26 avril 2001: la France découvre Loana. Avec quelques autres anonymes, elle va vivre, dix semaines durant et 24 heures sur 24, sous l'oeil des caméras de M6. Le succès de cette émission d'un genre nouveau, baptisé "Le Loft" est aussi immédiat que phénoménal. Très vite, la télé-réalité importée des Pays-Bas par Endemol va solidement s'ancrer dans les programmes des chaînes commerciales. On parle de voyeurisme, de vacuité, de vulgarité, de "trash télé".
De la bimbo au coach
Dix ans plus tard, la télé-réalité s'est transformée. Elle a su muer et ne pas se restreindre aux seuls programmes d'enfermement qui, dans le sillage du Loft, ont continué avec plus ou moins de succès ("Nice People", "La Ferme des Célébrités"). L'aventure s'est invitée ("Koh-Lanta", "Pékin Express"), puis la séduction avec des célibataires en mal d'épouses ou des couples en manque de frissons.
Les genre a aussi gagné quelques lettres de noblesse, en s'inspirant largement du télé crochet, ces concours destinés à dénicher de nouvelles vedettes. Ainsi, la "Star Academy" et la "Nouvelle Star" ont révélé un certain nombre d'artistes aujourd'hui reconnus, comme Jennifer, Christophe Willem, Julien Doré ou Camélia Jordana.
Aujourd'hui, c'est le "coaching" qui fait planer les audiences. Des spécialistes volent au secours des gens, que cela soit pour les habiller, les faire maigrir, les éduquer, vendre le contenu de leur grenier aux plus offrants. On y découvre comment transformer un intérieur ("D&CO") ou comment rivaliser avec les cuisiniers professionnels ("Top Chef").
De l'avenir
Aujourd'hui, et malgré l'arrêt abrupt début avril de "Carré Viiip" sur TF1, faute d'audience, la "nouvelle télé-réalité" se porte bien. Elle reste peu chère à produire en regard de l'audience générée. Signe qui ne trompe pas, ses recettes ont peu à peu déteint sur le reste des programmes, et notamment les documentaires. On parle ainsi de "docu réalité" à l'image d'une "Semaine sans les femmes". Récemment diffusé sur France 2, ce programme a marqué un tournant: la télévision publique française n'a désormais plus de prévention à l'égard de la télé-réalité. En 2001, la chose aurait été impensable.
AFP /ad
La télé-réalité "à la Suisse"
En Suisse, la TSR n'a jamais produit d'émissions de télé-réalité basée sur le modèle du "Loft". Elle a en revanche beaucoup travaillé le concept du "docu réalité", par exemple avec "Le mayen", où une famille du XXIe siècle se voyait confrontée à la rude vie des paysans d'alpage du passé. Plus récemment, elle a allié la cuisine, le terroir et la notion de compétition à l'occasion du "Dîner à la ferme". Un représentant de chaque canton romand recevait les autres concurrents pour un repas dans son coin de pays. Un concept qui a généré un beau succès d'audience. /ad
Des candidats "travailleurs"
Toutes ces émissions ont généré un nombre incalculable de candidats, dont une partie a parfaitement su exploiter l'exposition médiatique pour se bâtir une notoriété en sur-jouant la "bimbo" ou en accumulant les reparties abêtissantes. Certains candidats, arguant que leurs faits et gestes étaient fortement scénarisés et ne reflétaient donc en rien la réalité, ont demandé à ce que leur participation soit re-qualifiée en contrat de travail: début avril, 56 participants à "L'île de la tentation" ont obtenu entre 15'000 et 17'000 euros pour chacun. Des sommes toutefois nettement inférieures aux quelque 400'000 euros réclamés. /AFP