Alors que le nombre de cas de coronavirus en Suisse a franchi mardi la barre des 500, d'après les chiffres de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP), la Confédération a décidé de modifier sa prise en charge de l'épidémie.
Dorénavant, seules les personnes à risque seront soumises à un dépistage. Les autorités exhortent les autres personnes présentant des symptômes grippaux à rester chez elles.
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La RTS a recueilli lundi -via visioconférence pour cause de confinement- le témoignage de deux Vaudoises dont le quotidien a été chamboulé par la maladie.
Obtenir le diagnostic
Entre le 17 et le 21 février, Marie se rend à un rassemblement d'une église évangélique à Mulhouse, dans l'est de la France.
Frissons, toux et fièvre se déclarent deux jours après son retour en Suisse. Lors d'une première consultation chez sa généraliste, le coronavirus n'est pas évoqué puisque la Lausannoise ne s'est pas rendue dans une zone officiellement considérée comme à risque. On lui diagnostique une grippe saisonnière.
Mais dans les jours qui suivent, son état ne s'améliore pas, au contraire. La fièvre augmente, jusqu'à 40°C durant plusieurs jours. Elle tousse beaucoup. Marie apprend dans les médias que de nombreux participants du rassemblement évangélique de Mulhouse ont contracté le virus.
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Un peu inquiète, elle rappelle les médecins, réclame et obtient un dépistage au CHUV. Le diagnostic tombe une semaine après l'apparition de ses premiers symptômes: il s'agit bel et bien du Covid-19. Débute alors la longue phase de confinement. Ses proches ne passent pas la porte, et laissent les provisions sur le palier.
"On a un peu les ailes coupées"
Il s'avère que dans la semaine précédant la pose du bon diagnostic, une amie de Marie, Francine, lui a rendu visite. Toutes deux pensent alors que Marie est grippée, chacune porte un masque lorsqu'elles se rencontrent.
Malgré cette précaution, Francine va se voir signifier sa mise en quarantaine préventive par les services du médecin cantonal. "Les premières pensées c'est: 'est-ce que j'ai contaminé quelqu'un?' ou 'je vais rendre les choses compliquées'", raconte-t-elle.
Puis elle s'organise, annule les rendez-vous pris, prévient son entourage et s'attelle à transformer sa chambre à coucher en "lieu de vie agréable" dans la perspective d'y passer plusieurs jours confinée.
Pendant la quarantaine, "on est à l'écoute de son corps et de ses symptômes", décrit Francine. "Evidemment, le confinement est désagréable de prime abord, on a un peu les ailes coupées".
Par chance, le mari de la Vaudoise n'est pas considéré comme un cas suspect et prend en charge les courses et les repas. "Mais on ne se voyait qu'avec un masque et la porte fermée", souligne-t-elle. Finalement, Francine n'a pas contracté la maladie.
"J'aurais pu obéir ou pas"
Marie dit avoir eu le sentiment d'être livrée à elle-même. S'il était "important" pour elle de connaître le diagnostic, elle aurait aussi aimé savoir quoi faire. Or elle estime avoir manqué de suivi.
"Comment on survit? Comment on se nourrit? Comment on se soigne? (...) Je ne pouvais même pas me faire à manger!", illustre-t-elle. "Je comprends que tout le monde est débordé, mais je n'ai même pas eu un téléphone pour savoir comment j'allais. Je me suis sentie un peu abandonnée."
De son côté, Francine admet ne pas savoir comment les choses se seraient passées si elle n'avait pas eu son réseau et ses ressources.
Elle relève que le système repose beaucoup sur la responsabilité individuelle. "Finalement, j'aurais pu obéir ou pas". Pour sa part, elle a choisi de jouer le jeu même si "ça m'ennuie, je suis en pleine forme" et "même si [l'autorité sanitaire] tâtonne".
La Confédération ayant décidé de diminuer la durée de la quarantaine, de 14 à 5 jours, Francine a appris lundi qu'elle pouvait reprendre sa vie normale.
"C'est dur, parce que c'est l'inconnu"
Marie, quant à elle, est affaiblie et très fatiguée, mais se porte beaucoup mieux. Ces deux semaines de maladie auront été une expérience particulière.
"Psychologiquement, c'est dur parce que c'est l'inconnu", confie-t-elle. "Bien sûr qu'il y a un peu de crainte, mais (...) j'ai fait tout ce que je pouvais pour garder ma paix et ma joie (...). Pour moi, la foi a été d'un grand secours."
Sujet radio et interviews: Dominique Choffat
Article web, vidéos: Pauline Turuban