Dimanche, jour de repos ou de shopping? A Neuchâtel, les consommateurs ont choisi leur camp. Et ont profité en masse de cette ouverture dominicale pour acheter leurs derniers cadeaux de Noël.
"Ce dimanche sera équivalent à un gros samedi alors que l'amplitude horaire est plus faible", estime dans le 19h30 Matthieu Aubert, secrétaire patronal du Groupement neuchâtelois des grands magasins (GNGM). "On constate une excellente fréquentation tant en termes de chiffres d'affaires que de personnes visitant les enseignes."
A l'origine de cette ouverture un dimanche par an à Neuchâtel: une loi entrée en vigueur en 2014 et un accord des commerçants du canton pour des horaires unifiés. Une initiative qui vise notamment à lutter contre le tourisme d'achat et le succès du commerce en ligne.
"Très souvent, les employés n'ont pas le choix"
Les commerces neuchâtelois aimeraient d'ailleurs obtenir un deuxième dimanche par année. Mais en mars dernier, le Grand Conseil a refusé une modification de la loi en ce sens. De quoi satisfaire les partenaires sociaux qui s'inquiètent des compensations qui seraient mises en place pour les employés. Ils ont néanmoins décidé cet été de sonder la branche sur cette question.
"Très souvent, les employés n'ont pas le choix quand ils sont confrontés individuellement à la question du travail dominical", affirme Arnaud Bouverat, secrétaire syndical chez Unia. "Une discrimination à l'embauche est même effectuée dans des entreprises. Et de nombreuses sociétés, dans le commerce de détail par exemple, négligent les obligations de consultation du personnel avant une ouverture dominicale". Soit plusieurs facteurs qui amènent généralement les employés à rejeter les extensions d'horaires, explique le syndicaliste.
Que des commerces familiaux ouverts à Genève
A Genève, l'ambiance au centre-ville s'est avérée dimanche plus morose qu'à Neuchâtel. Les consommateurs partis à la recherche de derniers cadeaux n'ont pu se rabattre que sur les commerces familiaux, autorisés à ouvrir leurs portes (voir encadré). Car même si les Genevois ont accepté en novembre 2016 un contre-projet à une initiative prévoyant l'ouverture des magasins trois dimanches par an, la nouvelle loi n'a jamais été appliquée.
Celle-ci était conditionnée à l'existence d'une convention collective du travail (CCT) étendue dans le commerce de détail, dénoncée en juin 2016 par les syndicats. Aucun accord n'a depuis été trouvé. Cet automne, le Grand Conseil a voté en urgence une loi permettant aux commerces d'ouvrir trois dimanches par an. Mais son entrée en vigueur est suspendue à la suite du dépôt d'un référendum par la gauche et les syndicats.
La situation à Genève, "une catastrophe"
"C'est une catastrophe", affirme Isabelle Fatton, secrétaire patronale de la Fédération romande des entreprises (FER). "De nombreux commerçants aspireraient à pouvoir ouvrir ce dimanche, d'autant plus qu'ils subissent de plein fouet la concurrence de la France voisine où les magasins sont ouverts."
Face à ce patchwork législatif, une harmonisation au niveau fédéral serait-elle nécessaire? "Cette solution a été refusée par les Chambres fédérales", rappelle Arnaud Bouverat. "Le projet se heurtait aux différences cantonales en matière de jours fériés."
La question n'a pas fini de créer le débat dans les différents cantons romands. A Genève, le peuple devrait revoter l'an prochain.
Léa Jelmini/tmun
Que dit la loi?
La législation fédérale permet l'ouverture des magasins quatre dimanches par an. Les commerces situés dans des régions touristiques ou dans les aéroports et grandes gares peuvent toutefois ouvrir leurs portes chaque dimanche.
Au niveau cantonal, Neuchâtel autorise l'ouverture des commerces un dimanche avant Noël, le Jura le permet pour les commerces familiaux, et les cantons de Vaud et du Valais règlent la question via des autorisations communales. Pas d'ouverture généralisée du côté de Fribourg.
Le canton de Berne autorise quant à lui l'ouverture des commerces quatre dimanches par année alors qu'à Genève il n'y a pas d'ouverture des magasins le dimanche avant les Fêtes, sauf s'il s'agit de commerces familiaux, ou pour les sociétés anonymes et à responsabilité limitée si le patron travaille seul sans employé.
Unia saisit la justice face au travail le dimanche à Manor
Avant les Fêtes de fin d'année, la tension entre commerçants et partenaires sociaux à Genève s'est cristallisée autour du cas Manor. Le syndicat Unia a déposé vendredi un recours contre une décision de l'Office cantonal de l'inspection et des relations de travail (OCIRT) qui autorisait le grand magasin à employer du personnel ce dimanche.
L'autorisation avait été délivrée pour une trentaine de personnes dans le but d'effectuer des préparations de boulangerie et de boucherie pour le lundi. Manor a annoncé qu'il déposerait lundi une demande de retrait de l'effet suspensif du recours, en espérant pouvoir obtenir une décision favorable avant le dimanche 30 décembre.
(ats)