Une centaine de bénévoles ont scruté 18 plages suisses et sept plages françaises publiques, donc nettoyées par les services communaux, les plus gros déchets étant régulièrement retirés. Au total, 7487 éléments de plastique ont été récoltés sur les 1695 mètres que totalisent les 25 plages sélectionnées.
L'un des problèmes relevés par l'étude de l'ASL est qu'une grande partie de ces déchets sont de plus en plus petits. Parmi les plastiques visibles à l'oeil nu, près de la moitié sont encore identifiables. Le reste est de moins en moins reconnaissable. Les emballages d'aliments, suivis des granulés destinés à la fabrication d'objets et des cotons-tige, sont en tête de classement.
Nouveau type de déchet
L'étude montre ainsi la présence massive de microplastiques: fibres textiles, microbilles ou alors des fragments de morceaux plus grands. "Ce qu'on a pu constater pendant l'étude, c'est que tous ces déchets se fragmentent et deviennent de plus en plus difficiles à collecter", explique Suzanne Mader-Feigenwinter, secrétaire générale de l'ASL dans La Matinale de la RTS.
"Petit à petit, on ne va plus pouvoir extraire le plastique et il va entrer dans la chaîne alimentaire", s'alarme-t-elle également.
Cette étude a également permis de découvrir la présence d'un nouveau type de déchet: "des fibres utilisées dans le béton pour la construction de ponts ou de tunnels", explique Suzanne Mader-Feigenwinter. "Ces fibres sont rejetées dans l'environnement, soit par les eaux pluviales, soit sur les roues des camions qui sortent des chantiers", poursuit-elle.
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Les autorités ont ainsi pu être alertées de "ces nouveaux éléments présents dans l'environnement dont on n'avait pas conscience".
Mesures pas suffisantes
A Genève, l'Office cantonal de l'eau tente d'agir pour limiter le problème. "On fait déjà ce travail de sensibilisation, mais on a besoin d'aller probablement plus loin", affirme Mathieu Coster, adjoint scientifique à lOffice cantonal genevois de l'eau au micro du 19h30 de la RTS.
Il estime que la sensibilisation et la bonne volonté de chacun et chacune ne suffiront pas à régler le problème. "Je pense qu'on va devoir arriver à des mesures coercitives si on veut juguler le problème des déchets sauvages", estime-t-il.
Accumulation de plastique aux Grangettes
Chaque année, 50 tonnes de plastique contaminent le Léman, selon une précédente étude. Et c'est la plage de l'Empereur, aux Grangettes à l'ouest de Villeneuve, qui présente les concentrations les plus importantes, malgré des ramassages effectués régulièrement par plusieurs associations et des particuliers.
Chaque année, "plusieurs dizaines de mètres cubes de plastiques sont ainsi retirés de l’environnement et évitent une accumulation qui serait dramatique pour le site", souligne l'étude. La proximité de l'embouchure du Rhône et du Grand Canal, mais aussi les vents et les courants pourraient expliquer pourquoi la plage de l'Empereur est la zone du lac où s’accumulent le plus de déchets.
Sujet radio: Romain Bardet
Adaptation web: Emilie Délétroz avec afp
La traque des effets des microplastiques sur la santé s'intensifie
Chaque jour, les humains ingèrent, inhalent, ont la peau en contact avec des microparticules de plastique (moins de 5 millimètres). Elles sont dans l'air, dans de l'eau, des aliments, des emballages, des textiles synthétiques, mais aussi des pneus ou des cosmétiques.
Ces dernières années, chez les humains, des microplastiques ont été détectés dans les poumons, le foie, le placenta et, en dernier lieu, le sang, selon une étude néerlandaise parue en 2022 dans la revue Environment International.
"Bombe à retardement"
"On ignore si notre niveau d'exposition induira à long terme des maladies chroniques ou aiguës, mais on peut se poser légitimement la question", explique le toxicologue Xavier Coumoul.
En effet, des recherches chez l'animal ou in vitro ont détecté des effets au niveau cellulaire (hausse de l'inflammation, du stress oxydatif, de la mortalité cellulaire, etc).
Parallèlement aux effets sur la santé, une grande incertitude demeure aussi sur le niveau exact d'exposition aux microplastiques, mais certains chercheurs redoutent tout de même qu'ils constituent une "bombe à retardement".