Les concession des télévisions régionales de Suisse romande arrivent à échéance à fin 2024. Les nouvelles concessions sont mises au concours, et leurs bénéficiaires rempliront un mandat de service public dès 2025 et recevront de l'argent de la redevance radio-TV.
Parallèlement, les zones géographiques de ces concessions ont été redéfinies. Les nouvelles zones ne présentent pratiquement pas de changement pour la majorité d'entre elles, hormis dans les régions de l'Arc jurassien, du Jura bernois et de Bienne.
Principal changement: une concession sera octroyée à un programme francophone pour la zone de desserte Bienne - Jura bernois et une autre à un programme germanophone pour la zone Bienne - Seeland.
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Effet concret: Canal Alpha ne devra plus couvrir le Jura bernois, qui deviendra la chasse gardée de TeleBielingue. Pour Marcello del Zio, directeur et associé de Canal Alpha, la nouvelle a été une douche froide.
"Au départ, le projet de l'OFCOM (Office fédéral de la communication, ndlr) voulait supprimer toutes les doubles couvertures pour les zones de télévisions régionales, mais lors de la consultation, presque tous les acteurs se sont prononcés en défaveur de ce système. L'OFCOM est revenue en arrière, sauf pour le Jura bernois, ce qui nous a beaucoup étonnés", souffle-t-il dans l'émission Médialogues de la RTS.
Une perte de 400'000 francs
Ce redécoupage entraînera un perte financière très conséquente pour la chaîne de télévision neuchâteloise. "En ce qui nous concerne, en ayant une zone plus petite, le montant de la quote-part de redevance qui nous reviendra sera plus bas. On perd 10%, soit 400'000 francs par année", regrette Marcello del Zio.
Et si la zone à couvrir sera moindre, cela ne signifie pas pour autant que les coûts de fonctionnement de la télévision baisseront de manière similaire, rappelle son directeur associé.
"Il y a un peu une taille critique pour un média comme le nôtre. On a certes une zone géographique plus petite, mais le nombre de minutes qu'on doit produire par jour est le même. Ce qui va changer, c'est qu'on ne couvrira pas le Jura bernois, mais on devra consacrer le même temps d'antenne à l'actualité, et on devra le faire avec moins d'argent."
A ce titre, les télévisions régionales ne sont pas toutes logées à la même enseigne. Il y a des télévisons qui garderont la même zone de concession et qui verront leur quote-part baisser, et au contraire, d'autres qui recevront plus d'argent tout en couvrant la même zone.
Des gagnants et des perdants
Marcello del Zio, qui est également membre du comité de l'Association des télévisions privées suisse, fait un petit état des lieux: "Léman Bleu perdra environ 8%, la Télé Vaud-Fribourg perdra environ 10%, Canal 9 va gagner 9%, et nous on perd 10%. Et la quote-part de TeleBielingue augmentera de 15%, soit la plus grande augmentation de Suisse."
Mais, au-delà de la perte financière, Marcello del Zio regrette que Canal Alpha perde une partie de son mandat. Il estime qu'il n'est pas possible pour la chaîne de prétendre être la télévision de l'Arc jurassien sans couvrir le Jura bernois.
"Le Jura bernois fait partie de l'Arc jurassien, c'est une entité régionale. Ça fait plus de 13 ans que l'on couvre la région. On essaie de créer des ponts. On s'imagine mal de ne plus du tout parler du Jura bernois à l'avenir, même si ça ne fait plus partie de notre zone de desserte. Il faudra qu'on trouve un moyen pour financièrement faire fonctionner cela. Mais c'est clair qu'on ne pourra plus mettre l'accent au niveau de l'actualité sur le Jura bernois."
Décision actée
Pour Marcello del Zio, "les jeux sont faits", et le redécoupage des concessions est inéluctable. Pour autant, il ne baisse pas les bras. "En tant que télévision régionale, nous avons l'habitude d'être endurants et de nous adapter. Nous sommes soumis depuis toujours à des modifications."
"Au gré des années qui passent, les contraintes légales changent, le marché publicitaire évolue rapidement. On doit toujours s'adapter, trouver des solutions, des bonnes idées pour survivre. On sait le faire, et c'est aussi ce qui donne un peu de pétillant dans notre travail. On est obligé de se réinventer et on se réinventera encore une fois."
Propos recueillis par Antoine Droux
Version web: Antoine Schaub