Forte aujourd'hui de 150 membres, l'association fondée en 2020 a décidé de changer de nom. Elle s'appelle désormais "Bien Vivre à Neuchâtel". Elle veut en effet étendre son action au niveau cantonal. Le nouveau site internet vise à fournir des informations aux adhérents. Il abrite aussi un forum de discussion. Le but est de recueillir des témoignages d'autres habitants de la région qui auraient subi des actes délictueux de la part de résidents du Centre.
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"Cela permet aux gens d'échanger et de parler des traumatismes qu'ils ont pu vivre avec les différents cambriolages, vols et harcèlements dans les transports publics, notamment les jeunes filles", déclare dans La Matinale Dastier Richner, président de l'association. "Beaucoup de gens ne portent pas plainte, parce que cela demande du temps. Certains ont peut-être aussi peur des représailles. Les statistiques, c'est une chose, la réalité en est une autre. On va essayer de répertorier la problématique via ce forum", explique-t-il.
La haine n'est pas tolérée
Le forum est accessible aux seuls membres et est contrôlé par le comité. Son président assure qu'en cas de dérapage, il sera immédiatement fermé. L'association dit ne pas vouloir alimenter la haine des réfugiés. Elle se présente comme apolitique.
Le bras de fer qu'elle a engagé, lui, est bel et bien politique. L'association a envoyé la semaine dernière une lettre à Florence Nater, conseillère d'Etat en charge du dossier. Ses membres veulent accroître la pression sur le Canton - propriétaire des bâtiments - pour qu'il résilie les contrats avec la Confédération.
"Le ratio entre la population de Boudry (environ 5000 habitants) et de la population du Centre (jusqu'à environ 1000 personnes) est absolument impossible", assène Dastier Richner.
Ce centre n'a pas sa place dans un village
Revenir aux capacités initiales
A la question de savoir si le centre restera à Boudry, la conseillère d'Etat Florence Nater répond que c'est la Confédération qui répartit les requérants à travers les différents centres de Suisse. "Donc ça reste à voir", a indiqué la ministre de la cohésion sociale dans une interview parue mercredi dans Arcinfo.
"Mais quoi qu’il en soit, nous voulons revenir aux capacités initialement prévues de 480 personnes et non plus du double", ajoute la ministre. "Le climat actuel est inacceptable pour les habitants", reconnaît-elle. Selon elle, il faut que la Confédération reprenne la question de lieux supplémentaires de réserve.
Seule une petite minorité de délinquants
La Police neuchâteloise précise pour sa part que ces délits sont commis par un noyau dur d'une quinzaine d'individus. "Le Centre accueille plusieurs centaines de personnes qui ont déposé des demandes et sont en procédure d'accueil", déclare Georges-André Lozouet, le porte-parole de la Police.
"Sur cette quantité de réfugiés, une minorité nous pose des problèmes. On parle mensuellement d'une quinzaine d'individus. Ce n'est pas toujours les mêmes, parce qu'il y en a qui apparaissent ou disparaissent. Ces personnes-là commettent énormément de délits. Une personne peut commettre une cinquantaine de délits. Donc vous comprenez aisément que cela fait exploser la statistique", précise-t-il.
On est plutôt dans une tendance à la hausse de ce type d'infractions imputables à ce petit groupe d'individus qui nous posent des problèmes
Le représentant des forces de l'ordre ajoute que ces personnes se déplacent en transport public en ville de Neuchâtel ou sur les communes du littoral neuchâtelois.
Le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) indique de son côté avoir déjà renforcé la surveillance à l'extérieur du centre (lire encadré). Une séance d'information à la population est par ailleurs prévue cette année.
Romain Bardet/ami
Des agents de sécurité patrouillent en dehors du centre
Le Secrétariat d'Etat aux migrations assure que l'enjeu sécuritaire est pris au sérieux. La sécurité à l'extérieur du Centre est du ressort de la police cantonale, souligne Anne Césard, la porte-parole du SEM, qui précise que le Canton reçoit un forfait de la part de la Confédération pour assurer cette tâche.
"Le SEM organise des patrouilles externes d'agents de sécurité", explique-t-elle. "Ces patrouilles n'ont pas un mandat de police: elles ont une fonction préventive et dissuasive. Cela dit, on a renforcé les patrouilles depuis février. Il faut aussi voir s'il faut ajuster le parcours de ces patrouilles. Ce sont des discussions qui doivent être menées en accord avec les acteurs concernés, c'est-à-dire les représentants du SEM, du Canton, de la Commune et de la Police."
>> L'interview d'Anne Césard dans La Matinale:
A Sornetan (BE), "on n'a vraiment pas à se plaindre"
Petit village du Jura bernois, Sornetan se trouve à la frontière avec le canton du Jura. Une centaine d’habitants, aucun commerce, pas même une épicerie. On y trouve cependant un centre de séminaires, qui accueille depuis fin novembre une centaine de requérants d’asile. Il est géré par la Croix Rouge suisse.
La RTS s’est rendue sur place pour voir comment se passe la cohabitation. Partant de 60 places à disposition, le dispositif d'accueil est aujourd'hui de 150 places. Les personnes présentes sont "en cours de procédure" d'asile. Ils attendent une réponse définitive du SEM sur l'octroi de leur statut de réfugié.
"Ceux qui arrivent ici, à Sornetan, ont déjà vécu 3 à 4 mois en Suisse, et en général, ils restent ici chez nous pour une période qui peut aller de 3 mois jusqu'à une année", explique Alexandre Dien, responsable du centre d'hébergement collectif de Sornetan.
Une cohabitation agréable
Un requérant d'asile venant du Burundi évoque une " bonne expérience" avec des "habitants cools" dans un village où "on est bien entouré".
Willy Pasche, maire de la commune de Petit-Val, comprenant Sornetan, explique avoir mis en place un groupe de bénévoles pour donner des cours de langue, tout en ajoutant espérer pouvoir transmettre un message de bienvenue. "Mais 'bienvenu' veut aussi dire quelles sont nos coutumes, quelles sont nos sensibilités", ajoute le maire.
Une passante évoque des requérants discrets, souriants et polis. "On a vraiment pas à se plaindre", dit-elle. "Pas de crainte, mais je me suis dit que ce serait bientôt une grosse affaire, parce qu'ils seront plus nombreux que nous d'ici peu", s'interroge une autre passante. "Ils sont, je pense, un peu ouverts à tout, mais, dans nos villages, je ne sais pas si tout le monde est ouvert à tout ça," s'inquiète-t-elle tout de même.