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Le Valais efface des marquages au sol censés améliorer la sécurité des motards

Un marquage au sol prévu pour la sécurité des motards, dans le col du Mollendruz (Vaud). [Canton du Valais - DR]
Un marquage au sol prévu pour la sécurité des motards, dans le col du Mollendruz (Valais). - [Canton du Valais - DR]
Pour éviter les chocs frontaux avec des motards, de nouveaux marquages au sol étaient à l'essai sur les routes de plusieurs cols romands, notamment au col du Mollendruz (VD) et au col de la Forclaz (VS). Or, les autorités cantonales valaisannes, pas convaincues, les ont récemment effacés, a appris la RTS jeudi.

Chaque été, les annonces de décès de motards dans les cols se succèdent. Pour réduire les accidents, trois régions - le col du Brünig dans l’Oberland bernois, le col du Mollendruz sur le canton de Vaud et le col de la Forclaz en Valais - ont décidé de tester de nouvelles solutions. Parmi elles, des bandes de peinture blanche au sol pour repousser les motards vers l'extérieur du virage.

Technique connue en Autriche et au Luxembourg

Cette nouvelle signalétique suscitait de grands espoirs pour améliorer la sécurité des motards dans les cols. La technique est déjà connue en Autriche ou au Luxembourg par exemple. Or, son efficacité est pour l'instant loin d'être prouvée, au point que le Valais a décidé de revenir en arrière.

Motard depuis quarante ans et responsable sécurité à la Fédération motorisée valaisanne, Fabian Boulnoix a testé cette nouvelle signalétique. Pour lui, il y a des bons et des mauvais côtés, comme il l'explique au micro de La Matinale.  

"Il y a ceux qui disent que ce n'est pas mal. Instinctivement, on va éviter de rouler dessus et passer à côté, donc ça peut aider pour la trajectoire." Selon lui, ça peut recadrer les motards aux comportements les plus dangereux. "Et puis, ça peut surprendre parce que si les gens ne savent pas à quoi s’attendre à l’entrée de ces cols, ça attire l’œil. Les avis sont partagés", poursuit-il.

Reste qu’en Valais, les motards ne peuvent plus expérimenter cette infrastructure de prévention. Alors certes, les travaux de marquage ont bien eu lieu, comme c’était prévu, en juin dernier. Mais comme l'a appris la RTS, les autorités cantonales ont précipitamment effacé la peinture à peine trois semaines après sa mise en place.

De graves défauts potentiels

Ce nouveau marquage sur la route, qui a coûté quelque 140'000 francs au canton, pourrait comporter de graves défauts. Selon Vincent Pellissier, chef du Service valaisan des routes, les conditions de sa pose n'étaient en effet pas optimales, notamment en raison de la chaleur à ce moment-là. L'adhérence des pneus sur le marquage ne pouvait donc plus être garantie.

"Lorsqu'on l'a posé au mois de juin, c'était le début de l'été. On a rencontré des difficultés sur la qualité", explique-t-il. Autrement dit, les pneus pouvaient glisser sur le marquage. "Pour éviter de mettre en danger la sécurité des motards en particulier, mais aussi des cyclistes, on a donc décidé de le retirer. Et puis, le cas échéant, on pourra le refaire dans des conditions climatiques plus appropriées", précise-t-il.

Il faut dire qu’à peine quelques jours après avoir posé le revêtement, une personne en moto est décédée sur le col de la Forclaz. Si les raisons de cet accident ne sont pas encore connues, le lien avec le revêtement ne peut pas être prouvé non plus. D'autant que cet endroit de la route est le théâtre de nombreux accidents chaque année. Une enquête est en cours. "En ma qualité d'ingénieur cantonal, je dois minimiser les risques, c'est pour ça qu'il a été décidé par précaution de supprimer ce marquage", conclut Vincent Pelissier.

La question de l'adhérence déjà connue

Dans l’analyse de cette nouvelle technique de prévention, le bureau de prévention des accidents (BPA) avait déjà identifié d’éventuels problèmes d’adhérence. Même si les motards ne devraient en principe pas rouler dessus, la qualité du revêtement doit être régulièrement contrôlée, comme l'indique Lucien Combaz, conseiller technique de la circulation auprès du BPA.

"On place quand même un élément étranger sur la chaussée, qui doit respecter les valeurs minimales prescrites par les normes. Et comme il s'agit d'un marquage qui est situé près de la ligne médiane, il est sur l'axe de roulement des véhicules motorisés", précise-il. Des camions et voitures qui, en roulant systématiquement dessus, les usent assez rapidement.

"On essaie d'avoir des infrastructures qui pardonnent aussi les erreurs. Si un motard roule par mégarde ou pour une quelconque raison sur ces marquages-là, ils ne doivent pas créer un nouveau risque d'accident", conclut-il

Diana-Alice Ramsauer/fgn

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Quid du canton de Vaud?

Le canton de Vaud assure avoir vérifié l’adhérence du marquage sur le col du Mollendruz, qui répond aux normes selon lui. Des travaux de rafraîchissement ont par ailleurs été effectués au printemps.

Les tests se poursuivent donc, car les résultats, après une année, sont plutôt concluants, à en croire Laurent Tribolet, chef de la division Entretiens à la Direction générale de la mobilité et des routes.

"Le premier bilan sur la trajectoire des motards est excellent, avec plus de 86% des usagers qui sont dans la zone verte d'une trajectoire sécuritaire. C’est-à-dire 38% qui se sont décalés au bon endroit par rapport à avant. Donc, c'est très positif de ce côté ci", indique-t-il. Et ceux qui restent sont les irréductibles qui sont difficiles à sensibiliser, selon lui.

Solution à trouver

Au vu du nombre d'accidents chaque année à cet endroit, il fallait trouver une solution. "Entre 2015 et 2022, on a eu à peu près 92 accidents, dont 48% impliquaient des motards. Il fallait qu'on réagisse, et cela également par rapport au sentiment d'insécurité qu'ont les riverains à Mont-la-Ville et à la Vallée de Joux."

A noter qu'il est encore trop tôt pour tirer des conclusions concernant les accidents, selon le canton. D’autant que certains comportements restent tenaces, comme les accélérations intempestives qui génèrent de gros pics de bruit.

Le risque de chute mortelle n'a certainement pas disparu par magie. Après plusieurs mois d’accalmie, le col du Mollendruz a, à nouveau, fait un mort cet été, malgré les marquages.