pas vraiment une surprise, car à 64 ans dont 13 ans à la tête du pays et 18 à la direction de son parti, il semblait certain qu'Angela Merkel ne briguerait pas un cinquième mandat. Mais les spécialistes n'arrivent pas à s'accorder sur les conséquences de cette décision et si elle suffira à maintenir un gouvernement très fragilisé.

"Un départ qui clarifie la situation"

Cette mini-démission constitue un "petit coup de théâtre assez habile de la part d'Angela Merkel" et une "manière pour elle de sortir la tête haute, car elle pourra ainsi aller jusqu'à la fin de son mandat", juge Marion Van Renterghem, auteure du livre "Angela Merkel, l'ovni politique", mardi dans La Matinale de la RTS. Pour elle, la chancelière prouve ainsi qu'elle n'entend pas s'accrocher au pouvoir et surtout elle s'évite de nouvelles élections des plus incertaines.

Marion Van Renterghem estime en outre qu'Angela Merkel était dans une position "intenable" après les difficultés à constituer un gouvernement et les revers dans les urnes, car elle est tiraillée par la droite de la CDU, par son alliée bavaroise la CSU et à sa gauche par le SPD. La biographe juge enfin que si une perte d'autorité est possible dans la foulée de cette décision, celle-ci a néanmoins pour but de clarifier la situation politique et de redonner une sorte de stabilité au pays.

>> L'analyse d'Anne Mailliet dans le 19h30 :

Anne Mailliet "Angela Merkel n'avait plus le choix après ses défaites électorales dans les régions. Elle s'en ira en 2021."
Anne Mailliet "Angela Merkel n'avait plus le choix après ses défaites électorales dans les régions. Elle s'en ira en 2021." / 19h30 / 1 min. / le 29 octobre 2018

"Plus personne ne va l'écouter en Europe"

Pour d'autres, cette annonce ouvre surtout une période d'incertitude en Allemagne et en Europe. Jean-Dominique Giuliani, président de la fondation Schuman interrogé par l'AFP, ce sera surtout la succession de la chancelière à la tête de la CDU qui sera déterminante. Si c'est sa dauphine Annegret Kramp-Karrenbauer qui se profile, "ce sera plutôt une bonne chose pour la relance de l'UE". Mais si ce n'est pas elle, l'écart sera trop grand entre Angela Merkel et son parti, et une démission avant 2021 serait probable, assure Julian Rappolt, analyste pour l'European Policy Center.

Jean-Dominique Giuliani se dit aussi convaincu qu'Angela Merkel va désormais avoir moins d'autorité au niveau continental: "Maintenant (...) plus personne ne va l'écouter en Europe. Elle s'est mise hors course d'emblée", renchérit Sébastien Maillard, directeur de l'institut Jacques Delors Notre Europe. A ses yeux, la retraite de la chancelière va hypothéquer les prochains grands rendez-vous européens, notamment le sommet de décembre consacré à la question migratoire.

"Maintenant que son autorité est entamée, les langues vont se délier. Je pense que son bilan sera assez négatif", soutient encore Jean-Dominique Giuliani. Sébastien Maillard, directeur de l'institut Jacques Delors Notre Europe, est lui aussi critique. "J'ai du mal à mettre son nom sur un acquis européen majeur. Angela Merkel n'a jamais eu de vision pour l'Europe. Elle était plus tacticienne que visionnaire", regrette-t-il.

Horst Seehofer en position délicate

Avec cette annonce d'Angela Merkel, la pression change aussi d'épaules et devient de plus en plus forte pour le président de la CSU bavaroise Horst Seehofer. Certains souhaitent désormais qu'il suive l'exemple de son alliée et quitte son poste.

Un responsable de la CDU dans la Hesse n'hésite ainsi pas à dire que "les désastres en Bavière et dans la Hesse ont pour cause Horst Seehofer, qui a mis son égo au-dessus de ses responsabilités politiques".

>> Le point sur la position de Horst Seehofer dans le 12h30 :

Le président de la CSU Horst Seehofer est remis en question dans son propre parti. [KEYSTONE/DPA - Michael Kappeler]KEYSTONE/DPA - Michael Kappeler
La pression s'accentue sur le président de la CSU bavaroise Horst Seehofer / Le 12h30 / 2 min. / le 30 octobre 2018

Propos recueillis par Romaine Morard

Adaptation web: Frédéric Boillat avec afp

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Trois papables pour la succession

Trois candidats se sont d'ores et déjà déclarés en interne pour succéder à Angela Merkel comme président de la CDU, un poste considéré comme un marche-pied vers la chancellerie.

Parmi eux figurent la secrétaire générale du parti, Annegret Kramp-Karrenbauer, et le ministre de la Santé, Jens Spahn. D'autres pourraient leur emboîter le pas, comme le dirigeant de la puissante région de Rhénanie du Nord-Westphalie, Armin Laschet, qui n'exclut pas de se lancer dans la course.

La chancelière a insisté sur le fait qu'elle n'avait pas de favori pour sa succession. Le nouveau dirigeant sera élu par un millier de délégués réunis en congrès les 7 et 8 décembre à Hambourg.