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La privatisation des services d'urgences médicales s'étend en Suisse

De nombreux services d'urgences médicales sont en main privée, depuis que l'Etat cherche à les désengorger.
De nombreux services d'urgences médicales sont en main privée, depuis que l'Etat cherche à les désengorger. / 19h30 / 2 min. / le 3 mars 2020
La réorganisation hospitalière favorise l’émergence des privés dans la prise en charge des urgences en Suisse. A peine ouvert, l'Hôpital Riviera-Chablais à Rennaz (VD) fait face à la concurrence des acteurs non étatiques.

En 2018, 28,8% de ces services étaient détenus par des acteurs non publics contre 13% en 2013, selon les dernières statistiques transmises par l'association Cliniques privées suisses.

A l'origine, ce mouvement de privatisation a été initié par plusieurs cantons suisses, dont Vaud, qui souhaitaient désengorger leurs urgences. Mais la demande de traitement dans ce type de service est si forte que les acteurs non publics s'y sont mis eux aussi.

La tendance est visible sur la Riviera vaudoise, où les hôpitaux publics de Vevey et de Montreux ont fermé en novembre dernier, "remplacés" par le nouveau centre Riviera-Chablais (HRC). Et depuis, la fréquentation de Clinique Suisse Montreux SA, centre privé ouvert en 2016 et absent de la liste hospitalière du canton de Vaud, n'a cessé d'augmenter (+8%).

>> Lire aussi : Le déménagement à l'Hôpital Riviera-Chablais de Rennaz (VD) s'est achevé

Quatre autres services d'urgence privés ont également été créés ces dernières années sur la Riviera, dont la permanence franchisée Quai Santé à la gare de Montreux. Cette plateforme médicale envisage de s'implanter prochainement dans d'autres villes romandes.

Patients refoulés faute de personnel

Pour les acteurs de la santé présents dans ce secteur d'activité, le défi consiste à trouver du personnel qualifié et autorisé par l'Etat à facturer à charge de la LAMal. Faute de collaborateurs agréés, des patients sont refoulés.

Les conditions de travail du secteur privé sont très inférieures à celles du public à tous les niveaux

Beatriz Rosende, responsable du secteur de la santé au Syndicat des services publics

"Nous avons traité environ 4000 patients l'année passée, dont un bon 20% de véritables urgences. Mais chaque jour, nous sommes contraints de refuser l'entrée à une dizaine de personnes", témoigne dans le 19h30 Patrick Maire, directeur médical du CIC Groupe Santé.

Beatriz Rosende, responsable du secteur de la santé au Syndicat des services publics, ne s'en étonne pas. "Les conditions de travail du secteur privé sont très inférieures à celles du public à tous les niveaux: salaires, caisses de retraite, accès à la formation, indemnités et compensations pour le travail de nuit.

La situation serait notamment due à l'absence généralisée de discussions entre cliniques privées et syndicats. "Le secteur privé 'économise' clairement sur les coûts du personnel [...] les conditions sont décidées de manière unilatérale par l'employeur sans la moindre négociation", dénonce Beatriz Rosende.

HRC "satisfait"

Sur la Riviera, une seule permanence publique subsiste. Elle est basée à Vevey, sur le site de la clinique de gériatrie et réadaptation de Vevey Providence. Une quinzaine de personnes patientaient dans la salle d'attente lors du passage de l'équipe de la RTS sur le site, durant les vacances scolaires vaudoises de février.

Quant à l'hôpital intercantonal de Rennaz, il est encore en rodage. "On n'occulte pas le fait qu'il y a eu des petits défauts au démarrage mais chaque défaut est en train de se corriger", admet son directeur Pascal Rubin. "Après 100 jours d'activité, on estime être satisfait par rapport aux différents critères qui qualifient une prise en charge aux urgences."

Selon les chiffres transmis à la RTS par la direction de l'établissement, les temps d'attente aux urgences sont dans la norme, malgré de nombreuses critiques. De 15 minutes en moyenne pour les urgences majeures (degré 2) à 87 minutes pour celles ne présentant aucun risque particulier (degré 4).

Claude-Olivier Volluz

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